Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 septembre et 12 décembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Loches ; la commune de Loches demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10NT01857 du 13 juillet 2012 de la cour administrative d'appel de Nantes rejetant son appel contre le jugement n° 0801085 du 15 juin 2010 du tribunal administratif d'Orléans rejetant sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le préfet d'Indre-et Loire à sa demande préalable en date du 20 décembre 2007 et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices qu'elle a subis en raison de la délivrance de trois permis de construire autorisant la construction d'habitations dans une zone présentant un risque d'effondrement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Gérald Bégranger, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la commune de Loches ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'un rapport d'expertise établi le 14 décembre 2001 a mis en évidence des désordres affectant la stabilité de plusieurs pavillons situés sur le territoire de la commune de Loches (Indre-et-Loire), construits à l'aplomb d'une ancienne carrière souterraine où un effondrement important s'était produit une quarantaine d'années auparavant ; que, par un arrêté de péril pris le 4 mars 2003, le maire de Loches a, sur le fondement des dispositions des articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation dans leur rédaction alors en vigueur, enjoint au propriétaire de l'ancienne carrière de réaliser à ses frais des travaux confortatifs ; que, par un jugement du 7 octobre 2004, le tribunal administratif d'Orléans a homologué cet arrêté ; que, toutefois, par une décision du 30 août 2006, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé le jugement du tribunal administratif et rejeté la demande de la commune de Loches tendant à l'homologation de l'arrêté de péril ; que, par une lettre du 20 décembre 2007, la commune de Loches a demandé au préfet d'Indre-et-Loire de lui verser une indemnité correspondant principalement au coût des travaux confortatifs, en faisant valoir qu'elle devait supporter la charge des travaux confortatifs nécessaires pour remédier à des désordres qui trouvaient leur origine dans la délivrance au nom de l'Etat, entre 1962 et 1965, des permis de construire autorisant l'édification des pavillons en cause ; qu'à la suite du rejet de cette demande, la commune a présenté devant le tribunal administratif d'Orléans un recours indemnitaire contre l'Etat, qui a été rejeté par un jugement du 15 juin 2010 ; que la commune de Loches se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 juillet 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel dirigé contre ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes (...) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir (...) ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance (...) " ;
3. Considérant que, pour juger prescrite la créance sur l'Etat dont la commune de Loches se prévalait, la cour administrative d'appel de Nantes a estimé que la commune avait disposé, dès le dépôt du rapport d'expertise du 14 décembre 2001, d'indications suffisantes pour imputer les risques pour la stabilité des pavillons à l'Etat ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher la date à compter de laquelle la commune de Loches pouvait être regardée comme n'ignorant pas que la charge financière des travaux nécessaires pour pallier ces risques lui incomberait, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la commune de Loches au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 13 juillet 2012 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : L'Etat versera à la commune de Loches la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Loches et à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.