Vu la requête, enregistrée le 5 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société Veynat, dont le siège est RD 936 avenue de Branne à Tresses (33370) ; la société Veynat demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler, d'une part, la décision implicite par laquelle le ministre délégué, chargé du budget, a refusé d'annuler sa circulaire du 7 février 2013 relative au remboursement d'une fraction de la taxe intérieure de consommation sur le gazole consommé par les transporteurs routiers de marchandises et les exploitants de transport public routier en commun de voyageurs et modifiant le taux de remboursement de la taxe pour le second semestre de l'année 2012, d'autre part, cette circulaire ;
2°) d'enjoindre au ministre délégué, chargé du budget de traiter sa demande de remboursement pour le second semestre 2012 sur le fondement de la circulaire du 23 mai 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;
Vu la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 ;
Vu le code des douanes ;
Vu la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 de finances pour 1999 ;
Vu la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 ;
Vu la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 ;
Vu le décret n° 99-723 du 3 août 1999 ;
Vu le décret n° 2001-90 du 30 janvier 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Esther de Moustier, auditeur,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;
1. Considérant que le remboursement partiel de la taxe intérieure sur les produits pétroliers en faveur des entreprises de transport routier de marchandises ou de voyageurs a été institué par l'article 26 de la loi du 30 décembre 1998 de finances pour 1999 qui a inséré un article 265 septies dans le code des douanes ; que ce dispositif a été précisé par le décret du 3 août 1999 fixant les modalités d'application de cet article ; que l'article 9 de ce décret, dans sa rédaction issue du décret du 30 janvier 2001 dispose qu' " en cas de changement de taux de la taxe intérieure de consommation sur le gazole au cours du semestre couvert par le remboursement, le taux de remboursement retenu est un taux moyen pondéré par le nombre de jours d'application de chaque taux au cours de ce semestre " ; qu'à la suite de la transposition de la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 qui a fixé un niveau minimum de taxation à compter du 1er janvier 2005, le législateur a modifié en 2004 l'article 265 septies du code des douanes en fixant pour le remboursement d'une partie de la taxe un taux plancher de 39,19 euros par hectolitre de gazole ; que, compte tenu de la régionalisation à compter du 1er janvier 2007 d'une fraction de la taxe, dont le 2 inséré à l'article 265 du code des douanes par la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 précise qu'elle est fixée par des " délibérations des conseils régionaux et de l'assemblée de Corse [qui] ne peuvent intervenir qu'une fois par an et au plus tard le 30 novembre de l'année qui précède l'entrée en vigueur du tarif modifié ", l'article 265 septies a été modifié à nouveau pour prendre en compte cette composante régionale puis, par la loi du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007, pour offrir aux entreprises la possibilité d'opter entre deux modalités de calcul de leur remboursement, dont l'application d'un taux moyen de remboursement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 265 septies du code des douanes dans sa rédaction applicable lors de l'adoption de la circulaire attaquée, issue de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 : " Les entreprises propriétaires ou, en leur lieu et place, les entreprises titulaires des contrats cités à l'article 284 bis A : / a) De véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes ; /b) De véhicules tracteurs routiers dont le poids total roulant est égal ou supérieur à 7,5 tonnes, / peuvent obtenir, sur demande de leur part, le remboursement d'une fraction de la taxe intérieure de consommation sur le gazole, identifié à l'indice 22 (...) ; / Ce remboursement est calculé, au choix de l'entreprise : /- soit en appliquant au volume de gazole utilisé comme carburant dans des véhicules définis aux a et b, acquis dans chaque région (...), la différence entre 39,19 euros par hectolitre et le tarif qui y est applicable en application des articles 265 et 265 A bis ; / soit en appliquant, au total du volume de gazole utilisé comme carburant dans des véhicules définis aux a et b, acquis dans au moins trois des régions, (...) un taux moyen de remboursement calculé en pondérant les différents taux régionaux (...) par les volumes de gazole respectivement mis à la consommation dans chaque région (...). Le montant de ce taux moyen pondéré est fixé annuellement par arrêté. / Les entreprises concernées peuvent adresser leur demande de remboursement au service des douanes à partir du premier jour ouvrable suivant respectivement la fin du premier et du second semestre de chaque année et au plus tard dans les trois ans qui suivent. (...) Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret " ;
3. Considérant que, par une circulaire du 23 mai 2012, le ministre délégué chargé du budget a, conformément à ces dispositions, déterminé le taux moyen de remboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) résultant pour l'année 2012 du tarif national et des tarifs régionaux de cette taxe applicables au gazole indice 22 pour 2012 ; qu'en raison de la diminution de 3 euros par hectolitre du tarif national de la taxe, qui avait été décidée à compter du 28 août 2012, le ministre, par une seconde circulaire du 7 février 2013, a abrogé la circulaire précédente et a fixé, conformément à l'article 9 du décret précité du 3 août 1999, le taux moyen de remboursement de la taxe pour le second semestre de 2012 résultant de cette diminution ;
4. Considérant, en premier lieu, que l'article 265 septies du code des douanes prévoit deux modalités de remboursement ; que la composante régionale de la taxe demeure invariable en cours d'année dès lors qu'elle dépend du vote des tarifs par les régions et de la prise en compte des volumes de gazole mis annuellement à la consommation dans les différentes régions ; qu'en revanche, si les entreprises choisissent la première modalité de remboursement, il résulte nécessairement de l'article 265 septies que le montant du remboursement variera en cours d'année si le taux national de la taxe varie ; que, de même, si les entreprises choisissent la seconde modalité de remboursement, le taux moyen de remboursement doit nécessairement être affecté par un changement du taux national, la loi ayant seulement entendu prévoir que la part régionale est fixée annuellement ; que, d'ailleurs, l'article 9 du décret du 3 août 1999, compte tenu de sa date, doit être interprété comme prévoyant un ajustement semestriel du taux de remboursement en cas de variation de la seule part nationale de la taxe ; que la société requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que la fixation semestrielle du taux de remboursement prévue par le décret serait contraire au principe d'annualité posé par l'article 265 septies du code des douanes, qui ne s'applique qu'à la composante régionale de ce taux ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le taux de remboursement de la taxe pour ce second semestre n'a été fixé que par la circulaire en date du 7 février 2013 ne suffit pas à conférer à ce texte un caractère rétroactif dès lors que le ministre s'est ainsi borné à appliquer les règles de calcul du taux de remboursement de la taxe qui s'imposaient à lui ; qu'ainsi la société n'est pas fondée à soutenir qu'en raison de sa prétendue portée rétroactive la circulaire attaquée serait entachée d'incompétence, ni qu'elle méconnaîtrait l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou, en tout état de cause, le principe de confiance légitime ;
6. Considérant, enfin, que la circonstance que les dispositions des articles 265 septies et 265 octies ouvrent aux transporteurs un droit à remboursement dès le premier jour ouvrable suivant le semestre au titre duquel ils sollicitent un remboursement ne fait pas obstacle à ce que le taux de remboursement applicable à un semestre soit arrêté postérieurement à la fin de ce semestre ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la circulaire attaquée ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la société Veynat est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Veynat et au ministre des finances et des comptes publics.