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06/10/2014 | FRANCE | N°384283

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 06 octobre 2014, 384283


Vu la requête, enregistrée le 8 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme B...C..., demeurant... ; la requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision par laquelle le directeur des services judiciaires du ministère de la justice du 17 juillet 2014 a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'un report de scolarité du deuxième concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature ouvert au

titre de l'année 2013 ;

2°) d'enjoindre à la garde des sceaux, ministr...

Vu la requête, enregistrée le 8 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme B...C..., demeurant... ; la requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision par laquelle le directeur des services judiciaires du ministère de la justice du 17 juillet 2014 a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'un report de scolarité du deuxième concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature ouvert au titre de l'année 2013 ;

2°) d'enjoindre à la garde des sceaux, ministre de la justice, en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, de faire droit à sa demande de report de scolarité et de l'affecter à l'Ecole nationale de la magistrature à la rentrée de la promotion suivante, c'est-à-dire en février 2015, et, en toute hypothèse, de réexaminer son dossier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'ordonnance à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que la décision litigieuse préjudicie de manière grave et immédiate à ses intérêts en ce qu'elle l'empêche de suivre la formation susceptible de lui donner accès au corps des magistrats de l'ordre judiciaire et que le report du bénéfice de son admission à ce concours ne peut lui être accordé postérieurement à la rentrée de la promotion suivante, devant se tenir en février 2015 ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- le directeur des services judiciaires du ministère de la justice n'est pas compétent pour statuer sur une demande de report de scolarité ;

- la décision contestée méconnaît son droit à un report de scolarité pour motif légitime découlant du décret n° 72-355 du 4 mai 1972 ;

- elle doit être considérée comme n'ayant jamais renoncé au bénéfice de l'admission au deuxième concours ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article 27 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dès lors que l'Ecole nationale de la magistrature ne l'a pas informée, lorsque cet établissement lui a demandé de renoncer au bénéfice du deuxième concours d'accès, qu'elle avait la possibilité de solliciter le report de scolarité correspondant ;

Vu la décision dont la suspension de l'exécution est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation de cette décision ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2014, présenté par la garde des sceaux, ministre de la justice, qui conclut au rejet de la requête ;

elle soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie dans la mesure où

Mme C...a été réintégrée dans ses fonctions antérieures de greffière en chef sans interruption de sa rémunération et où elle dispose de plusieurs autres voies d'accès au corps judiciaire ;

- aucun des moyens soulevés n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- le directeur des services judiciaires était compétent pour prendre la décision contestée ;

- Mme C...a définitivement renoncé au bénéfice du second concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature et, dès lors, la question d'un report de scolarité ne se pose pas ;

- l'Ecole nationale de la magistrature n'était pas tenue au respect d'une obligation d'information sur la possibilité d'un report de scolarité puisque Mme C... n'était pas empêchée de suivre sa formation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu le décret n° 72-355 du 4 mai 1972 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme C..., d'autre part, la garde des sceaux, ministre de la justice, ainsi que l'Ecole nationale de la magistrature ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 2 octobre 2014 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Rousseau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de MmeC... ;

- la représentante de la garde des sceaux, ministre de la justice ;

- le représentant de l'Ecole nationale de la magistrature ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clôturé l'instruction ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

2. Considérant que Mme C...a été déclarée admise, d'une part, le

5 décembre 2013, au bénéfice du concours de recrutement des magistrats de second grade et, d'autre part, le 11 décembre 2013, au bénéfice du deuxième concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature, tous deux ouverts au titre de l'année 2013 ; qu'elle a, par courrier du 14 décembre 2013, choisi de suivre la scolarité dispensée dans le cadre de la formation destinée aux lauréats du concours complémentaire de recrutement des magistrats de second grade et, par la même occasion, expressément renoncé au bénéfice du deuxième concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature ; que, par arrêté du 23 décembre 2013, Mme C...a été nommée magistrat stagiaire du second grade de la hiérarchie judiciaire à compter du

6 janvier 2014 ; qu'au terme de sa formation probatoire, le jury de classement a rendu un avis concluant à l'inaptitude de Mme C... à l'exercice des fonctions judiciaires ; que, par un courrier du 30 juin 2014, Mme C...a saisi ce même jury d'un recours gracieux tendant au réexamen de son dossier et à la transmission de l'avis en cause à la commission d'avancement ; qu'à la suite du rejet de sa demande par le président du jury, Mme C...a saisi le 27 juin 2014 le directeur des services judiciaires d'une demande tendant, d'une part, à la transmission de l'avis d'aptitude et de classement à la commission d'avancement et, d'autre part, à l'obtention d'un report de scolarité au titre de son admission au second concours d'accès à la magistrature ouvert pour l'année 2013, en vue d'intégrer la promotion de l'année 2014 ou de l'année 2015 ; que, par une décision du 17 juillet 2014, le directeur des services judiciaires a rejeté la demande de MmeC... ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A..., directeur des services judiciaires, avait compétence pour signer la décision litigieuse ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 40 du décret du 4 mai 1972 relatif à l'Ecole nationale de la magistrature : " Lorsque, pour un motif légitime, un candidat déclaré admis aux concours d'accès à l'école ou nommé directement auditeur de justice sur le fondement de l'article 18-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée se trouve dans l'impossibilité de débuter la scolarité, il peut faire l'objet, sur sa demande, d'un report de scolarité jusqu'à la rentrée de la promotion suivante, accordé par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. Lorsque le motif de cette demande est tiré de l'état de santé du candidat, le médecin de prévention est consulté " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...a suivi et mené à son terme la formation de magistrat stagiaire du second grade qu'elle avait choisie, en optant pour le bénéfice du concours complémentaire auquel elle avait été admise au titre de l'année 2013 ; que, par suite, MmeC..., qui ne s'est, de fait, pas trouvée dans l'impossibilité de débuter sa scolarité à l'Ecole nationale de la magistrature, ne remplit pas la condition posée par l'article 40 précité pour prétendre à un report de scolarité ; qu'ainsi, elle ne saurait utilement invoquer l'existence d'un motif légitime tiré de sa renonciation au bénéfice du second concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature ;

6. Considérant que, par suite, aucun des moyens soulevés ne paraît, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition tenant à l'existence d'une situation d'urgence, que la demande de Mme C...tendant à la suspension de l'exécution de la décision du

17 juillet 2014 doit être rejetée ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu de se prononcer sur les conclusions à fin d'injonction ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande Mme C...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B...C..., à la garde des sceaux, ministre de la justice, et à l'Ecole nationale de la magistrature.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 384283
Date de la décision : 06/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 oct. 2014, n° 384283
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:384283.20141006
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