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30/07/2014 | FRANCE | N°371405

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 30 juillet 2014, 371405


Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés le 19 août et les 19 et 22 novembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le département du Haut-Rhin, représenté par le président du conseil général ; le département du Haut-Rhin demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0800559 du 10 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de Mme B...A..., en premier lieu, annulé la décision du 28 septembre 2007 par laquelle le président du conseil général a refusé de lui verser

le supplément familial de traitement au titre des trois enfants confiés à la...

Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés le 19 août et les 19 et 22 novembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le département du Haut-Rhin, représenté par le président du conseil général ; le département du Haut-Rhin demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0800559 du 10 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de Mme B...A..., en premier lieu, annulé la décision du 28 septembre 2007 par laquelle le président du conseil général a refusé de lui verser le supplément familial de traitement au titre des trois enfants confiés à la garde alternée de son conjoint et la décision du 12 décembre 2007 par laquelle le président du conseil général a rejeté son recours administratif contre la décision du 28 septembre 2007 et, en second lieu, lui a enjoint de verser à Mme A...le supplément familial de traitement sollicité au titre des trois enfants de son compagnon à compter du 1er juin 2007 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de Mme A...;

3°) de mettre à la charge de Mme A...la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Nuttens, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lévis, avocat du département du Haut-Rhin et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de Mme A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeA..., fonctionnaire du département du Haut-Rhin, a sollicité le versement, à compter du 1er juin 2007, du supplément familial de traitement au titre des trois enfants de son compagnon, dont un jugement du tribunal de grande instance de Mulhouse a décidé la résidence alternée au domicile de celui-ci et de leur mère; que le département du Haut-Rhin se pourvoit en cassation contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les décisions refusant de faire droit à cette demande et lui a enjoint de verser à Mme A...le supplément familial de traitement au titre des enfants de son compagnon ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 10 du décret du 24 octobre 1985 relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des personnels des établissements publics d'hospitalisation : " Le droit au supplément familial de traitement, au titre des enfants dont ils assument la charge effective et permanente à raison d'un seul droit par enfant, est ouvert aux magistrats, aux fonctionnaires civils, aux militaires à solde mensuelle ainsi qu'aux agents de la fonction publique de l'Etat, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière dont la rémunération est fixée par référence aux traitements des fonctionnaires ou évolue en fonction des variations de ces traitements, à l'exclusion des agents rétribués sur un taux horaire ou à la vacation. La notion d'enfant à charge à retenir pour déterminer l'ouverture du droit est celle fixée par le titre Ier du livre V du code de la sécurité sociale " ; qu'aux termes de l'article L. 513-1 du code de la sécurité sociale : " Les prestations familiales sont, sous réserve des règles particulières à chaque prestation, dues à la personne physique qui assume la charge effective et permanente de l'enfant " ; que l'article R. 513-1 du même code dispose que : " la personne physique à qui est reconnu le droit aux prestations familiales a la qualité d'allocataire. Ce droit n'est reconnu qu'à une seule personne au titre d'un même enfant. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Les allocations sont versées à la personne qui assume dans quelques conditions que ce soit, la charge effective et permanente de l'enfant. En cas de résidence alternée de l'enfant au domicile de chacun des parents telle que prévue à l'article 373-2-9 du code civil, mise en oeuvre de manière effective, les parents désignent l'allocataire. Cependant, la charge de l'enfant pour le calcul des allocations familiales est partagée par moitié entre les deux parents soit sur demande conjointe des parents, soit si les parents sont en désaccord sur la désignation de l'allocataire (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées, applicables pour l'attribution du supplément familial de traitement en vertu de l'article 10 du décret du 24 octobre 1985 précité, qu'en cas de séparation et de résidence alternée de l'enfant au domicile de chacun d'eux, les parents sont présumés assumer de manière exclusive la charge effective et permanente de l'enfant ; qu'il incombe à la personne qui entend combattre cette présomption d'établir qu'elle assume la charge effective et permanente de l'enfant en lieu et place des parents ;

4. Considérant que, pour annuler les décisions du président du conseil général du Haut-Rhin refusant à Mme A...le bénéfice du supplément familial de traitement au titre des enfants de son compagnon, le tribunal administratif de Strasbourg a jugé qu'eu égard à la contribution substantielle qu'apporte Mme A...à l'entretien des enfants de son compagnon, elle devait être regardée comme partageant la charge effective et permanente de ceux-ci avec leurs parents ; qu'en statuant ainsi, il a méconnu les dispositions précitées et commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son jugement doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant, en premier lieu, que si Mme A...soutient contribuer matériellement et financièrement à l'entretien des enfants de son compagnon et en assumer ainsi la charge effective et permanente, elle n'allègue pas assumer cette charge en lieu et place de leurs parents, lesquels, ainsi qu'il a été dit plus haut, sont présumés, lorsque la résidence des enfants a été fixée au domicile de chacun d'eux, en assumer de manière exclusive la charge effective et permanente pour l'attribution du supplément familial de traitement ; qu'ainsi, en refusant de faire droit à la demande de versement du supplément familial de traitement au titre des enfants de son compagnon, le président du conseil général du Haut-Rhin a fait une exacte application des dispositions régissant l'octroi du supplément familial de traitement ;

7. Considérant que MmeA..., qui n'assume pas la charge effective des enfants de son compagnon en lieu et place de leurs parents, n'est pas fondée à soutenir que les décisions lui refusant le versement du supplément familial de traitement au titre de ces enfants méconnaîtraient le principe d'égalité et seraient constitutives d'une discrimination à raison de la situation familiale et matrimoniale contraire aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les demandes présentées par Mme A...devant le tribunal administratif de Strasbourg doivent être rejetées ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du département du Haut-Rhin, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...le versement au département du Haut-Rhin d'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 10 juin 2013 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par Mme A...devant le tribunal administratif de Strasbourg sont rejetées.

Article 3 : Mme A...versera au département du Haut-Rhin une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au département du Haut-Rhin et à Mme B...A....


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 371405
Date de la décision : 30/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2014, n° 371405
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Nuttens
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP LEVIS ; SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:371405.20140730
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