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30/07/2014 | FRANCE | N°370313

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 30 juillet 2014, 370313


Vu 1°, sous le n° 370313, le pourvoi, enregistré le 18 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. M'handA..., demeurant ...; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA04201 du 8 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, d'une part, a annulé, sur la requête du préfet de police, le jugement n° 1208701/2-2 du 17 septembre 2012 du tribunal administratif de Paris ayant annulé, à sa demande, l'arrêté du 24 avril 2012 par lequel le préfet de police lui avait refusé la délivrance d'un titre de sé

jour et l'avait obligé à quitter le territoire français, d'autre part, a r...

Vu 1°, sous le n° 370313, le pourvoi, enregistré le 18 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. M'handA..., demeurant ...; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA04201 du 8 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, d'une part, a annulé, sur la requête du préfet de police, le jugement n° 1208701/2-2 du 17 septembre 2012 du tribunal administratif de Paris ayant annulé, à sa demande, l'arrêté du 24 avril 2012 par lequel le préfet de police lui avait refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'avait obligé à quitter le territoire français, d'autre part, a rejeté sa demande de première instance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°, sous le n° 370314, la requête, enregistrée le 18 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. M'handA..., demeurant ...; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêt n° 12PA04201 du 8 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, d'une part, a annulé le jugement n° 1208701/2-2 du 17 septembre 2012 du tribunal administratif de Paris annulant l'arrêté du 24 avril 2012 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, d'autre part, rejeté sa demande de première instance, jusqu'à ce qu'il soit statué sur son pourvoi ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Foussard, avocat de M. A...;

1. Considérant que le pourvoi en cassation et la requête à fin de sursis à exécution présentés par M. A...sont dirigés contre le même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur le pourvoi :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 24 avril 2012, le préfet de police a refusé à M.A..., ressortissant de nationalité algérienne, la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " commerçant " ; que, par un jugement du 17 septembre 2012, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de lui délivrer le titre de séjour sollicité ; que, par un arrêt du 8 avril 2013, contre lequel M. A...se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement et rejeté la demande de M. A...;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au Conseil d'Etat que le moyen tiré de ce que la minute de l'arrêt attaqué ne comporterait pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait ;

4. Considérant que, pour annuler le jugement du 17 septembre 2012 du tribunal administratif de Paris par lequel celui-ci a fait droit aux conclusions d'annulation du refus de renouvellement du titre de séjour opposé à M. A...et d'injonction présentées par ce dernier, la cour administrative d'appel de Paris a notamment estimé qu'en vertu de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'autorité administrative doit uniquement tenir compte de la réalité de l'activité professionnelle de l'intéressé et des ressources dont il peut justifier avant de délivrer un certificat de résidence portant la mention " commerçant " ; qu'en se prononçant ainsi sur le seul motif de l'absence d'activité commerciale sur lequel était fondée la décision attaquée, la cour qui, dans les circonstances de l'espèce, n'avait donc pas à rechercher si l'administration aurait pris la même décision en retenant un autre motif, n'a pas méconnu les stipulations de cet accord ni insuffisamment motivé son arrêt ;

5. Considérant que la cour a relevé que le refus de renouvellement du certificat de commerçant opposé à M. A...était fondé sur le motif que l'intéressé ne remplissait pas les conditions d'obtention de ce titre, faute pour son entreprise d'avoir enregistré aucune activité depuis son inscription au registre du commerce et des sociétés ; qu'en en déduisant qu'eu égard au motif de la décision en cause, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales était inopérant, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

6. Considérant que si, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'une décision de refus du titre de séjour portant la mention " commerçant ", il peut, en revanche, être utilement invoqué à l'encontre de la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...réside en France depuis 2005 ; que ses deux parents résident en France, de même que cinq de ses frères et soeurs, qui ont la nationalité française, tandis que seule une de ses soeurs demeure en Algérie ; qu'il s'occupe quotidiennement de ses parents âgés, chez lesquels il vit, et en particulier de son père invalide, dont l'état nécessite une aide extérieure ; que son frère et ses quatre soeurs ont attesté que leurs charges familiales et professionnelles, ainsi que l'éloignement de leur domicile, leur interdisaient de s'occuper régulièrement de leurs parents ; que, par ailleurs, M. A...fait preuve d'une bonne intégration sociale en France ; que, dans ces conditions, la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que l'arrêté litigieux n'avait pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A...une atteinte disproportionnée au but en vue duquel la décision attaquée a été prise et méconnu, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est seulement fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il annule le jugement du tribunal administratif de Paris et rejette ses conclusions relatives à l'arrêté du 24 avril 2012 du préfet de police en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ;

10. Considérant que pour le motif indiqué ci-dessus, l'obligation de quitter le territoire français dont M. A...a fait l'objet par l'arrêté attaqué méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé son arrêté du 24 avril 2012 en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français ;

Sur la requête à fin de sursis à exécution :

12. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 821-5 du code de justice administrative : " La formation de jugement peut, à la demande de l'auteur du pourvoi, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution d'une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort si cette décision risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens invoqués paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de la décision juridictionnelle, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond. " ;

13. Considérant que, par la présente décision, le Conseil d'Etat se prononce sur le pourvoi formé par M. A...contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 8 avril 2013 ; que, par suite, les conclusions à fin de sursis à exécution de cet arrêt sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Maître B...Foussard renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Maître B...Foussard ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 8 avril 2013 est annulé en tant qu'il a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris censurant l'arrêté du 24 avril 2012 du préfet de police en tant que cet arrêté fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français.

Article 2 : Les conclusions de la requête du préfet de police devant cette cour et tendant dans cette mesure à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 17 septembre 2012, et ainsi qu'au rejet de la demande d'annulation de son arrêté en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi n° 370313 de M. A...sont rejetées.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 370314 à fin de sursis à l'exécution de l'arrêt du 8 avril 2013 de la cour administrative d'appel de Paris.

Article 5 : L'Etat versera à Me B...Foussard, avocat de M.A..., une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 6: La présente décision sera notifiée à M. M'hand A...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 370313
Date de la décision : 30/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2014, n° 370313
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste de Froment
Rapporteur public ?: M. Xavier De Lesquen
Avocat(s) : FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:370313.20140730
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