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23/07/2014 | FRANCE | N°365927

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 23 juillet 2014, 365927


Vu la décision du 21 octobre 2013 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. B...dirigées contre l'arrêt n° 10PA03768 du 6 décembre 2012 de la cour administrative d'appel de Paris, en tant que cet arrêt statue sur l'indemnisation de ses pertes de revenus consécutives à sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C (VHC) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

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- le rapport de Mme Leïla Derouich, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Polg...

Vu la décision du 21 octobre 2013 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. B...dirigées contre l'arrêt n° 10PA03768 du 6 décembre 2012 de la cour administrative d'appel de Paris, en tant que cet arrêt statue sur l'indemnisation de ses pertes de revenus consécutives à sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C (VHC) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Leïla Derouich, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de M. B...et à la SCP Roger, Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., agissant en son nom propre et au nom de ses enfants mineurs, a demandé à être indemnisé des conséquences dommageables de sa contamination par le virus de l'hépatite C ; que, par un jugement du 20 mai 2010, le tribunal administratif de Paris a jugé que cette contamination était consécutive à des transfusions sanguines reçues par M. B...en 1974, 1978 et 1984 dans des établissements relevant de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et condamné l'Etablissement français du sang (EFS) à indemniser les consorts B...de leur préjudice ; que, par un arrêt du 6 décembre 2012 rectifié par un arrêt du 23 septembre 2013, la cour administrative d'appel de Paris, après avoir constaté la substitution de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) dans les droits et obligations de l'EFS, a mis à la charge de l'ONIAM la réparation des préjudices de M. B...et de ses enfants et a fait droit au recours subrogatoire exercé par la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne ; que, par une décision du 21 octobre 2013, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, a admis les conclusions du pourvoi de M. B...dirigées contre cet arrêt en tant qu'il statue sur l'indemnisation de ses pertes de revenus ; que l'ONIAM demande, par la voie du pourvoi incident, l'annulation du même arrêt en tant qu'il met à sa charge l'indemnisation des pertes de revenus subies par M. B...à partir de 2002 ;

Sur le pourvoi de M.B... :

En ce qui concerne la période comprise entre 2002 et 2009 :

2. Considérant qu'à l'appui de son pourvoi M. B...ne conteste que la prise en considération par la cour d'un salaire mensuel de référence de 4 257 euros ; que dès lors qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêt attaqué que la cour n'a pris en compte ce salaire de référence qu'au titre de la période postérieure à 2009, le pourvoi de M. B...n'articule aucun moyen contre cet arrêt en tant qu'il statue sur l'indemnisation de ses pertes de revenus au cours de la période comprise entre 2002 et 2009 ; que, par suite, les conclusions de son pourvoi ne peuvent sur ce point qu'être rejetées ;

En ce qui concerne la période comprise entre janvier 2010 et juin 2012 :

3. Considérant que, pour évaluer le préjudice subi par M. B...au titre de ses pertes de revenus pour la période comprise entre 2002 et 2009, la cour s'était à juste titre fondée sur la différence entre les rémunérations nettes perçues par l'intéressé durant cette période, augmentée des prestations versées par la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne, et les rémunérations qu'il aurait perçues s'il avait conservé sa rémunération annuelle nette de 2001, dernière année au cours de laquelle il a perçu un salaire à temps plein ; qu'il se déduit des montants retenus par son arrêt que, pour déterminer la rémunération annuelle nette de M. B...en 2001, elle a retenu la somme de 57 977 euros avancée par l'intéressé et non contestée ; que, pour fixer l'indemnité due à M. B...au titre de la période comprise entre janvier 2010 et juin 2012, durant laquelle il ne bénéficiait plus des prestations versées par la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne, elle s'est écartée du montant de 57 977 euros précédemment adopté et a procédé à un nouveau calcul de cette rémunération, par référence à un salaire mensuel à taux plein de 4 257 euros ; que toutefois ce dernier salaire ne résultait d'aucune des pièces du dossier soumis aux juges du fond et différait notamment de la rémunération mensuelle nette de 4 690, 21 euros figurant sur le bulletin de salaire de décembre 2001 produit par l'intéressé ; qu'en procédant ainsi, la cour n'a pas mis le juge de cassation à même d'exercer le contrôle qui lui incombe ; qu'il suit de là que son arrêt doit être annulé en tant qu'il statue sur l'indemnisation des pertes de revenus subies par M. B...au titre de la période comprise entre janvier 2010 et juin 2012 ;

Sur le pourvoi incident de l'ONIAM :

En ce qui concerne la période comprise entre 2002 et 2009 :

4. Considérant qu'à l'appui de son pourvoi incident l'ONIAM critique le principe même de l'indemnisation mise à sa charge par la cour, au motif que les pertes de revenus subies par M. B...ne présentaient pas un lien direct avec la contamination dont celui-ci a été victime ; qu'il résulte toutefois des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment de l'expertise réalisée à la demande du tribunal administratif de Paris par le DrA..., que la découverte et le traitement de l'hépatite de M. B...ont provoqué chez celui-ci le développement d'un syndrome dépressif ; que, si celui-ci a suscité des difficultés dans la vie personnelle et familiale de M.B..., il a eu également un important retentissement dans sa vie professionnelle en le plaçant dès 2002 dans l'impossibilité d'exercer à temps plein la profession d'avocat, ainsi qu'il le faisait jusque là ; qu'ainsi la cour a pu en déduire, sans erreur de droit ni erreur de qualification juridique, qu'il existait un lien direct entre les pertes de revenus subies par M. B...de 2002 à 2009 et la contamination de celui-ci ; qu'eu égard aux motifs énoncés par la cour et à ceux qui avaient été retenus par le tribunal administratif et qu'elle a adoptés, son arrêt est sur ce point suffisamment motivé ; qu'il suit de là que les conclusions du pourvoi incident de l'ONIAM dirigées contre l'arrêt de la cour, en tant que celle-ci a reconnu à M. B...le droit d'être indemnisé par cet établissement public des pertes de revenus qu'il a subies entre 2002 et 2009 du fait de sa contamination, doivent être rejetées ;

En ce qui concerne la période comprise entre janvier 2010 et juin 2012 :

5. Considérant que, dès lors que la présente décision annule l'arrêt critiqué en tant que la cour a statué sur l'indemnisation des pertes de revenus subies par M. B...de 2010 à 2012, les conclusions du pourvoi incident de l'ONIAM tendant à l'annulation de cet arrêt dans la même mesure sont devenues sans objet ; qu'il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B...qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à ce titre à la charge de l'ONIAM la somme de 2 500 euros à verser à M.B... ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 6 décembre 2012 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. B...tendant à l'indemnisation des pertes de revenus subies par celui-ci pour la période comprise entre janvier 2010 et juin 2012.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris, dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi incident de l'ONIAM tendant à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 6 décembre 2012 en tant qu'il statue sur l'indemnisation des pertes de revenus subies par M. B...pour la période comprise entre janvier 2010 et juin 2012.

Article 4 : L'ONIAM versera la somme de 2 500 euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. B...est rejeté.

Article 6 : Le surplus des conclusions du pourvoi incident de l'ONIAM et les conclusions présentées par celui-ci au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. C...B...et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Copie pour information en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 365927
Date de la décision : 23/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2014, n° 365927
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Leïla Derouich
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER ; SCP ROGER, SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:365927.20140723
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