Vu la décision du 21 juin 2013 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. A...B...dirigées contre le jugement n° 0903941 du 5 octobre 2010 du tribunal administratif de Montpellier en tant que ce jugement ne s'est pas prononcé sur les conclusions tendant à ce que La Poste soit condamnée à lui verser les intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement du 6 juin 2007 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Lenica, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M.B..., et à Me Haas, avocat de La Poste ;
1. Considérant que, par un jugement du 6 juin 2007, devenu définitif, le tribunal administratif de Montpellier a condamné La Poste à verser à M.B..., électronicien chargé de la maintenance des équipements électroniques au centre de tri de La Poste à Nîmes mis à la retraite en 2003, une indemnité correspondant à 28 jours, 5 heures et 30 minutes de repos compensateurs non pris au titre de l'année 1998, renvoyé l'intéressé devant La Poste pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité et mis à la charge de La Poste le versement d'une somme de 600 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, par le jugement attaqué du 5 octobre 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B...tendant à l'exécution du jugement du 6 juin 2007 ; que, par une décision du 21 mai 2013, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a admis les conclusions du pourvoi en cassation formé par M. B...contre le dernier jugement, en tant seulement que ce jugement ne s'est pas prononcé sur les conclusions tendant à ce que La Poste soit condamnée à lui verser les intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement du 6 juin 2007 ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par La Poste :
2. Considérant, d'une part, que le délai de recours en cassation est de deux mois en vertu des dispositions de l'article R. 821-1 du code de justice administrative, ce délai courant à compter de la notification de la décision juridictionnelle attaquée ; que le requérant qui, dans ce délai, a contesté tant la régularité de cette décision que son bien-fondé et a ainsi invoqué les deux causes juridiques susceptibles de fonder un pourvoi en cassation, est recevable à développer, après l'expiration de ce délai, tout moyen de cassation se rattachant à l'une ou l'autre de ces causes ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'article R. 612-1 du code de justice administrative que, dans le cas où la notification de la décision attaquée ne mentionne pas l'obligation de recourir, conformément aux dispositions de l'article R. 821-3 du même code, au ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, le Conseil d'Etat doit inviter l'auteur du pourvoi à le régulariser ; que tel est en particulier le cas lorsque, par suite des indications erronées portées sur la notification d'un jugement rendu en premier et dernier ressort, un requérant a formé, dans les deux mois de cette notification, un appel motivé devant la cour administrative d'appel et que le président de celle-ci a transmis son recours au Conseil d'Etat en application de l'article R. 351-2 de ce code ; qu'en pareille hypothèse, le requérant doit être regardé comme ayant régulièrement formé un pourvoi en cassation contre ce jugement, sous réserve qu'il ait donné suite à l'invitation à faire régulariser son pourvoi par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; que le délai de deux mois à l'issue duquel il n'est plus recevable à invoquer une cause juridique distincte court alors à compter de la réception de cette demande de régularisation ;
4. Considérant que la notification du jugement du 5 octobre 2010, rendu en premier et dernier ressort, a été reçue par M. B...le 18 octobre 2010, avec l'indication erronée d'une voie d'appel devant la cour administrative d'appel de Marseille et que l'intéressé a saisi la cour, le 17 décembre 2010, d'un recours motivé contre ce jugement ; qu'à la suite de sa transmission au Conseil d'Etat, par un arrêt de cette cour en date du 15 janvier 2013, le pourvoi de M. B...a été régularisé par la présentation, le 19 mars 2013, d'un mémoire signé par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et mettant en cause tant la régularité du jugement attaqué que son bien fondé ; que, dès lors que ce mémoire a été enregistré dans les deux mois suivant la réception, le 25 février 2013, de la demande de régularisation adressée au requérant conformément aux dispositions de l'article R. 612-1 du code de justice administrative, M. B...était recevable à développer, dans un mémoire complémentaire enregistré le 18 avril 2013, un moyen de cassation tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué, lequel se rattache à une cause juridique qui avait été invoquée dès le 19 mars 2013 ; qu'il en résulte que La Poste n'est pas fondée à soutenir que M. B...ne serait pas recevable à contester l'insuffisance de motivation du jugement attaqué ;
Sur le jugement attaqué :
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier des juges du fond que M. B... avait, dans le mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Montpellier le 22 juillet 2009, demandé le versement des intérêts légaux afférents à l'indemnité de 1 844,80 euros qui lui a été allouée par le jugement du tribunal administratif de Montpellier et à la somme mise à la charge de La Poste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, calculés à compter du prononcé du jugement le 6 juin 2007 ; que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur cette demande ; que M. B...est, par suite, fondé à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement attaqué ;
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions tendant au versement des intérêts au taux légal :
7. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1153-1 du code civil : " En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement " ; qu'aux termes de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier : " En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux d'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire (...) " ;
8. Considérant qu'alors même que le jugement du 6 juin 2007 ne l'a pas prévu explicitement, les sommes allouées par ce jugement étaient productrices d'intérêts dans les conditions fixées par l'article 1153-1 du code civil ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces intérêts aient été réglés ;
9. Considérant, ainsi, qu'à la date de la présente décision La Poste n'a que partiellement exécuté le jugement du 6 juin 2007 du tribunal administratif de Montpellier ; qu'il y a lieu de prononcer contre La Poste, à défaut de justifier de l'exécution complète de ce jugement dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, une astreinte de cent cinquante euros par jour de retard jusqu'à la date à laquelle le jugement aura reçu exécution complète ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. B...qui n'est pas, dans la présence instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de La Poste le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 5 octobre 2010 du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il ne s'est pas prononcé sur les conclusions tendant à ce que La Poste soit condamnée à verser à M. B...les intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement du 6 juin 2007.
Article 2 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de La Poste, si elle ne justifie pas avoir, dans les trois mois suivant la notification de la présente décision, exécuté entièrement le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 juin 2007 en versant à M. B...les intérêts au taux légal, à compter du 6 juin 2007, sur l'indemnité à laquelle La Poste a été condamnée par le jugement du 6 juin 2007 ainsi que sur la somme allouée par ce jugement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le montant de cette astreinte est fixé à cent cinquante euros par jour à compter de l'expiration du délai de trois mois suivant la notification de la présente décision jusqu'à la date de la complète exécution.
Article 3 : La Poste communiquera au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter le jugement du 6 juin 2007.
Article 4 : La Poste versera à M. B...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de La Poste présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la Poste. Copie de la présente décision sera adressée pour information au ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique.