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09/07/2014 | FRANCE | N°380377

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 09 juillet 2014, 380377


Vu l'ordonnance n° 1400251 du 30 avril 2014, enregistrée le 9 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Pau, avant qu'il soit statué sur la demande de MM. D... E..., A...-J...F..., A...C..., G...I...et B...H...tendant à l'annulation de la délibération du 30 janvier 2014 du conseil municipal de Lourdes accordant la protection fonctionnelle à son maire, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la

conformité aux droits et libertés garantis par la Constitu...

Vu l'ordonnance n° 1400251 du 30 avril 2014, enregistrée le 9 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Pau, avant qu'il soit statué sur la demande de MM. D... E..., A...-J...F..., A...C..., G...I...et B...H...tendant à l'annulation de la délibération du 30 janvier 2014 du conseil municipal de Lourdes accordant la protection fonctionnelle à son maire, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 février 2014 au greffe du tribunal administratif de Pau, présenté pour MM. D...E..., A...-J...F..., A...C..., G...I...et B...H...en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 juin 2014, présentée par M. E...et autres ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 1er et 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Angélique Delorme, auditeur,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales : " Le maire ou les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la commune conformément aux règles fixées par le code pénal, les lois spéciales et le présent code. / La commune est tenue de protéger le maire ou les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion ou du fait de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / La protection prévue aux deux alinéas précédents est étendue aux conjoints, enfants et ascendants directs des maires ou des élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation lorsque, du fait des fonctions de ces derniers, ils sont victimes de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages. / Elle peut être accordée, sur leur demande, aux conjoints, enfants et ascendants directs des maires ou des élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation, décédés dans l'exercice de leurs fonctions ou du fait de leurs fonctions, à raison des faits à l'origine du décès ou pour des faits commis postérieurement au décès mais du fait des fonctions qu'exerçait l'élu décédé. / La commune est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs de ces infractions la restitution des sommes versées à l'élu intéressé. Elle dispose en outre aux mêmes fins d'une action directe qu'elle peut exercer, au besoin par voie de constitution de partie civile, devant la juridiction pénale " ;

3. Considérant, en premier lieu, que si M. E...et autres soutiennent que l'article L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales méconnaît les exigences constitutionnelles inhérentes au bon usage des deniers publics garanties par les articles 14 et 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, les dispositions en cause ne peuvent toutefois être regardées comme ayant par elles-mêmes pour objet ou nécessairement pour effet de porter atteinte à ces exigences, dès lors qu'il appartient dans chaque cas à l'assemblée délibérante de la commune concernée, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, d'une part, de vérifier que les conditions légales énoncées à l'article L. 2123-35 sont remplies et qu'aucun motif d'intérêt général ne fait obstacle à ce que le bénéfice de la protection fonctionnelle soit accordé au maire ou à un élu municipal et, d'autre part, de déterminer les modalités permettant d'atteindre l'objectif de protection et de réparation qu'elles énoncent ; que, dans l'hypothèse où la commune décide d'assister le maire ou un élu municipal dans les procédures judiciaires que celui-ci aurait décidé d'entreprendre pour sa défense, à la suite de faits dont il aurait été victime à raison de ses fonctions, en prenant en charge les frais exposés à ce titre, les dispositions contestées n'ont en tout état de cause pas pour effet de contraindre la commune à prendre à sa charge, dans tous les cas, l'intégralité de ces frais ;

4. Considérant, en second lieu, que M. E...et autres ne peuvent en tout état de cause utilement soutenir que les dispositions en cause méconnaîtraient les exigences constitutionnelles inhérentes à l'égalité devant la commande publique garanties par les articles 6 et 15 de la Déclaration de 1789 et par l'article 1er de la Constitution, dès lors qu'elles n'impliquent pas, par elles-mêmes, la conclusion par la commune d'un marché public pour satisfaire à l'obligation de protection fonctionnelle et de réparation à laquelle elle est assujettie ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question de la conformité des dispositions contestées aux droits et libertés garantis par la Constitution, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal administratif de Pau.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. D...E..., A...-J...F..., A...C..., G...I...et B...H...et à la commune de Lourdes.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre, ministre de l'intérieur et au tribunal administratif de Pau.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 380377
Date de la décision : 09/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2014, n° 380377
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Angélique Delorme
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:380377.20140709
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