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28/05/2014 | FRANCE | N°301849

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 28 mai 2014, 301849


Vu, avec les pièces qui y sont visées, la décision du 11 juillet 2011 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur le pourvoi présenté pour la société Crédit Lyonnais et tendant à l'annulation de l'arrêt n° 04PA03905 du 8 décembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 5 octobre 2004 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant, d'une part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des rappels de taxe sur les salaires qui lui ont été réclamés pour l

a période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1989, d'autre part, à la...

Vu, avec les pièces qui y sont visées, la décision du 11 juillet 2011 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur le pourvoi présenté pour la société Crédit Lyonnais et tendant à l'annulation de l'arrêt n° 04PA03905 du 8 décembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 5 octobre 2004 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant, d'une part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des rappels de taxe sur les salaires qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1989, d'autre part, à la restitution de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les salaires versées à tort du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1990, a sursis à statuer sur ce pourvoi jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée sur les questions de savoir :

1°) si, eu égard aux règles relatives au champ territorial de la taxe sur la valeur ajoutée, les paragraphes 2 et 5 de l'article 17 et l'article 19 de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 peuvent être interprétés en ce sens que, pour le calcul du prorata qu'ils instaurent, le siège d'une société établie dans un Etat membre doit prendre en compte les recettes réalisées par chacune de ses succursales établies dans un autre Etat membre et, symétriquement, ces succursales doivent prendre en compte l'ensemble des recettes entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée réalisées par la société ;

2°) si la même solution doit être retenue pour les succursales établies en dehors de l'Union européenne, notamment au regard du droit à déduction prévu par le a du paragraphe 3 de l'article 17 ainsi que le c du même paragraphe, s'agissant des opérations bancaires et financières visées à l'article 13 sous B sous d) points 1 à 5, qui sont réalisées au bénéfice de preneurs établis en dehors de la Communauté ;

3°) si la réponse aux deux premières questions est susceptible de varier d'un Etat membre à l'autre, en fonction des options ouvertes par le dernier alinéa du paragraphe 5 de l'article 17, en particulier ce qui concerne la constitution de secteurs d'activité distincts ;

4°) en cas de réponse affirmative à l'une des deux premières questions, d'une part, s'il y a lieu de limiter l'application d'un tel prorata au calcul des droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses exposées par le siège au profit des succursales étrangères et si, d'autre part, la prise en compte des recettes réalisées à l'étranger doit se faire selon les règles applicables dans l'Etat de la succursale ou dans l'Etat du siège ;

Vu l'arrêt du 12 septembre 2013 par laquelle la Cour de justice de l'Union européenne s'est prononcée sur ces questions ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 mai 2014, présentée pour la société Crédit Lyonnais ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Maïlys Lange, auditeur,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de la société Crédit Lyonnais ;

1. Considérant que, dans l'arrêt du 12 septembre 2013 par lequel elle s'est prononcée sur les questions dont le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, l'avait saisie à titre préjudiciel, après avoir écarté les autres moyens du pourvoi de la société Crédit Lyonnais, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les articles 17, § 2 et 5, ainsi que 19, § 1, de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 doivent être interprétés en ce sens que, pour la détermination du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui est applicable, une société, dont le siège est situé dans un État membre, ne peut pas prendre en compte le chiffre d'affaires réalisé par ses succursales établies dans d'autres États membres ; qu'elle a également jugé que ses articles 17, § 3, sous a) et c), ainsi que 19, § 1 doivent être interprétés en ce sens que, pour la détermination du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui est applicable, une société, dont le siège est situé dans un État membre, ne peut pas prendre en compte le chiffre d'affaires réalisé par ses succursales établies dans des États tiers ; qu'enfin, il résulte de son arrêt que l'article 17, § 5, troisième alinéa, de la sixième directive doit être interprété en ce sens qu'il ne permet pas à un État membre de retenir une règle de calcul du prorata de déduction par secteur d'activité d'une société assujettie autorisant celle-ci à prendre en compte le chiffre d'affaires réalisé par une succursale établie dans un autre État membre ou dans un État tiers ;

2. Considérant qu'il résulte de l'interprétation ainsi donnée par la Cour de justice de l'Union européenne des dispositions de l'article 17, § 2, 3 et 5, et de l'article 19, § 1 de la sixième directive que le calcul du prorata de déduction défini à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date des rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés par la société Crédit Lyonnais, ne peut prendre en compte les recettes réalisées par ses succursales établies dans un autre Etat membre ou dans un Etat tiers à l'Union européenne ; que cette absence de prise en compte des recettes de succursales établies hors de France concerne tant le prorata de déduction unique qui s'appliquait à la société requérante au titre des années litigieuses que le prorata de déduction qui se serait appliqué à des secteurs d'activité distincts, si elle en avait constitué en application de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, alors en vigueur ;

3. Considérant que les droits à déduction partielle de taxe sur la valeur ajoutée des entreprises qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction étaient définis, au cours de la période litigieuse, par les dispositions des articles 212, 213 et 219 de l'annexe II au code général des impôts qui assuraient la transposition en droit interne des articles 17, § 5, et 19, § 1 de la sixième directive, lesquels avaient pour objet de mettre en oeuvre le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, la société Crédit Lyonnais n'est pas fondée à demander que ses droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée soient déterminés, comme elle le revendique dans le dernier état de ses écritures, selon une " méthode appropriée ", conçue pour assurer le respect du principe de neutralité, qui ne serait pas fondée sur les dispositions de droit interne transposant les articles 17, § 5, et 19, § 1 de la sixième directive ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Paris a pu, sans erreur de droit, écarter le moyen tiré par la société Crédit Lyonnais de ce que les recettes de ses succursales établies hors de France auraient dû être prises en compte pour la détermination de ses droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée ;

5. Considérant qu'en vertu du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, l'assiette de la taxe sur les salaires est constituée par une partie des rémunérations versées par les personnes ou organismes qui ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant entre le chiffre d'affaires qui n'est pas passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ; que la société Crédit Lyonnais qui, devant la cour administrative d'appel, ne contestait la taxe sur les salaires que par voie de conséquence de son argumentation relative à la taxe sur la valeur ajoutée, soutient que les dispositions de l'article 231 du code général des impôts n'interdisent pas nécessairement la prise en compte, dans le rapport d'assujettissement à cette taxe, du chiffre d'affaires de ses succursales établies hors de France ; que, toutefois, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit, eu égard à l'argumentation dont elle était saisie, en rejetant les conclusions relatives à la taxe sur les salaires par voie de conséquence de ce qu'elle a jugé au sujet du prorata de déduction de taxe sur la valeur ajoutée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Crédit Lyonnais n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société Crédit Lyonnais est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Crédit Lyonnais et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 301849
Date de la décision : 28/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 mai. 2014, n° 301849
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Maïlys Lange
Rapporteur public ?: Mme Claire Legras
Avocat(s) : SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:301849.20140528
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