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26/05/2014 | FRANCE | N°359393

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 mai 2014, 359393


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Clinique Mariotte a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir, notamment :

- l'arrêté du préfet de la région Languedoc-Roussillon du 13 juin 1996 autorisant le regroupement des cliniques Mariotte et La Roussillonnaise et consacrant le transfert de 7 places de chirurgie ambulatoire de la première vers la seconde ;

- les décisions de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation du Languedoc-Roussillon des 9 janvier et 30 m

ai 2001 renouvelant les autorisations de lits accordées à la clinique La Roussillonnai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Clinique Mariotte a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir, notamment :

- l'arrêté du préfet de la région Languedoc-Roussillon du 13 juin 1996 autorisant le regroupement des cliniques Mariotte et La Roussillonnaise et consacrant le transfert de 7 places de chirurgie ambulatoire de la première vers la seconde ;

- les décisions de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation du Languedoc-Roussillon des 9 janvier et 30 mai 2001 renouvelant les autorisations de lits accordées à la clinique La Roussillonnaise puis confirmant ces autorisations au profit des Cliniques mutualistes catalanes ;

- la décision implicite par laquelle le ministre de la santé a rejeté son recours hiérarchique formé contre l'arrêté du 13 juin 1996 ;

- la décision du 3 juillet 2002 par laquelle le ministre de la santé a rejeté son recours hiérarchique formé contre les décisions des 9 janvier et 30 mai 2001.

Par un jugement n° 0204329-0300155-032159 du 30 novembre 2006, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 07MA00493 du 8 janvier 2009, la cour administrative d'appel de Marseille, à la demande de la société Clinique Mariotte, a annulé les décisions des 13 juin 1996, 9 janvier 2001 et 30 mai 2001 ainsi que les décisions rejetant les recours administratifs formés à leur encontre et a réformé le jugement du tribunal administratif de Montpellier en ce qu'il avait de contraire.

Par un arrêt n° 09MA01261 du 12 mars 2012, la cour administrative d'appel de Marseille a :

- admis la tierce opposition formée par les Cliniques mutualistes catalanes en tant qu'elle portait sur les articles 1er et 2 de l'arrêt du 8 janvier 2009 ;

- déclaré cet arrêt nul et non avenu dans la mesure où il faisait droit aux conclusions de la clinique Mariotte dirigées contre l'arrêté du préfet de la région Languedoc-Roussillon du 13 juin 1996, les délibérations des 9 janvier et 30 mai 2001 de la commission exécutive de l'agence régionale d'hospitalisation du Languedoc-Roussillon, et dans la mesure où il annulait entièrement la décision du 3 juillet 2002 par laquelle le ministre avait rejeté le recours hiérarchique formé contre les décisions des 9 janvier et 30 mai 2001, au lieu de ne l'annuler qu'en tant qu'elle refusait de faire droit à la demande de retrait du renouvellement de l'autorisation d'exploiter 7 lits de chirurgie et anesthésie ambulatoire ;

- rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mai et 3 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Clinique Mariotte demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09MA01261 de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 mars 2012 ;

2°) de mettre à la charge des Cliniques mutualistes catalanes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la cour a commis une erreur de droit en jugeant recevable la tierce-opposition des Cliniques mutualistes catalanes ;

- elle a commis une erreur de droit en jugeant que la décision par laquelle le ministre de la santé a rejeté son recours hiérarchique pouvait faire l'objet d'une annulation seulement partielle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2012, les Cliniques mutualistes catalanes concluent, d'une part, au rejet du pourvoi, d'autre part, par la voie du pourvoi incident, à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 mars 2012 en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de leurs conclusions et, enfin, à ce que soit mise à la charge de la société Clinique Mariotte la somme de 5 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés ;

- la cour a dénaturé les pièces du dossier en jugeant que le transfert de lits entre la clinique Mariotte et la clinique La Roussillonnaise ne pouvait être regardé comme ayant été autorisé avec l'accord du gérant de la première ;

- la cour a dénaturé leurs écritures en jugeant qu'elles soutenaient que la convention conclue entre les deux cliniques avait eu pour effet de transférer à la seconde le droit de disposer de l'autorisation d'exploiter les places de chirurgie ambulatoire en litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2012, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet du pourvoi et, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il serait fait droit aux conclusions du pourvoi, à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 mars 2012 en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité des conclusions des Cliniques mutualistes catalanes.

Il soutient que :

- le pourvoi de la société Clinique Mariotte est irrecevable faute d'intérêt à agir;

- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés ;

- la société requérante n'était pas recevable à demander l'annulation du rejet du recours formé contre l'arrêté du 13 juin 1996 et la décision ministérielle du 3 juillet 2002.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Grosset, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la société Clinique Mariotte, et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat des Cliniques mutualistes catalanes.

CONSIDERANT CE QUI SUIT :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Clinique Mariotte a obtenu, par arrêté du préfet de la région Languedoc-Roussillon du 4 avril 1995, un agrément pour la transformation de 15 lits de chirurgie en 7 places de chirurgie et anesthésie ambulatoires. Par un arrêté du 13 juin 1996, le préfet a autorisé le regroupement de cette activité avec celles de la clinique chirurgicale mutualiste " La Roussillonnaise ", portant à 84 lits de chirurgie et 11 places de chirurgie et anesthésie ambulatoires la capacité de cette dernière. Par des décisions des 9 janvier et 30 mai 2001, la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation du Languedoc-Roussillon a, respectivement, renouvelé les autorisations de lits et de places accordées à la clinique " La Roussillonnaise " et confirmé ces autorisations au bénéfice des Cliniques mutualistes catalanes, venues aux droits de cette dernière. Par un arrêt du 8 janvier 2009, la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel de la société Clinique Mariotte, a annulé les décisions des 13 juin 1996, 9 janvier 2001 et 30 mai 2001 et les décisions du ministre de la santé rejetant les recours hiérarchiques formés à leur encontre. Par un nouvel arrêt, du 12 mars 2012, la cour, admettant la tierce opposition formée par les Cliniques mutualistes catalanes, a déclaré nul et non avenu son précédent arrêt dans la mesure où il avait annulé les décisions des 13 juin 1996, 9 janvier 2001 et 30 mai 2001 et annulé entièrement la décision du 3 juillet 2002 rejetant le recours hiérarchique formé contre les décisions des 9 janvier et 30 mai 2001, au lieu de ne l'annuler qu'en tant qu'elle portait sur l'autorisation d'exploiter 7 lits de chirurgie et anesthésie ambulatoire.

Sur le pourvoi principal de la société Clinique Mariotte :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative : " Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision ".

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la clinique chirurgicale mutualiste " La Roussillonnaise " et les Cliniques mutualistes catalanes, venant au droit de cette dernière, étaient les bénéficiaires des autorisations administratives annulées par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 8 janvier 2009. Les Cliniques mutualistes catalanes ne peuvent être regardées comme ayant été représentées, dans l'instance ayant abouti à cet arrêt, par l'Etat, au nom duquel ces autorisations avaient été délivrées. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la cour aurait commis une erreur de droit en jugeant qu'elles n'avaient pas été représentées à l'instance et, après avoir relevé que l'arrêt préjudiciait à leurs droits et qu'elles n'avaient pas été appelées dans l'instance, en en déduisant que leur tierce opposition était recevable.

4. En second lieu, d'une part, si les décisions des 9 janvier et 30 mai 2001 renouvelant les autorisations de lits et de places accordées à la clinique " La Roussillonnaise " puis confirmant ces autorisations au bénéfice des Cliniques mutualistes catalanes ont pris en considération les 7 places de chirurgie ambulatoire dont le transfert avait été autorisé au profit de la clinique " La Roussillonnaise " par l'arrêté du 13 juin 1996, il n'en résultait pas nécessairement que les décisions des 9 janvier et 30 mai 2001 fussent entachées d'illégalité dans leur entier par suite de l'illégalité de cet arrêté, même obtenu au vu d'attestations frauduleuses. D'autre part, il ne résulte pas des dispositions du code de la santé publique alors applicables que les renouvellements et transferts d'autorisations d'établissements de santé aient nécessairement eu un caractère indivisible. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit que la cour a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des faits, que les décisions successives autorisant la clinique " La Roussillonnaise " puis les Cliniques mutualistes catalanes à exploiter 84 lits de chirurgie et 11 places de chirurgie et anesthésie ambulatoires pouvaient être annulées en tant seulement qu'elles portaient sur les 7 places pour lesquelles la société Clinique Mariotte avait obtenu un agrément.

5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi principal doit être rejeté, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité.

Sur le pourvoi incident des Cliniques mutualistes catalanes :

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le protocole d'accord conclu le 26 juin 1995 entre la clinique Mariotte et la clinique " La Roussillonnaise " portait sur " le transfert de l'exploitation de l'autorisation de transformation " obtenue par la clinique Mariotte, moyennant le paiement d'une redevance, et prévoyait un droit de préférence au profit de la clinique " La Roussillonnaise " en cas de cession. Par suite, la cour, qui a également relevé que les signatures apposées sur le procès-verbal du 23 juin 1995 et sur l'attestation du 26 juin 1995 au vu desquelles le préfet de la région Languedoc-Roussillon avait autorisé le transfert litigieux n'étaient ni de la main du gérant et directeur de la clinique Mariotte ni de celle de son épouse, n'a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que ce transfert ne pouvait être regardé comme ayant été autorisé avec l'accord du gérant de la clinique Mariotte.

7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les Cliniques mutualistes catalanes invoquaient le protocole d'accord du 26 juin 1995 pour établir la volonté du gérant de la clinique Mariotte " de céder l'exploitation de l'autorisation préfectorale du 4 avril 1995 relatif aux 7 places de chirurgie et anesthésie ambulatoires à la clinique La Roussillonnaise ". La cour, à laquelle il était loisible de rappeler que le droit de disposer de l'autorisation administrative ne pouvait être transféré par voie de convention, ne s'est pas méprise sur la portée de leurs écritures en jugeant qu'elles ne " sauraient se prévaloir utilement de la circonstance que la clinique Mariotte leur avait confié, par voie de convention, la responsabilité de l'exploitation des 7 places de chirurgie ambulatoire qu'elle avait été autorisée à faire fonctionner ".

8. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi incident des Cliniques mutualistes catalanes doit être rejeté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société Clinique Mariotte présentées à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des Cliniques mutualistes catalanes présentées au même titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Clinique Mariotte et le pourvoi incident des Cliniques mutualistes catalanes sont rejetés.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Clinique Mariotte, aux Cliniques mutualistes catalanes et à la ministre des affaires sociales.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 359393
Date de la décision : 26/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 2014, n° 359393
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie Grosset
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:359393.20140526
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