La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2014 | FRANCE | N°375341

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 21 mai 2014, 375341


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 et 26 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la chambre de commerce et d'industrie régionale (CCIR) d'Aquitaine, dont le siège est 185 cours du Médoc CS 20143 à Bordeaux Cedex (33042) ; la CCIR demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304600 du 27 janvier 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution des dél

ibérations de son assemblée générale du 21 novembre 2013 portant adopti...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 et 26 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la chambre de commerce et d'industrie régionale (CCIR) d'Aquitaine, dont le siège est 185 cours du Médoc CS 20143 à Bordeaux Cedex (33042) ; la CCIR demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304600 du 27 janvier 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution des délibérations de son assemblée générale du 21 novembre 2013 portant adoption du budget primitif pour l'année 2014 et répartition de la ressource fiscale entre les chambres de commerce et d'industrie territoriales et lui a enjoint de soumettre à son assemblée générale un projet réexaminé de répartition de la ressource fiscale entre les chambres territoriales au titre de l'exercice 2014, dans le délai de deux mois ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de Pau-Béarn ;

3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laurence Marion, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la chambre de commerce et d'industrie régionale (CCIR) d'Aquitaine, et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la chambre de commerce et d'industrie territoriale de Pau-Béarn ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;

2. Considérant que la chambre de commerce et d'industrie régionale (CCIR) d'Aquitaine demande l'annulation de l'ordonnance du 27 janvier 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a suspendu, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de deux délibérations de son assemblée générale en date du 21 novembre 2013, la première portant adoption du budget primitif de la CCIR pour l'année 2014, et la seconde procédant, sur la base de ce budget primitif, à la répartition de la ressource fiscale entre les sept chambres de commerce et d'industries territoriales de la région Aquitaine pour la même année ; que pour l'exécution de sa décision le juge des référés a, par la même ordonnance, enjoint à la CCIR de procéder dans un délai de deux mois à une nouvelle répartition de la ressource fiscale entre les chambres territoriales ;

3. Considérant que si deux nouvelles délibérations relatives, d'une part, au budget primitif de la CCIR pour 2014 et, d'autre part, à la répartition de la ressource fiscale entre les chambres de commerce et d'industries territoriales, ont été adoptées le 27 mars 2014 par l'assemblée générale de la CCIR, ces décisions ne sont intervenues que pour l'exécution de l'ordonnance attaquée ; que de telles décisions, qui revêtent par leur nature même un caractère provisoire, n'ont donc pas pour effet de priver d'objet le pourvoi de la CCIR d'Aquitaine à l'encontre de cette ordonnance ; que les conclusions à fins de non lieu présentées par la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn doivent, par suite, être rejetées ;

4. Considérant que, pour juger que les décisions contestées portaient atteinte de manière grave et immédiate aux intérêts de la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn et que la condition d'urgence était en conséquence remplie, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux s'est exclusivement fondé sur le pourcentage, de plus de 20 %, de perte de ressources fiscales qu'elle subissait pour l'année 2014, par rapport à l'année 2013 ; qu'en statuant ainsi, sans prendre en considération la part que pouvait représenter cette perte dans la totalité des ressources de la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn pour 2014 ni tenir compte de sa situation financière et d'éventuelles ressources de substitution, le juge des référés a retenu des éléments qui ne pouvaient suffire à caractériser une situation d'urgence et ainsi commis une erreur de droit ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la CCIR d'Aquitaine est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que les ressources fiscales déterminées et réparties par les délibérations litigieuses ne représentent pas plus d'un cinquième des ressources globales de la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn pour 2014 ; que la part de sous-évaluation de ces recettes fiscales qui pourrait spécifiquement découler de l'application de la clé de répartition qu'elle conteste apparaît incertaine et qu'il n'est, en tout état de cause, pas allégué que cette baisse excède 4 % de ses ressources globales ; que, par suite, en l'absence d'autres éléments permettant de déterminer l'impact effectif des délibérations contestées sur l'activité de la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn, ces dernières ne sauraient être regardées comme portant atteinte aux intérêts de la requérante de manière suffisamment grave et immédiate pour constituer une situation d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ;

7. Considérant, d'autre part, que si la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn soutient également que l'exécution des délibérations contestées peut lui créer un préjudice grave et immédiat en ce qu'elle rendrait hypothétique la récupération, auprès des autres chambres de commerce et d'industrie de la région, des sommes qui auraient été ventilées à tort à leur profit, elle n'apporte à l'appui de cette affirmation aucun élément permettant d'établir l'existence effective d'une situation d'urgence ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn doit être rejetée ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CCIR d'Aquitaine qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge le versement à la CCIR d'Aquitaine d'une somme de 4 500 euros au titre des frais exposés devant le tribunal administratif et le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 27 janvier 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux est annulée.

Article 2 : La demande présentée devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux par la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn versera à la chambre de commerce et d'industrie régionale d'Aquitaine une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la chambre de commerce et d'industrie régionale d'Aquitaine et à la chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 375341
Date de la décision : 21/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 mai. 2014, n° 375341
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laurence Marion
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:375341.20140521
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award