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21/05/2014 | FRANCE | N°358357

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 21 mai 2014, 358357


Vu 1°, sous le n° 358357, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 avril et 5 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés par M. E...B..., demeurant..., et M. F...C..., demeurant ... ; M. B...et M. C...demandent au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 du décret n° 2012-441 du 3 avril 2012 relatif aux conditions particulières d'accès à la profession d'avocat ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 35 euros au titre des dépens ;

Vu 2°, sous le n° 358515, la re

quête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 13 avril, 13 juin et 20 juin 2012 ...

Vu 1°, sous le n° 358357, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 avril et 5 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés par M. E...B..., demeurant..., et M. F...C..., demeurant ... ; M. B...et M. C...demandent au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 du décret n° 2012-441 du 3 avril 2012 relatif aux conditions particulières d'accès à la profession d'avocat ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 35 euros au titre des dépens ;

Vu 2°, sous le n° 358515, la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 13 avril, 13 juin et 20 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour le Conseil national des barreaux, dont le siège est 22, rue de Londres à Paris (75009), représenté par son président en exercice ; le Conseil national des barreaux demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir les articles 2, 3 et 5 du même décret en tant qu'il prévoit que sont inscrits au barreau les personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi et ayant suivi une formation en déontologie et réglementation professionnelle d'une durée de vingt heures dispensée par un centre régional de formation professionnelle d'avocat ;

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Vu 3°, sous le n° 358590, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 et 24 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour la Fédération nationale des unions de jeunes avocats, dont le siège est au palais de justice de Paris, 4, boulevard du palais à Paris (75001), représentée par son président en exercice ; la Fédération nationale des unions de jeunes avocats demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu 4°, sous le n° 358917, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 avril et 17 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour l'Ordre des avocats de Paris, dont le siège est 11, place Dauphine à Paris (75003), représenté par son bâtonnier en exercice ; l'Ordre des avocats de Paris demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

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Vu 5°, sous le n° 358945, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 avril et 30 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour le Syndicat des avocats de France, dont le siège est 34, rue Saint Lazare à Paris (75009), représenté par sa présidente en exercice ; le Syndicat des avocats de France demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

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Vu 6°, sous le n° 359132, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 mai et 2 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés par le syndicat Le manifeste des avocats collaborateurs, dont le siège est chez Me A...D..., 72, boulevard de Picpus à Paris (75012), représenté par son président en exercice ; le syndicat Le manifeste des avocats collaborateurs demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

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Vu 7°, sous le n° 359837, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 mai et 29 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés par l'Association des juristes de contentieux de droit public, dont le siège est 12, place du Panthéon à Paris (75005), représentée par son président en exercice ; l'Association des juristes de contentieux de droit public demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

2°) de mettre à la charge de l'État les dépens, notamment la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 mai 2014, présentée par l'Association des juristes de contentieux de droit public ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Vu le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;

Vu le décret n° 2013-319 du 15 avril 2013 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat du Conseil national des barreaux, à Me Spinosi, avocat de la Fédération nationale des unions de jeunes avocats, et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de l'Ordre des avocats de Paris et du Syndicat des avocats de France ;

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant que le désistement d'instance du Conseil national des barreaux est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;

Sur la recevabilité de la requête n° 359837 :

3. Considérant qu'il ressort des statuts de l'Association des juristes de contentieux de droit public que celle-ci a pour objet d'assurer la promotion du diplôme de master 2 contentieux de droit public de l'Université Paris I - Panthéon-Sorbonne et la défense des intérêts des étudiants et anciens étudiants de ce master ; qu'eu égard à l'objet ainsi défini de l'association requérante, celle-ci ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le décret attaqué ; que, par suite, sa requête n'est pas recevable ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du décret attaqué :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions juridiques et judiciaires : " Nul ne peut accéder à la profession d'avocat s'il ne remplit les conditions suivantes : / 1° Être français, ressortissant d'un État membre des Communautés européennes ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen (...) ; / 2° Être titulaire, sous réserve des dispositions réglementaires prises pour l'application de la directive 2005 / 36 / CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005, et de celles concernant les personnes ayant exercé certaines fonctions ou activités en France, d'au moins une maîtrise en droit ou de titres ou diplômes reconnus comme équivalents pour l'exercice de la profession par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé des universités ; / 3° Être titulaire du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, sous réserve des dispositions réglementaires mentionnées au 2°, ou, dans le cadre de la réciprocité, de l'examen prévu au dernier alinéa du présent article ; (...) " ; que l'article 12 de la même loi précise que, sous réserve des dispositions réglementaires " concernant les personnes justifiant de certains titres ou ayant exercé certaines activités, la formation professionnelle exigée pour l'exercice de la profession d'avocat est subordonnée à la réussite à un examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle et comprend une formation théorique et pratique d'une durée d'au moins dix-huit mois, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat (...) " ;

5. Considérant que l'article 5 du décret attaqué a introduit dans le décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat un article 97-1 aux termes duquel : " Les personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi sont dispensées de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat " ; qu'en vertu du 3° de l'article 93 du décret du 27 novembre 1991, dans sa rédaction issue de l'article 3 du décret attaqué, peuvent être inscrits au tableau d'un barreau " les personnes bénéficiant de la dispense prévue à l'article 97-1 et ayant suivi une formation en déontologie et réglementation professionnelle d'une durée de vingt heures dispensée par un centre régional de formation professionnelle d'avocats " ;

En ce qui concerne la légalité externe du décret :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis du Conseil d'État en date du 27 mars 2012 dont le texte a été communiqué par le ministre de la justice, que le décret attaqué a été pris le Conseil d'État (section de l'intérieur) entendu et que son texte ne diffère pas de celui adopté par le Conseil d'État ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que le décret attaqué n'aurait pas été soumis au Conseil d'État et que son texte ne serait pas conforme à la version transmise par le Gouvernement au Conseil d'État ou à celle adoptée par ce dernier doivent être écartés ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que lorsque l'autorité compétente demande, sans y être légalement tenue, l'avis d'un organisme sur un projet de texte, elle doit procéder à cette consultation dans des conditions régulières ; que néanmoins, elle conserve, dans cette hypothèse, la faculté d'apporter au projet, après consultation, toutes les modifications qui lui paraissent utiles, quelle qu'en soit l'importance, sans être dans l'obligation de saisir à nouveau cet organisme ;

8. Considérant qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le ministre de la justice a consulté, en janvier 2012, le Conseil national des barreaux et l'Ordre des avocats de Paris sur un projet de décret relatif aux conditions d'accès à la profession d'avocat des collaborateurs de député et assistants de sénateur ; que les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de ce que le projet de décret a été modifié après la consultation du Conseil national des barreaux et de l'Ordre des avocats de Paris pour prévoir les conditions d'accès à la même profession des personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi pour soutenir que les dispositions litigieuses seraient intervenues à la suite d'une procédure irrégulière, dès lors que la consultation du Conseil national des barreaux et de l'Ordre des avocats de Paris n'avait pas un caractère obligatoire ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : " Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution " ; que, s'agissant d'un acte réglementaire, les ministres chargés de son exécution sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte nécessairement l'exécution de cet acte ; que, le décret attaqué n'appelant pas de mesure d'exécution de la part du ministre chargé de l'enseignement supérieur ou du ministre de l'économie et des finances, le moyen tiré du défaut de contreseing de ces ministres doit être écarté ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que, par l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 cité au point 4, le législateur a confié au pouvoir réglementaire le soin de fixer les conditions dans lesquelles les personnes qui justifient de certains titres ou activités peuvent être dispensées de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat ; qu'en prévoyant que les personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi sont dispensées de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, le décret attaqué n'a donc pas méconnu la portée de l'habilitation confiée par le législateur ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du décret attaqué doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne du décret :

11. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 de la Constitution : " L'initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement. (...) " ; que l'article 44 du même texte dispose : " Les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d'amendement (...) " ;

12. Considérant que les requérants soutiennent que l'article 5 du décret attaqué, en faisant référence aux personnes exerçant " des responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi " aurait renvoyé à une catégorie juridique indéterminée et ne permettrait pas d'identifier les fonctions concernées ; qu'il résulte, toutefois, des dispositions constitutionnelles citées ci-dessus que seuls les députés, les sénateurs et les membres du Gouvernement exercent des responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi ; que, par suite, le moyen tiré de ce que, en raison de l'imprécision de ses termes, l'article 5 du décret attaqué méconnaîtrait les articles 11 et 12 de la loi du 31 décembre 1971 et l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité du droit doit être écarté ; qu'il en est de même, en tout état de cause, du moyen tiré de ce que, pour les mêmes raisons, le décret aurait méconnu le principe de sécurité juridique ;

13. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques que les avocats peuvent notamment, dans l'exercice de leur profession, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit, sous réserve des dispositions régissant les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, réaliser à titre habituel et rémunéré des consultations juridiques et rédiger des actes sous seing privé, assister et représenter autrui devant les administrations publiques et assister une partie dans une procédure participative prévue par le code civil ;

14. Considérant que l'article 97 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, dans sa rédaction antérieure à celle du décret attaqué, disposait : " Sont dispensés de la condition de diplôme prévue à l'article 11 (2°) de la loi du 31 décembre 1971 précitée, de la formation théorique et pratique, du certificat d'aptitude à la profession d'avocat et du stage : / 1° Les membres et anciens membres du Conseil d'État et les membres et anciens membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; / 2° Les magistrats et anciens magistrats de la Cour des comptes, des chambres régionales des comptes et des chambres territoriales des comptes de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie ; / 3° Les magistrats et anciens magistrats de l'ordre judiciaire régis par l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ; / 4° Les professeurs d'université chargés d'un enseignement juridique ; / 5° Les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation ; / 6° Les anciens avoués près les cours d'appel ; / 7° Les anciens avocats inscrits à un barreau français et les anciens conseils juridiques " ; qu'en vertu de l'article 98 du même décret, dans sa rédaction antérieure à celle du décret attaqué : " Sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat : / 1° Les notaires, les huissiers de justice, les greffiers des tribunaux de commerce, les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises, les anciens syndics et administrateurs judiciaires, les conseils en propriété industrielle et les anciens conseils en brevet d'invention ayant exercé leurs fonctions pendant cinq ans au moins ; / 2° Les maîtres de conférences, les maîtres assistants et les chargés de cours, s'ils sont titulaires du diplôme de docteur en droit, en sciences économiques ou en gestion, justifiant de cinq ans d'enseignement juridique en cette qualité dans les unités de formation et de recherche ; / 3° Les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises ; / 4° Les fonctionnaires et anciens fonctionnaires de catégorie A, ou les personnes assimilées aux fonctionnaires de cette catégorie, ayant exercé en cette qualité des activités juridiques pendant huit ans au moins, dans une administration ou un service public ou une organisation internationale ; / 5° Les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; / 6° Les juristes salariés d'un avocat, d'une association ou d'une société d'avocats, d'un office d'avoué ou d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle en cette qualité postérieurement à l'obtention du titre ou diplôme mentionné au 2° de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 susvisée ; / 7° Les personnes agréées par le président de la chambre d'appel de Mamoudzou dans la collectivité départementale de Mayotte justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle ; / Les personnes mentionnées aux 3°, 4°, 5° et 6° peuvent avoir exercé leurs activités dans plusieurs des fonctions visées dans ces dispositions dès lors que la durée totale de ces activités est au moins égale à huit ans. / 8° Les personnes mentionnées à l'article 22 de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel " ; que l'article 6 du décret attaqué a supprimé les huitième (7°) et neuvième alinéas de l'article 98, transformé le 8° en 7° et ajouté un 8° ainsi rédigé : " 8° Les collaborateurs de député ou assistants de sénateur justifiant avoir exercé une activité juridique à titre principal avec le statut de cadre pendant au moins huit ans dans ces fonctions " ;

15. Considérant, d'une part, que dans l'exercice du large pouvoir d'appréciation que lui a confié le législateur pour fixer les conditions dans lesquelles les personnes qui justifient de certains titres ou activités peuvent être dispensées de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, le pouvoir réglementaire a dressé, avec le double objectif de diversifier les modes d'accès à la profession d'avocat sans pour autant bouleverser les conditions générales de cet accès telles qu'elles sont précisées par l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971, une liste de différentes catégories de personnes pouvant bénéficier d'une telle dispense, en définissant pour chacune d'elles des conditions spécifiques ; qu'en dispensant de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les personnes qui, conformément à l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971, sont titulaires d'au moins une maîtrise en droit ou de titres ou diplômes reconnus comme équivalents pour l'exercice de la profession d'avocat et qui justifient de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi, le pouvoir réglementaire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'il n'a pas non plus, ce faisant, méconnu le principe d'égalité au regard des conditions particulières fixées pour les autres catégories de personnes visées aux articles 97 et 98 du décret du 27 novembre 1991 cités au point 14 ;

16. Considérant, d'autre part, qu'en faisant bénéficier de la dispense prévue à l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 les personnes titulaires d'au moins une maîtrise en droit ou de titres ou diplômes reconnus comme équivalents pour l'exercice de la profession d'avocat et justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi, lesquelles se trouvent dans une situation différente de celles qui ne bénéficient d'aucune dispense et sont candidates à l'examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle, le pouvoir réglementaire n'a pas établi une différence de traitement manifestement disproportionnée ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité doit être écarté ;

17. Considérant, en troisième lieu, que l'article 3 du décret attaqué prévoit que les personnes visées à l'article 5 du même décret peuvent être inscrites au tableau d'un barreau à condition d'avoir suivi une formation en déontologie et réglementation professionnelle d'une durée de vingt heures dispensée par un centre régional de formation professionnelle d'avocats ; que la même disposition soumet l'inscription au tableau d'un barreau des différentes catégories de personnes bénéficiant de la dispense prévue à l'article 98 du décret du 27 novembre 1991 à la réussite d'un examen de contrôle des connaissances en déontologie et réglementation professionnelle devant le jury d'examen du certificat d'aptitude à la profession d'avocat ; qu'en vertu de l'article 2 du décret attaqué, les personnes visées à l'article 5 de ce décret doivent, comme celles visées à l'article 98 du décret du 27 novembre 1991, consacrer, au cours des deux premières années d'exercice professionnel, la totalité de leur obligation de formation continue, fixée à quarante heures, à des enseignements portant sur la déontologie et le statut professionnel ; que l'article 85 du décret du 27 novembre 1991 prévoit pour les autres avocats qu'au cours de la même période, la formation continue inclut dix heures au moins portant sur la déontologie ;

18. Considérant, d'une part, qu'en imposant aux personnes visées à l'article 5 du décret attaqué la réalisation effective des formations en déontologie et réglementation professionnelle rappelées ci-dessus pour l'inscription au tableau d'un barreau et le respect de l'obligation de formation continue à laquelle sont soumis les avocats, le pouvoir réglementaire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

19. Considérant, d'autre part, qu'en exigeant des personnes visées à l'article 5 du décret attaqué qu'elles aient effectivement suivi une formation en déontologie et réglementation professionnelle d'une durée de vingt heures dispensée par un centre régional de formation professionnelle d'avocats, sans les soumettre à un examen de contrôle des connaissances dans cette matière, alors que les différentes personnes visées à l'article 98 du décret du 27 novembre 1991 doivent subir avec succès un tel examen de contrôle des connaissances sans avoir préalablement à suivre une formation obligatoire en déontologie et réglementation professionnelle, le pouvoir réglementaire a pu, sans méconnaître le principe d'égalité, prévoir les modalités particulières à chacune de ces catégories de personnes permettant de garantir une connaissance des règles déontologiques et professionnelles nécessaires à l'accès à la profession d'avocat ;

20. Considérant, en quatrième lieu, que le pouvoir réglementaire n'a pas porté une atteinte illégale au principe d'égalité en décidant, dans le choix des catégories de personnes pouvant bénéficier de la dispense prévue par l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971, de rapprocher la situation des collaborateurs de député ou assistants de sénateur titulaires d'au moins une maîtrise en droit ou de titres ou diplômes reconnus comme équivalents pour l'exercice de la profession d'avocat et justifiant avoir exercé une activité juridique à titre principal avec le statut de cadre pendant au moins huit ans dans ces fonctions de celle des différentes catégories de personnes visées aux articles 97 et 98 du décret du 27 novembre 1991 cités au point 14 ;

21. Considérant, en dernier lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret attaqué ;

Sur les dépens :

23. Considérant qu'il y a lieu de laisser la contribution pour l'aide juridique à la charge de M. B...et M. C...et de l'Association des juristes de contentieux de droit public ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la Fédération nationale des unions de jeunes avocats et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il est donné acte du désistement de la requête du Conseil national des barreaux.

Article 2 : Les requêtes de M. B...et de M.C..., de l'Ordre des avocats de Paris, de la Fédération nationale des unions de jeunes avocats, du Syndicat des avocats de France, du syndicat Le manifeste des avocats collaborateurs et de l'Association des juristes de contentieux de droit public sont rejetées.

Article 3 : La contribution pour l'aide juridique est laissée à la charge de M. B...et M. C...et de l'Association des juristes de contentieux de droit public.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. E...B..., à M. F...C..., au Conseil national des barreaux, à la Fédération nationale des unions de jeunes avocats, à l'Ordre des avocats de Paris, au Syndicat des avocats de France, au syndicat Le manifeste des avocats collaborateurs, à l'Association des juristes de contentieux de droit public, au Premier ministre et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 358357
Date de la décision : 21/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 mai. 2014, n° 358357
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:358357.20140521
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