La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/05/2014 | FRANCE | N°377193

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 09 mai 2014, 377193


Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SASP Paris Saint-Germain Football, dont le siège social est situé 24, rue du commandant Guilbaud à Paris (75016), représentée par son dirigeant en exercice ; la société requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la délibération n° 2014-043 du 30 janvier 2014 de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CN

IL) en tant, d'une part, qu'elle limite, l'autorisation de mise en oeuvre d...

Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SASP Paris Saint-Germain Football, dont le siège social est situé 24, rue du commandant Guilbaud à Paris (75016), représentée par son dirigeant en exercice ; la société requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la délibération n° 2014-043 du 30 janvier 2014 de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) en tant, d'une part, qu'elle limite, l'autorisation de mise en oeuvre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel tendant à la constitution d'une liste d'exclusion des clients ayant contrevenu aux conditions générales de vente et au règlement intérieur du Parc des Princes aux seules données relatives à l'existence d'un impayé, au défaut de respect des règles de billetterie, à l'exercice d'une activité commerciale interdite dans l'enceinte sportive et à celle de l'exercice interdit de paris dans l'enceinte sportive sur le match en cours et en tant , d'autre part, qu'elle fait cesser l'exclusion justifiée par l'existence d'un impayé, à compter du complet paiement de la somme due par le débiteur ;

2°) d'enjoindre à la CNIL, à titre principal, de lui délivrer provisoirement l'autorisation sollicitée et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de la CNIL le versement de la somme de

3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que l'exécution de la délibération contestée porte atteinte à la sécurité publique et à ses intérêts financiers ;

- il existe plusieurs doutes sérieux quant à la légalité de la délibération contestée ;

- la délibération a été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions des articles 3 et 4 du décret du 20 octobre 2005 ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation dès lors qu'il est apporté une limite, sans justification, à l'autorisation de recenser les violations aux conditions générales de vente et au règlement intérieur ;

- elle est entachée d'erreurs de droit dès lors, d'une part, que la Commission nationale de l'informatique et des libertés a méconnu le pouvoir de police des terrains accordé aux organisateurs de rencontres sportives et, d'autre part, qu'elle a écarté le caractère légitime, au sens de l'article 6 de la loi du 6 janvier 1978, de l'exclusion des clients n'ayant pas respecté les conditions générales de vente ou les dispositions du règlement intérieur ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle porte atteinte à la liberté de commerce et d'industrie ;

Vu la délibération dont la suspension de l'exécution est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation de cette délibération ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2014, présenté par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) qui conclut au rejet de la requête ;

elle soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie, dès lors que la délibération contestée ne porte atteinte ni à la sécurité publique, ni à la situation financière de la requérante et que l'urgence invoquée découle de la situation d'illégalité dans laquelle la requérante s'est elle-même placée ;

- aucun des moyens soulevés n'est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la délibération contestée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité intérieure ;

Vu le code du sport ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

Vu le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 ;

Vu les règlements généraux de la Fédération française de football et de la Ligue de football professionnel ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la SASP Paris Saint-Germain football et, d'autre part, la Commission nationale de l'informatique et des libertés ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 28 avril 2014 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Rousseau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la SASP Paris Saint-Germain Football ;

- les représentants de la SASP Paris Saint-Germain Football ;

- les représentants de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clôturé l'instruction ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné, notamment, à une condition d'urgence ; que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif, lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 25 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés : " I. Sont mis en oeuvre après autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, à l'exclusion de ceux qui sont mentionnés aux articles 26 et 27 : (...) / 4° Les traitements automatisés susceptibles, du fait de leur nature, de leur portée ou de leurs finalités, d'exclure des personnes du bénéfice d'un droit, d'une prestation ou d'un contrat en l'absence de toute disposition législative ou réglementaire (...) " ;

3. Considérant que par une délibération du 30 janvier 2014 la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a, sur le fondement des dispositions précitées de la loi du 6 janvier 1978, autorisé la SASP Paris Saint-Germain football à mettre en oeuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel pour constituer une liste d'exclusion des clients ayant contrevenu aux conditions générales de vente et au règlement intérieur du Parc des Princes ; que la CNIL a, cependant, limité cette autorisation aux seules données relatives à l'existence d'un impayé, au défaut de respect des règles de billetterie, à l'exercice d'une activité commerciale interdite dans l'enceinte sportive et à celle de l'exercice de paris dans l'enceinte sportive sur le match en cours ; qu'elle a, par ailleurs, limité la durée d'exclusion des clients figurant sur la liste pour ne pas avoir payé leurs billets à la durée du défaut de paiement ;

4. Considérant que, pour établir l'existence d'une situation d'urgence, la SASP Paris Saint-Germain football soutient , d'une part, que l'exécution de la délibération contestée en lui interdisant d'intégrer dans le traitement automatisé l'ensemble des personnes ayant violé les conditions générales de vente des billets et le règlement intérieur du parc des princes, même si elles n'ont pas fait l'objet d'une mesure administrative ou judiciaire d'interdiction de stade, fait courir un risque grave, à l'ordre public et à la sécurité des personnes en raison des incidents que sont susceptibles de provoquer ces personnes et, d'autre part, portera atteinte à ses intérêts financiers, en raison de l'augmentation du coût des mesures de sécurité nécessaires, des possibles sanctions financières qui pèseront sur elle du fait des incidents qu'elles pourraient provoquer, ainsi que de la perte de certains partenaires commerciaux ;

5. Considérant cependant, en premier lieu, que la société requérante n'établit pas qu'elle serait incapable, faute d'obtenir la suspension de la délibération contestée, de garantir l'ordre public et la sécurité lors des manifestations sportives, alors qu'elle a, par ailleurs, obtenu l'autorisation de mettre en oeuvre un traitement ayant pour finalité la gestion des listes de personnes interdites de stade par décisions administratives ou judiciaires , qu'elle dispose, sur le fondement des dispositions du chapitre II du titre III du livre III du code du sport, du pouvoir de refuser l'accès du stade ou d'en expulser les personnes auteurs de comportements pénalement réprimés ; qu'il lui appartient, à cet effet, de se doter des moyens de sécurité nécessaires prévus par l'article L. 332-1 du même code ; que l'urgence ne saurait, en tout état de cause, naître de ce que la société requérante doit mettre fin à la situation précédente d'illégalité dans laquelle elle s'était placée, en mettant en oeuvre un traitement entrant dans le champ des dispositions de l'article 25 de la loi du 6 janvier 1978, sans solliciter la demande d'autorisation préalable prévue par ces dispositions ;

6. Considérant, en second lieu, que si la société expose que le coût des mesures de sécurité s'est élevé pour la saison 2012-2013 à un montant total de près de 6.8 million d'euros et sera supérieur pour la saison en cours , qu'elle a du acquitter des amendes pour un montant de 384 000 euros pour la saison 2008-2009 et 144 500 euros pour la saison 2009-2010 à raison du comportement de supporters, ces indications très générales et qui ne sont pas rapprochées du montant du chiffre d'affaires ou du bénéfice de la société requérante, ne sont pas de nature à établir le surcoût qu'induirait les effets de la délibération contestée et le risque financier immédiat éventuellement encouru ; que la perte alléguée de certains partenaires commerciaux du fait de la recrudescence éventuelle des violences n'est étayée d'aucun élément de preuve ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la délibération contestée, que la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter la requête de la SASP Paris Saint-Germain y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de la SASP Paris Saint-Germain football est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Paris Saint-Germain football et à la Commission nationale de l'informatique et des libertés.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 377193
Date de la décision : 09/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 mai. 2014, n° 377193
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:377193.20140509
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award