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19/03/2014 | FRANCE | N°375582

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 mars 2014, 375582


Vu la requête, enregistrée le 19 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la Cimade dont le siège est 64 rue Clisson à Paris (75013) ; l'association requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la note du ministre de l'intérieur du 5 décembre 2013 relative aux demandes d'asile présentées par des étrangers placés en rétention administrative en vue de leur éloignement ;

2°) de mettre à la

charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de ...

Vu la requête, enregistrée le 19 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la Cimade dont le siège est 64 rue Clisson à Paris (75013) ; l'association requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la note du ministre de l'intérieur du 5 décembre 2013 relative aux demandes d'asile présentées par des étrangers placés en rétention administrative en vue de leur éloignement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'association a intérêt à agir dès lors qu'elle a pour mission d'apporter son soutien aux demandeurs d'asile et de défendre leurs droits ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que la note contestée porte un préjudice grave et immédiat, à un intérêt public et aux intérêts que l'association entend défendre et entraîne des conséquences graves et immédiates pour les personnes faisant l'objet d'une rétention administrative et qui sollicitent l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ;

- il existe plusieurs doutes sérieux quant à la légalité de la note contestée ;

- elle est entachée d'une incompétence négative en modifiant les conditions d'instruction des demandes d'asile dont l'OFPRA est saisi ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que le conseil d'administration de l'OFPRA n'a pas été consulté ;

- elle est entachée d'erreurs de droit en ce qu'elle demande aux préfets d'appliquer des dispositions et un dispositif qui ne sont pas compatibles avec les exigences du droit de l'Union européenne et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme telles qu'elles sont interprétées par la Cour de justice et la Cour européenne des droits de l'homme, qu'il s'agisse de l'absence d'examen préalable de la demande d'asile par le préfet, du délai de cinq jours dans lequel elle doit être présentée, de l'absence de réexamen systématique de la décision de placement en rétention, des modalités de transmission de la demande à l'OFPRA ou encore de l'absence de caractère suspensif du recours devant la cour nationale du droit d'asile ;

Vu la note dont la suspension de l'exécution est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation de cette note ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- l'association requérante ne dispose pas d'un intérêt à agir ;

- la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors, d'une part, que la note contestée ne préjudicie ni aux intérêts de l'association ni aux intérêts qu'elle entend défendre et, d'autre part, qu'elle permet de sauvegarder le principe de légalité ;

- aucun des moyens soulevés n'est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la note contestée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 mars 2014, présenté pour la Cimade qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens, elle soutient en outre qu'il n'existe pas de fondement légal, nécessaire au regard des exigences européennes, pour maintenir un étranger en rétention durant l'examen de sa demande d'asile ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la Cimade et, d'autre part, le ministre de l'intérieur ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 6 mars 2014 à 9 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la Cimade ;

- les représentants de la Cimade ;

- les représentants du ministre de l'intérieur ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a prolongé l'instruction jusqu'au vendredi 14 mars 2014 à 18 heures ;

Vu le nouveau mémoire de production, enregistré le 13 mars 2014, présenté par le ministre de l'intérieur ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 14 mars 2014, présenté pour la Cimade qui conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

1. Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés peut ordonner la suspension de l'exécution d'un acte administratif à la condition, notamment, que l'urgence le justifie ; que tel est le cas lorsque l'exécution d'un acte porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;

2. Considérant que la Cimade demande la suspension de l'exécution de la note du ministre de l'intérieur du 5 décembre 2013 relative aux demandes d'asile présentées par des étrangers placés en rétention administrative en vue de leur éloignement ;

3. Considérant, d'une part, que la note litigieuse, qui revêt une portée générale, se borne, dans une certaine mesure, à réitérer, en prescrivant de l'appliquer, l'état du droit existant ; que, d'autre part, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, sera normalement en mesure de se prononcer sur la requête en annulation présentée par la Cimade à brève échéance ;

4. Considérant que, dans ces conditions, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie ; qu'il en résulte que, sans qu'il soit besoin de se prononcer ni sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'intérieur ni sur l'existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, la requête de la Cimade doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de la Cimade est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Cimade et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 375582
Date de la décision : 19/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 mar. 2014, n° 375582
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:375582.20140319
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