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05/03/2014 | FRANCE | N°358303

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 05 mars 2014, 358303


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'association Meru Cinéma Le Domino, dont le siège est rue François Truffaut (BP 30521), à Meru Cedex (60115), représentée par son président, et la société Specta, dont le siège est place du Patis (BP 41) à L'Isle Adam (95290), représentée par son représentant légal ; l'association Meru cinéma Le Domino et la société Specta demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n

176 du 18 janvier 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commer...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'association Meru Cinéma Le Domino, dont le siège est rue François Truffaut (BP 30521), à Meru Cedex (60115), représentée par son président, et la société Specta, dont le siège est place du Patis (BP 41) à L'Isle Adam (95290), représentée par son représentant légal ; l'association Meru cinéma Le Domino et la société Specta demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 176 du 18 janvier 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la SAS Chambly Cinéma l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un établissement cinématographique à l'enseigne " Megarama " regroupant 7 salles et 1 370 places à Chambly (Oise) ;

2°) de mettre à la charge de la SAS Chambly Cinéma la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code du cinéma et de l'image animée ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

Vu le décret n° 2008-1212 du 24 novembre 2008 ;

Vu l'arrêté du 5 décembre 2008 pris pour l'application du III de l'article R. 752-7 du code de commerce et relatif à la demande portant sur les projets d'aménagement cinématographique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de l'association Meru cinéma Le Domino et de la société Specta ;

Sur l'intervention de l'association Ecrans V.O. :

1. Considérant que l'association Ecrans V.O. a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial a statué au vu des avis rendus par les ministres chargés de la culture et de l'écologie, qui étaient les ministres intéressés à cette procédure ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la commission nationale aurait statué au terme d'une procédure irrégulière faute d'avoir recueilli l'avis des ministres intéressés manque en fait ;

3. Considérant que, si les requérants soutiennent que la décision attaquée serait entachée d'un vice de forme faute de mentionner sa date, il résulte des termes de la décision que ce moyen manque en fait ;

4. Considérant que si, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de la Commission nationale d'aménagement commercial, les décisions qu'elle prend doivent être motivées, cette obligation n'implique pas que la commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect, par le projet qui lui est soumis, de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par le législateur ; que la commission nationale a suffisamment exposé, en l'espèce, les considérations de fait et de droit justifiant sa décision ; qu'ainsi, les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée doivent être écartés ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

En ce qui concerne la composition du dossier de la demande d'autorisation :

5. Considérant, que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le dossier soumis par la société pétitionnaire permettait à la commission nationale de se prononcer sur le projet dont elle était saisie ; qu'en particulier, l'indication donnée par le pétitionnaire de son affiliation à un réseau de programmation qui réunit plusieurs cinémas sur le territoire national lui permettait d'apprécier la nature de la programmation envisagée ainsi que l'impact du projet sur les salles de cinéma implantées dans la zone d'influence ; qu'ainsi le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande doit être écarté ;

En ce qui concerne l'appréciation de la commission :

6. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 212-6 du code du cinéma et de l'image animée, repris de l'article 30-1 du code de l'industrie cinématographique, résultant de l'article 105 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, et de l'article L. 212-9 du même code que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet d'équipement cinématographique contesté compromet la réalisation des objectifs et principes énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique, lorsqu'elles se prononcent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs et principes, au vu des critères d'évaluation et indicateurs mentionnés à l'article L. 212-9 du code du cinéma et de l'image animée, parmi lesquels ne figure plus la densité d'équipement en salles de spectacles cinématographiques dans la zone d'attraction du projet ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la commission nationale a examiné, par une appréciation propre, le projet en cause au regard de ses effets sur la zone d'influence retenue par les pétitionnaires, qui était validée par les services instructeurs ; qu'au demeurant, elle a pris en considération l'existence de cinémas se trouvant au-delà de la zone mais à proximité immédiate ; qu'ainsi, le moyen selon lequel la commission nationale aurait commis une erreur de droit en s'étant crue liée par la zone d'influence telle que présentée dans le dossier de demande ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que, d'une part, il résulte des termes mêmes de sa décision que la commission nationale a examiné les effets du projet sur la diversité de l'offre cinématographique dans sa zone d'influence ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la commission nationale aurait commis une erreur de droit en omettant ce critère doit être écarté ; que, d'autre part, il ressort des pièce du dossier que l'influence de l'équipement en cause, eu égard à sa taille, aura des effets limités sur les équipements existants, notamment les salles ayant une vocation " art et essai ", mais aussi sur le cinéma à vocation plus généraliste qu'exploite l'une des requérantes sur la commune voisine de L'Isle-Adam ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la commission nationale aurait inexactement apprécié l'impact du projet sur la diversité de l'offre cinématographique dans sa zone d'influence doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que les requérantes soutiennent que la commission nationale a commis une erreur de droit en exerçant un simple contrôle de compatibilité du projet avec les exigences de l'article L 212-9 du code du cinéma et de l'image animée au lieu d'exercer un contrôle strict de conformité du projet à ces exigences ; que, toutefois, il ressort de l'ensemble de la décision attaqué que la commission nationale a examiné la conformité du projet aux exigences de diversité de l'offre cinématographique, d'aménagement culturel du territoire et de protection de l'environnement prévues à l'article L. 212-9 de ce code ; que la mention, dans la décision, du terme de compatibilité au lieu du terme de conformité procède d'une erreur de plume et ne révèle pas l'erreur de droit alléguée ; que le moyen doit donc être rejeté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la SAS Chambly cinéma ; que les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la SAS Chambly cinéma qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Meru cinéma Le Domino et de la société Specta les sommes de 2 000 euros à verser, chacune, à la société Chambly cinéma au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de l'association Ecrans V.O. est admise.

Article 2 : La requête de l'association Meru cinéma Le Domino et de la société Specta est rejetée.

Article 3 : L'association Meru cinéma Le Domino et la société Specta verseront, chacune, la somme de 2 000 euros à la société Chambly cinéma au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association Meru cinéma Le Domino, à la société Specta, à la société Chambly cinéma, à l'association Ecrans V.O. et à la Commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique.

Copie en sera adressée au médiateur du cinéma et au ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 358303
Date de la décision : 05/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mar. 2014, n° 358303
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SCP DELVOLVE, DELVOLVE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:358303.20140305
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