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12/02/2014 | FRANCE | N°349601

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 12 février 2014, 349601


Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par Mme A...B..., demeurant ... ; Mme B...demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 du décret n° 2011-451 du 22 avril 2011 pris pour l'application de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Vu la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 ;

Vu le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport d...

Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par Mme A...B..., demeurant ... ; Mme B...demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 du décret n° 2011-451 du 22 avril 2011 pris pour l'application de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Vu la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 ;

Vu le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

1. Considérant que l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques prévoit que nul ne peut accéder à la profession d'avocat s'il ne remplit les conditions posées par cet article, parmi lesquelles figurent notamment : " 2° Être titulaire, sous réserve des dispositions réglementaires prises pour l'application de la directive 2005 / 36 / CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005, et de celles concernant les personnes ayant exercé certaines fonctions ou activités en France, d'au moins une maîtrise en droit ou de titres ou diplômes reconnus comme équivalents pour l'exercice de la profession par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé des universités ; / 3° Être titulaire du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (...) " ; que l'article 12 de la même loi dispose : " (...) la formation professionnelle exigée pour l'exercice de la profession d'avocat est subordonnée à la réussite à un examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle et comprend une formation théorique et pratique d'une durée d'au moins dix-huit mois, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat. (...) " ; que le 11° de l'article 53 de la même loi prévoit qu'un décret en Conseil d'État détermine " les modalités de dispense du diplôme et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat et les conditions dans lesquelles seront établies les équivalences de titres ou de diplômes mentionnées à l'article 11, ainsi que les conditions dans lesquelles la détention d'un diplôme universitaire d'enseignement supérieur en sciences juridiques ou politiques peut dispenser de tout ou partie de la formation professionnelle ou de tout ou partie des conditions exigées pour la délivrance d'un certificat de spécialisation " ; que l'article 98 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué, dispose : " Sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat : / 1° Les notaires, les huissiers de justice, les greffiers des tribunaux de commerce, les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises, les anciens syndics et administrateurs judiciaires, les conseils en propriété industrielle et les anciens conseils en brevet d'invention ayant exercé leurs fonctions pendant cinq ans au moins ; / 2° Les maîtres de conférences, les maîtres assistants et les chargés de cours, s'ils sont titulaires du diplôme de docteur en droit, en sciences économiques ou en gestion, justifiant de cinq ans d'enseignement juridique en cette qualité dans les unités de formation et de recherche ; / 3° Les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises ; / 4° Les fonctionnaires et anciens fonctionnaires de catégorie A, ou les personnes assimilées aux fonctionnaires de cette catégorie, ayant exercé en cette qualité des activités juridiques pendant huit ans au moins, dans une administration ou un service public ou une organisation internationale ; / 5° Les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale ; / 6° Les juristes salariés d'un avocat, d'une association ou d'une société d'avocats, d'un office d'avoué ou d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle en cette qualité postérieurement à l'obtention du titre ou diplôme mentionné au 2° de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 susvisée ; / 7° Les personnes agréées par le président de la chambre d'appel de Mamoudzou dans la collectivité départementale de Mayotte justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle. / Les personnes mentionnées aux 3°, 4° ,5° et 6° peuvent avoir exercé leurs activités dans plusieurs des fonctions visées dans ces dispositions dès lors que la durée totale de ces activités est au moins égale à huit ans. " ;

2. Considérant que l'article 22 de la loi du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel dispose : " Par dérogation aux articles 11 et 12 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, sont dispensées de la condition de diplôme, de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les personnes ayant travaillé en qualité de collaborateur d'avoué postérieurement au 31 décembre 2008 et justifiant, au plus tard à la date d'entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué. / Bénéficient des dispenses prévues au premier alinéa les collaborateurs d'avoué qui justifient d'un nombre d'années de pratique professionnelle fixé par décret en Conseil d'État en fonction du niveau de diplôme obtenu. Les années de pratique professionnelle comptabilisées sont celles exercées en qualité de collaborateur d'avoué ou, postérieurement à la date d'entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, en qualité de collaborateur d'avocat. " ; que, pour l'application de ces dispositions législatives, l'article 5 du décret du 22 avril 2011, dont Mme B...demande l'annulation, dispose que " bénéficient des dispenses prévues au second alinéa de l'article 22 de la loi du 25 janvier 2011 (...) les collaborateurs d'avoué qui justifient : 1° De deux années de pratique professionnelle, s'ils sont titulaires d'un doctorat en droit, d'un diplôme d'études approfondies ou d'études supérieures spécialisées en droit ou d'un master en droit ; / 2° De trois années de pratique professionnelles, s'ils sont titulaires d'une maîtrise en droit ou d'un diplôme reconnu comme équivalent pour l'accès à la profession d'avocat ou s'ils justifient de la validation des soixante premiers crédits d'un master en droit ; / 3° De quatre années de pratique professionnelle s'ils sont titulaires d'une licence en droit " ;

3. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ;

4. Considérant, d'une part, que si Mme B...soutient que l'accès à la profession d'avocat ne saurait, sans méconnaître le principe d'égalité, être directement ouvert aux collaborateurs d'avoués n'étant pas titulaires d'une maîtrise en droit ou d'un titre ou diplôme reconnu équivalent, il résulte des termes mêmes de l'article 22 de la loi du 25 janvier 2011 que les collaborateurs d'avoué sont dispensés de la condition de diplôme posée par l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 ; que, par suite, la requérante ne saurait utilement soutenir, à l'encontre du décret attaqué, que la possibilité d'accéder à la profession d'avocat offerte aux collaborateurs d'avoués titulaires d'une licence en droit méconnaîtrait le principe d'égalité ;

5. Considérant, d'autre part, que Mme B...soutient que le décret attaqué a prévu, sans justification, des conditions d'ancienneté d'exercice professionnel plus favorables pour les collaborateurs d'avoué que celles qui sont prévues pour les juristes salariés des cabinets d'avocats ; que, toutefois, par les dispositions litigieuses, le pouvoir réglementaire a fixé, à titre exceptionnel, des conditions répondant à l'objectif d'intérêt général de reconversion professionnelle des collaborateurs d'avoué à la suite de la suppression, par la loi du 25 janvier 2011, du monopole de représentation des avoués devant les cours d'appels, sans prévoir de différence de traitement manifestement disproportionnée ; que, dans ces conditions, le décret attaqué doit être regardé comme ne méconnaissant pas le principe d'égalité ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 5 du décret du 22 avril 2011 ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B..., au Premier ministre et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 349601
Date de la décision : 12/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 fév. 2014, n° 349601
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:349601.20140212
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