La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/01/2014 | FRANCE | N°370613

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 20 janvier 2014, 370613


Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. B...A...demeurant ... ; M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le Premier ministre à rejeté sa demande d'abrogation des décrets n° 2010-914 du 3 août 2010 relatifs à la participation des agents des services fiscaux à certaines missions de police judiciaire et n° 2010-1318 du 4 novembre 2010 portant création d'une brigade nationale de répression de la délinquance fiscale ;

2°) d'enjo

indre au Premier ministre, à la garde des sceaux, ministre de la justice, au mi...

Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. B...A...demeurant ... ; M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le Premier ministre à rejeté sa demande d'abrogation des décrets n° 2010-914 du 3 août 2010 relatifs à la participation des agents des services fiscaux à certaines missions de police judiciaire et n° 2010-1318 du 4 novembre 2010 portant création d'une brigade nationale de répression de la délinquance fiscale ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre, à la garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre de l'intérieur et au ministre de l'économie et des finances d'abroger les décrets n° 2010-914 du 3 août 2010 relatif à la participation des agents des services fiscaux à certaines missions de police judiciaire et n° 2010-1318 du 4 novembre 2010 portant création d'une brigade nationale de répression de la délinquance fiscale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de procédure pénale, notamment son article 28-2 ;

Vu le décret n° 2010-914 du 3 août 2010 ;

Vu le décret n° 2010-1318 du 4 novembre 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Samuel Gillis, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

1. Considérant qu'en vertu des dispositions du I de l'article 28-2 du code de procédure pénale, des agents des services fiscaux peuvent être habilités à effectuer des enquêtes judiciaires, sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d'instruction, pour rechercher et constater, sur l'ensemble du territoire national, les infractions prévues par les articles 1741 et 1743 du code général des impôts lorsqu'il existe des présomptions caractérisées que les infractions prévues par ces articles résultent d'une des conditions prévues aux 1° à 5° de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, ainsi que les infractions qui leur sont connexes ; que les II à VI de ce même article définissent les conditions d'habilitation de ces agents et les garanties entourant leur participation à ces enquêtes ; que le décret du 3 août 2010 relatif à la participation des agents des services fiscaux à certaines missions de police judiciaire, qui complète le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de procédure pénale, précise les modalités de désignation, d'habilitation et de notation de ces agents ; que le décret du 4 novembre 2010 portant création d'une brigade nationale de répression de la délinquance fiscale institue au sein du ministère de l'intérieur cette brigade et définit ses missions et conditions de fonctionnement ; que cette brigade, qui comprend des officiers fiscaux judiciaires, agents des services fiscaux, est compétente pour rechercher et constater les infractions définies à l'article 28-2 du code de procédure pénale ; que M. A...conteste la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande tendant à l'abrogation de ces deux décrets ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu' il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant qu'à l'appui de sa question prioritaire de constitutionnalité, le requérant soutient que les dispositions de l'article 28-2 du code de procédure pénale, pour l'application desquelles ont été pris les décrets litigieux, méconnaissent le principe du droit à un procès équitable garanti par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dès lors que les agents des services fiscaux demeurent, ...; que toutefois, la participation des agents des services fiscaux aux enquêtes judiciaires dans les conditions définies par l'article 28-2 du code de procédure pénale, qui les place sous le contrôle de l'autorité judiciaire, ne saurait porter par elle-même atteinte au droit à un procès équitable ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, qui n'est pas nouvelle et ne présente pas de caractère sérieux, le moyen tiré de ce que l'article 28-2 du code de procédure pénale porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;

4. Considérant que si le requérant soutient par ailleurs que les décrets dont il a demandé l'abrogation méconnaissent les exigences d'impartialité objective nécessaires à un procès équitable, garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et par l'article préliminaire du code de procédure pénale, ce moyen ne peut qu'être écarté, dès lors que le principe de la participation des agents des services fiscaux à des enquêtes judiciaires résulte directement des dispositions législatives de l'article 28-2 du code de procédure pénale et non des décrets contre lesquels le moyen est dirigé ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande tendant à l'abrogation des dispositions litigieuses ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.A....

Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., à la garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 370613
Date de la décision : 20/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 jan. 2014, n° 370613
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Samuel Gillis
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:370613.20140120
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award