La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/12/2013 | FRANCE | N°374206

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 30 décembre 2013, 374206


Vu le recours, enregistré le 24 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'intérieur, qui demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 130560 du 22 novembre 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution des décisions du préfet de Mayotte du 20 novembre 2013 ordonnant la reconduite à la frontière et le placement en rétention de M. C...B... ;

2°)

de rejeter les conclusions présentées par M. B...en première instance ;

il so...

Vu le recours, enregistré le 24 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'intérieur, qui demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 130560 du 22 novembre 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution des décisions du préfet de Mayotte du 20 novembre 2013 ordonnant la reconduite à la frontière et le placement en rétention de M. C...B... ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. B...en première instance ;

il soutient que :

- l'appel est recevable dès lors que l'absence de notification de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte au ministre de l'intérieur empêche le délai d'appel de courir ;

- l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit dès lors que M. B... ne justifie pas d'une entrée régulière à Mayotte ;

- l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet de Mayotte n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que M. B... n'était marié avec une ressortissante française que depuis cinq mois à la date des décisions contestées ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le ministre de l'intérieur et, d'autre part, M. B...;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 30 décembre 2013 à 14 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- les représentants du ministre de l'intérieur ;

- Me Bouzidi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. B... ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clôturé l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 ;

Vu le décret n° 2001-635 du 17 juillet 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.B..., de nationalité comorienne, a épousé à Mamoudzou Mme D...M'A..., ressortissante française, le 21 juin 2013 ; qu'il a été interpellé après être entré irrégulièrement à Mayotte et placé en rétention par un arrêté préfectoral du 20 novembre 2013 portant également reconduite à la frontière ; que le requérant a introduit un recours contre cet arrêté sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a fait droit à sa demande en suspendant l'exécution des décisions du préfet de Mayotte du 20 novembre 2013 ordonnant la reconduite à la frontière et le placement en rétention de M.B... ; que le ministre de l'intérieur fait appel de cet ordonnance ;

3. Considérant qu'en vertu du 2° de l'article 16 de l'ordonnance du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte, la carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit à l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage ; qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 6-1 de la même ordonnance et de l'article 20 du décret du 17 juillet 2001 pris pour son application, une telle carte peut être délivrée alors même que l'étranger marié avec un Français n'est pas titulaire d'un visa d'une durée supérieure à trois mois ; que les mêmes dispositions subordonnent en revanche la délivrance de cette carte à la condition d'une entrée régulière à Mayotte ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, dès lors que M. B...ne justifie pas d'une entrée régulière à Mayotte, le préfet de Mayotte n'a pas, contrairement à ce qu'a estimé le juge des référés de première instance, commis, en prenant les décisions litigieuses, d'illégalité grave et manifeste au regard des règles d'entrée et de séjour dans ce Département ; qu'eu égard à la faible durée qui s'est écoulée entre le mariage de l'intéressé et ces décisions, aucune méconnaissance grave et manifeste des exigences du droit au respect de la vie privée et familiale, telles qu'elles découlent de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut davantage être retenue ; qu'ainsi, et en l'absence d'autre moyen invoqué par l'intéressé, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés a fait droit à la demande présentée par M. B...sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que, pour bénéficier, en sa qualité de conjoint de Français, d'une carte de séjour, il appartient à l'intéressé, sauf à obtenir du préfet la régularisation de sa situation, de regagner les Comores et d'y demander un visa d'entrée en France ; qu'il a été indiqué à l'audience par les représentants du ministre de l'intérieur qu'une telle demande serait, le cas échéant, examinée dans les meilleurs délais par les autorités consulaires aux Comores et qu'elle devrait aboutir dès lors que M. B...justifie de la réalité de son projet matrimonial ;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte en date 22 novembre 2013 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. C...B....


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 374206
Date de la décision : 30/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2013, n° 374206
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:374206.20131230
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award