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30/12/2013 | FRANCE | N°362960

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 30 décembre 2013, 362960


Vu la requête, enregistrée le 24 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association No Gazaran !, dont le siège est à la mairie de Châteauneuf- sur-Isère à Châteauneuf-sur-Isère (26300), représentée par son représentant légal ; l'association No Gazaran ! demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre, le garde des sceaux, ministre de la justice, et le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sur son recours gracieu

x du 20 mai 2012 tendant à l'annulation du décret n° 2012-385 du 21 ma...

Vu la requête, enregistrée le 24 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association No Gazaran !, dont le siège est à la mairie de Châteauneuf- sur-Isère à Châteauneuf-sur-Isère (26300), représentée par son représentant légal ; l'association No Gazaran ! demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre, le garde des sceaux, ministre de la justice, et le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sur son recours gracieux du 20 mai 2012 tendant à l'annulation du décret n° 2012-385 du 21 mars 2012 relatif à la Commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 ;

Vu le décret n° 2012-385 du 21 mars 2012 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Clémence Olsina, Auditeur,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique : " En application de la Charte de l'environnement de 2004 et du principe d'action préventive et de correction prévu à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche sont interdites sur le territoire national " ; que l'article 2 de cette même loi a institué une Commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux, qui est notamment chargée d'évaluer les risques environnementaux liés aux techniques de fracturation hydraulique ou aux techniques alternatives et émet un avis public sur les conditions de mise en oeuvre des expérimentations réalisées, dans ce domaine, à seules fins de recherche scientifique ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 21 mars 2012 relatif à cette commission, celle-ci comprend : " 1° Cinq membres de droit, représentants de l'Etat : / a) Le directeur général de l'énergie et du climat ; / b) Le directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature ; / c) Le directeur général de la prévention des risques ; / d) Le directeur général de la compétitivité, de l'industrie et des services ; / e) Le directeur général du Trésor ; / 2° Un député et un sénateur ; / 3° Trois représentants des collectivités territoriales : / a) Un représentant des communes ou groupements de communes désigné par l'Association des maires de France ; / b) Un représentant des conseils généraux désigné par l'Assemblée des présidents des conseils généraux de France ; / c) Un représentant des conseils régionaux désigné par l'Association des présidents de conseils régionaux ; / 4° Douze membres nommés par arrêté des ministres chargés des mines, de l'industrie, de l'énergie, de l'écologie et du développement durable pour une durée de trois ans : / a) Trois représentants d'associations agréées pour la protection de l'environnement ; / b) Trois représentants des entreprises des secteurs gazier et pétrolier ; / c) Trois représentants du personnel des industries gazière et pétrolière, désignés sur proposition des organisations syndicales les plus représentatives de ce personnel ; / d) Trois personnalités désignées en raison de leurs compétences scientifiques dans les domaines concernés par le développement des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux " ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la Charte de l'environnement : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage " ; qu'aux termes du 1° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, la protection et la gestion des espaces, ressources et milieux naturels s'inspirent notamment du " principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable " ;

3. Considérant que l'association requérante soutient que les dispositions de l'article 2 du décret du 21 mars 2012 rappelées ci-dessus méconnaissent le principe de précaution en ce qu'elles ne prévoient pas la présence au sein de la Commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux de représentants des ministères chargés de la santé, de l'agriculture et de la recherche ; que, toutefois, eu égard tant aux dispositions de l'article 2 de la loi du 13 juillet 2011 qu'à l'objet de cette commission, l'autorité réglementaire dispose d'une large marge d'appréciation pour choisir les représentants de l'administration devant siéger en son sein ; qu'au demeurant, les dispositions de l'article 2 du décret attaqué prévoient une représentation diversifiée des administrations, organismes et milieux intéressés et permettent de désigner des personnes qualifiées dans les domaines de compétence relevant des ministères précités ; qu'en outre, l'administration a la possibilité de faire participer aux réunions de la commission toute personne susceptible d'éclairer ses travaux ; que par suite, et en tout état de cause, l'association requérante n'est fondée à soutenir ni que le décret attaqué serait entaché d'une erreur manifeste dans l'application du principe de précaution ni qu'il aurait méconnu l'article 21 de la Constitution en vertu duquel le Premier ministre est chargé d'assurer l'exécution des lois ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 2 du décret du 21 mars 2012 seraient illégales en ce qu'elles restreindraient à certaines associations agréées pour la protection de l'environnement la possibilité d'être représentées au sein de la commission en cause, tel qu'il est formulé dans la requête et le recours gracieux auquel elle fait référence, n'est pas assorti des précisions de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé ; que les courriers adressés par l'association requérante au Conseil d'Etat à l'occasion de l'examen du projet de décret par ses formations consultatives et joints à la requête, ne sauraient suppléer l'insuffisance de motivation de celle-ci ; que, par suite, le moyen mentionné ci-dessus ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que le Président de la République et le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie auraient déclaré que, la commission nationale de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux ne serait pas réunie est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité du décret litigieux et de la décision attaquée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'association No Gazaran ! est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association No Gazaran, au Premier ministre, au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et au ministre du redressement productif.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 362960
Date de la décision : 30/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2013, n° 362960
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Clémence Olsina
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:362960.20131230
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