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30/12/2013 | FRANCE | N°356091

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 30 décembre 2013, 356091


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 23 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0916575/5-1 du 24 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 24 août 2009 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales prononçant sa mutation dans l'intérêt du service du commissariat central du 4èm

e arrondissement de Paris au commissariat central du 5ème arrondissement...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 23 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0916575/5-1 du 24 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 24 août 2009 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales prononçant sa mutation dans l'intérêt du service du commissariat central du 4ème arrondissement de Paris au commissariat central du 5ème arrondissement de Paris à compter du 31 août 2009 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de régulariser sa situation administrative ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 34 ;

Vu loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, notamment son article 60 ;

Vu la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, notamment son article 19 ;

Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995, notamment son article 25 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. B...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de tensions apparues au sein du commissariat du 4ème arrondissement de Paris après le suicide le 14 juin 2009 d'un gardien de la paix qui y était affecté, le directeur de la police urbaine de proximité a demandé le 3 août à la préfecture de police la mutation en urgence, dans l'intérêt du service, de M.B..., capitaine de police affecté depuis juin 2005 dans ce commissariat en qualité d'adjoint au chef du service de police de quartier ; que, par un arrêté du 24 août 2009, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a prononcé la mutation dans l'intérêt du service de M. B... au commissariat central du 5ème arrondissement, où il a été affecté au sein de l'unité de traitement judiciaire en temps réel du service d'accueil, de recherches et d'investigations judiciaires ; que M. B...se pourvoit en cassation contre le jugement du 24 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur l'exception d'illégalité de l'article 25 du décret du 9 mai 1995 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité : " En raison du caractère particulier de leurs missions et des responsabilités exceptionnelles qu'ils assument, les personnels actifs de la police nationale constituent dans la fonction publique une catégorie spéciale. / Le statut spécial de ces personnels peut déroger au statut général de la fonction publique afin d'adapter l'organisation des corps et des carrières aux missions spécifiques de la police nationale. / Compte tenu de la nature de ces missions, les personnels actifs de la police nationale sont soumis à des obligations particulières de disponibilité, de durée d'affectation, de mobilité et de résidence. Leurs statuts, qui sont pris par décret en Conseil d'Etat, peuvent comporter notamment des conditions particulières de déroulement de carrière pour les fonctionnaires affectés de façon durable dans certaines grandes agglomérations " ;

3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires " ; qu'aux termes de l'article 25 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée sont applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale. / Toutefois, lorsque l'intérêt du service l'exige, le fonctionnaire actif des services de la police nationale peut être exceptionnellement déplacé ou changé d'emploi. Dans ce cas, les dispositions mentionnées au premier alinéa du présent article ne sont pas applicables aux fonctionnaires actifs de la police nationale. / Le fonctionnaire est préalablement informé de l'intention de l'administration de prononcer sa mutation pour être à même de demander communication de son dossier. / La mutation est opérée sur un poste de niveau comparable " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 19 précité de la loi du 21 janvier 1995 que le législateur a expressément prévu la possibilité pour les décrets en Conseil d'Etat fixant les statuts particuliers des personnels actifs de la police nationale de déroger aux dispositions législatives formant le statut général de la fonction publique afin d'adapter l'organisation des corps et des carrières aux missions spécifiques de la police nationale ; qu'en vertu des dispositions du troisième alinéa du même article, les personnels concernés sont soumis à des obligations particulières de mobilité ; que ces dispositions législatives donnent compétence au pouvoir réglementaire pour fixer des règles dérogatoires en matière de procédure de mutation des personnels des services actifs de la police nationale ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ces mêmes dispositions que les dérogations susceptibles d'être prévues par les statuts particuliers doivent être justifiées par la nature particulière des missions incombant aux personnels actifs de la police nationale ; que l'absence de consultation préalable de la commission administrative paritaire en cas de mutation dans l'intérêt du service répond à la nécessité de pouvoir procéder sans délai à une telle mutation, compte tenu des missions spécifiques des personnels concernés ; qu'ainsi, en dérogeant dans cette hypothèse à l'obligation, prévue à l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984, de recueillir l'avis de la commission administrative paritaire préalablement à toute mutation, l'auteur du décret du 9 mai 1995 n'a pas excédé les pouvoirs qu'il tenait des dispositions de l'article 19 de la loi du 21 janvier 1995 ;

6. Considérant qu'il suit de là que le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en écartant l'exception d'illégalité invoquée par M. B...à l'encontre des dispositions du deuxième alinéa de l'article 25 du décret du 9 mai 1995 ;

Sur l'application des dispositions de cet article en l'espèce :

7. Considérant que le tribunal administratif a jugé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qui lui était soumis que la mutation litigieuse, qui n'impliquait aucun changement de résidence, aurait eu des conséquences pécuniaires négatives pour l'intéressé ou aurait entraîné une diminution de ses attributions ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le tribunal se serait abstenu de rechercher si la mutation de M. B...n'emportait pas pour lui une perte très sensible de responsabilité, contrairement aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 25 du décret du 9 mai 1995, manque en fait ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

9. Considérant qu'il résulte de ces mêmes dispositions que, si une personne publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat peut néanmoins demander au juge l'application de cet article au titre des frais spécifiques exposés par elle à l'occasion de l'instance, elle ne saurait se borner à faire état d'un surcroît de travail de ses services ; qu'en l'espèce, pour demander la mise à la charge de M. B...d'une somme au titre de ces dispositions, le ministre se borne à chiffrer le coût correspondant au temps consacré par ses agents à l'élaboration du mémoire en défense qu'il a produit ; que, dès lors, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l'intérieur au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 356091
Date de la décision : 30/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2013, n° 356091
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:356091.20131230
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