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06/12/2013 | FRANCE | N°362324

France | France, Conseil d'État, 6ème / 1ère ssr, 06 décembre 2013, 362324


Vu le pourvoi du ministre de l'intérieur, enregistré le 29 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA04637 du 25 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête du préfet de police tendant à l'annulation du jugement n° 1100916/6-1 du 28 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 17 décembre 2010 refusant le renouvellement de la carte de séjour temporaire de M. B...A...et l'obligeant à quitter le territoire fra

nçais dans un délai d'un mois, et lui a enjoint de délivrer à l'intéres...

Vu le pourvoi du ministre de l'intérieur, enregistré le 29 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA04637 du 25 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête du préfet de police tendant à l'annulation du jugement n° 1100916/6-1 du 28 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 17 décembre 2010 refusant le renouvellement de la carte de séjour temporaire de M. B...A...et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois, et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de 3 mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de faire droit à l'appel du préfet de police ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Roger, Sevaux, Mathonnet, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., de nationalité gabonaise, entré en France en décembre 2001, a sollicité le renouvellement de sa carte de séjour mention " salarié " sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 17 décembre 2010, le préfet de police a rejeté sa demande ; que, par un jugement du 28 septembre 2011, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de police de délivrer à M. A...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel du préfet de police ;

2. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; qu'il peut, en outre, exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait ; qu'ainsi, dans l'hypothèse où un étranger sollicite la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", il est loisible au préfet, après avoir constaté que l'intéressé ne remplit pas les conditions posées par l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soit de lui délivrer un titre sur le fondement d'une autre disposition du code, s'il remplit les conditions qu'elle prévoit, soit, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, de lui délivrer, compte tenu de l'ensemble de sa situation personnelle, le titre qu'il demande ou un autre titre ; qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Paris, qui, contrairement à ce qu'il soutient, n'a pas jugé que le préfet de police était tenu d'examiner la demande de M. A...au regard d'autres dispositions du code que celles dont il se prévalait, aurait commis une erreur de droit en jugeant que, alors même que M. A...ne remplissait pas les conditions posées par l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police ne se trouvait pas en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité ;

3. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient le ministre, en jugeant qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que M. A...était bien intégré à la société française et justifiait de son insertion professionnelle par la production de ses contrats de travail, la cour a porté sur la situation de l'intéressé une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Roger-Sevaux, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la SCP Roger-Sevaux ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SCP Roger-Sevaux, avocat de M.A..., une somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. B...A....


Synthèse
Formation : 6ème / 1ère ssr
Numéro d'arrêt : 362324
Date de la décision : 06/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 ÉTRANGERS. SÉJOUR DES ÉTRANGERS. - ADMISSION AU SÉJOUR - CAS OÙ LE TITRE SOLLICITÉ NE PEUT EN PRINCIPE ÊTRE ACCORDÉ - POUVOIRS DU PRÉFET - POSSIBILITÉ D'EXAMINER D'OFFICE SI L'AUTORISATION PEUT ÊTRE DÉLIVRÉE SUR UN AUTRE FONDEMENT - EXISTENCE [RJ1] - POSSIBILITÉ DE RÉGULARISER LA SITUATION DE L'ÉTRANGER DANS LE CADRE DE SON POUVOIR DISCRÉTIONNAIRE - EXISTENCE [RJ2] - CONDITIONS.

335-01 Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), il est loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Il peut, en outre, exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait.... ,,Ainsi, dans l'hypothèse où un étranger sollicite la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié, il est loisible au préfet, après avoir constaté que l'intéressé ne remplit pas les conditions posées par l'article L. 313-10 du CESEDA, soit de lui délivrer un titre sur le fondement d'une autre disposition du code, s'il remplit les conditions qu'elle prévoit, soit, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, de lui délivrer, compte tenu de l'ensemble de sa situation personnelle, le titre qu'il demande ou un autre titre.


Références :

[RJ1]

Cf., pour l'absence d'obligation de procéder à cet examen, CE, avis, 28 novembre 2007, Mme Zhu, n° 307036, p. 454.,,

[RJ2]

Cf. CE, 24 février 1982, Ministre de l'intérieur c/ Bouriah, n° 25289, p. 88 ;

CE, 7 octobre 1991, Diop, n° 100639, T. p. 681.


Publications
Proposition de citation : CE, 06 déc. 2013, n° 362324
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste de Froment
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:362324.20131206
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