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20/11/2013 | FRANCE | N°357915

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 20 novembre 2013, 357915


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mars et 14 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B... A..., demeurant... ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX02977 du 24 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0802095 du 14 octobre 2010 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions s

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mars et 14 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B... A..., demeurant... ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX02977 du 24 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0802095 du 14 octobre 2010 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2005, d'autre part, à ce que lui soit accordée la décharge des impositions contestées ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil, notamment son article 1583 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Maxime Boutron, Auditeur,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., qui exerçait l'activité d'expert-comptable, a, aux termes d'un contrat en date du 31 décembre 2004, cédé son cabinet à la SARL A...C...et Associés dans laquelle elle détient 45 % du capital et dont elle est co-gérante de droit ; qu'au titre des bénéfices non commerciaux de l'année 2004, elle a déclaré une plus-value nette à long terme qu'elle a placée sous le régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts en cas de cession d'une entreprise individuelle ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration, estimant que la cession du cabinet était intervenue le 1er janvier 2005, a assujetti Mme A... à des impositions supplémentaires en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à raison de cette plus-value au titre de l'année 2005, au motif que l'exonération prévue par l'article 238 quaterdecies du code général des impôts ne s'applique pas " aux cessions intervenues entre le 1er janvier et le 31 décembre 2005 " lorsque " le cédant exerce en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société cessionnaire. " ;

2. Considérant que, pour juger que la cession des éléments incorporels et corporels composant le cabinet de Mme A...devait être regardée comme étant intervenue le 1er janvier 2005, la cour administrative d'appel de Bordeaux a estimé que la requérante ne produisait aucun élément de nature à contredire les mentions de l'acte de cession selon lesquelles la SARL A...C...et Associés serait propriétaire du cabinet d'expertise comptable présentement cédé et en aurait la jouissance à compter du 1er janvier 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait des écritures produites devant les juges du fond que Mme A...soutenait, d'une part, sans être contredite, que les négociations sur la chose cédée et sur son prix étaient intervenues avant la fin de l'année 2004, comme en témoignaient notamment la mise en place d'un financement bancaire partiel en septembre 2004 au service de cette opération et les démarches effectuées au cours de l'année 2004 par M. C...pour permettre à la SARL A...C...et Associés de reprendre l'activité de Mme A...à la fin de l'année 2004, d'autre part, que l'économie générale de la convention montrait qu'elle avait entendu céder son activité au 31 décembre 2004, la cour a dénaturé les écritures de la requérante ; que Mme A...est, par suite, fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1583 du code civil : " La propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée et le prix payé " ; que le transfert de propriété doit être regardé comme ayant lieu à la date à laquelle intervient un accord sur la chose et le prix sauf lorsque les parties en ont expressément disposé autrement ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que Mme A...et la SARL A...Lissarague et Associés sont entrés en négociation à propos de la cession du cabinet d'expertise comptable de Mme A...au cours de l'année 2004 ; qu'à cet effet et dans ce contexte, un financement bancaire partiel a été obtenu en septembre 2004 et M.C... a pris les dispositions nécessaires pour que la SARL soit en état de reprendre l'activité de Mme A... à la fin de l'année 2004 ; que ces négociations ont abouti, le 31 décembre 2004, à un accord entre les parties portant sur la chose cédée et sur son prix au sens des dispositions précitées de l'article 1583 du code civil, lequel s'est manifesté par la signature, le même jour, de la convention de cession ; que, d'autre part, il résulte de l'ensemble des stipulations de cette convention que les parties ont entendu que Mme A...cède définitivement son cabinet d'expertise comptable à la date de la convention ; que si une stipulation de cette convention a prévu que la SARL A...C...et Associés entrerait en jouissance du bien présentement cédé à compter du 1er janvier 2005, cette stipulation a eu pour seul objet de distinguer la date à laquelle Mme A...cesserait définitivement son activité de celle à laquelle ses successeurs commenceraient la leur ; qu'ainsi, la vente devait être regardée comme réalisée au 31 décembre 2004 ; que, dès lors, les dispositions de l'article 238 quaterdecies du code général des impôts excluant du bénéfice de l'exonération les cessions intervenues entre le 1er janvier et le 31 décembre 2005 lorsque le cédant exerce en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société cessionnaire n'étaient pas applicables à la cession du cabinet d'expertise-comptable de Mme A... ; que, par suite, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Pau a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2005 ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à Mme A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 24 janvier 2012 et le jugement du tribunal administratif de Pau du 14 octobre 2010 sont annulés.

Article 2 : Mme A...est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2005.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Articles 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A...et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 357915
Date de la décision : 20/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 20 nov. 2013, n° 357915
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Maxime Boutron
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:357915.20131120
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