Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 11 octobre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Groupement d'études matériels techniques, dont le siège est 2, allée Jean-Monnet, ZI Les Portes de la Forêt, Collégien, à Marne-la-Vallée (77615) ; la société Groupement d'études matériels techniques demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA04057 du 6 mai 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0404904/7 du 4 juin 2008 du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à obtenir le bénéfice du crédit d'impôt recherche auquel elle prétendait au titre des exercices 1992 à 1995 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Véronique Rigal, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la société Groupement d'études matériels techniques ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Groupement d'études matériels techniques (GEMT) a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1993, 1994 et 1995 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a notamment refusé d'admettre les crédits d'impôt recherche dont la société entendait bénéficier sur le fondement des dispositions des articles 244 quater B du code général des impôts et 79 septies F de l'annexe III à ce code, sans qu'aucune imposition supplémentaire ne soit cependant mise en recouvrement à ce titre, les exercices 1993, 1994 et 1995 de la société ayant été déficitaires et n'ayant donné lieu à aucune imputation d'un crédit d'impôt recherche ; que la société GEMT a introduit, le 29 décembre 2003, une réclamation tendant au remboursement de ces crédits d'impôt recherche, en demandant leur imputation sur l'impôt sur les sociétés qu'elle avait acquitté au titre de l'exercice clos le 30 juin 2001, premier exercice bénéficiaire de la société depuis les exercices sur lesquels avait porté la vérification de comptabilité ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 mai 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du 4 juin 2008 du tribunal administratif de Melun et rejeté sa requête ;
2. Considérant, en premier lieu, que si la société GEMT a sollicité, devant le tribunal administratif puis devant la cour administrative d'appel, une expertise des opérations dont elle soutient qu'elles ont le caractère d'opérations de recherche scientifique et technique, il ressort de la motivation de l'arrêt qu'elle attaque que la cour administrative d'appel de Paris s'est estimée suffisamment informée et a entendu écarter la demande d'expertise comme sans intérêt pour la solution du litige ; que, par suite, son arrêt est suffisamment motivé sur ce point ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57 le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements " ; que l'article 25 de la loi du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999 a complété cet alinéa par une disposition prévoyant que : " Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de redressement contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai " ; que la cour a relevé que, après l'envoi d'une notification de redressements à la société le 19 décembre 1996, l'administration avait, dans une réponse aux observations du contribuable du 17 janvier 1997, indiqué de manière précise les montants de crédit d'impôt recherche qu'elle refusait d'admettre et les conséquences d'un tel refus sur les résultats déclarés ; qu'en jugeant que, dès lors qu'aucune modification sur ces points n'était intervenue depuis la réponse de 1997, la circonstance que l'administration n'avait pas expressément rappelé son refus d'admettre les crédits d'impôt litigieux et les conséquences financières de ce refus lorsque la société a procédé, au titre de l'exercice bénéficiaire clos le 30 juin 2001, à la liquidation de l'impôt sur les sociétés à acquitter, était sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition, la cour n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans leur version issue de la loi du 30 décembre 1999 ;
4. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 50 pour cent de l'excédent des dépenses de recherche par rapport à la moyenne des dépenses de même nature, revalorisées de la hausse des prix à la consommation, exposées au cours des deux années précédentes " ; que selon l'article 49 septies F de l'annexe III au même code, sont considérées comme opérations de recherche scientifique et technique, outre les activités ayant un caractère de recherche fondamentale ou de recherche appliquée, les activités " ayant le caractère de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté " ; qu'en déduisant de ces dispositions que le dépôt d'un brevet ne suffit pas, à lui seul, à établir le caractère substantiel d'innovations techniques, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'en relevant que les perfectionnements apportés par la société à certains matériels constituaient des améliorations de techniques existantes dépourvues de caractère substantiel alors même que certains des projets en cause avaient été suivis du dépôt d'un brevet, la cour a exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GEMT n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Groupement d'études matériels techniques est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Groupement d'études matériels techniques et au ministre de l'économie et des finances.