Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 29 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société à responsabilité limitée Vilag, dont le siège est 8, allée Charrier à Villemomble (93250), représentée par son gérant en exercice ; elle demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10VE03756 du 17 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0710862 du 23 septembre 2010 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle assise sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes, d'autre part, à la décharge de ces impositions ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Renaud Jaune, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Blanc, Rousseau, avocat de la SARL Vilag ;
1. Considérant qu'aux termes du I de l'article 44 octies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de l'article 17 de la loi du 28 décembre 2001 de finances pour 2002 : " Les contribuables qui exercent ou créent des activités avant le 31 décembre 2001 dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 modifié de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui de la délimitation de la zone pour les contribuables qui y exercent déjà leur activité ou, dans le cas contraire, celui de leur début d'activité dans l'une de ces zones. Ces bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 40 %, 60 % ou 80 % de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la deuxième ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération. La date de délimitation des zones franches urbaines visée au présent article est réputée correspondre, dans tous les cas, au 1er janvier 1997. (...) " ; qu'en vertu du II du même article, le bénéfice exonéré ne peut, en aucun cas, excéder 61 000 euros par période de douze mois ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions que le bénéfice du régime de faveur qu'elles instituent au profit des contribuables dont les activités sont implantées en zones franches urbaines est subordonné, pour les contribuables n'y exerçant pas leurs activités au 1er janvier 1997, date de délimitation de ces zones, à la création d'activités dans une de celles-ci avant le 31 décembre 2001 ; que la reprise par une société d'une activité déjà exercée en zone franche urbaine par une société éligible à ce régime, qui continue d'y exercer ses activités et reste placée sous ce régime, ne constitue pas une création d'activité au sens de ces dispositions ; que la circonstance que la société dont l'activité est reprise est déficitaire au titre d'un ou plusieurs exercices de la période pendant laquelle elle est placée sous le régime de faveur est sans incidence pour l'application de ces dispositions ;
3. Considérant que, pour juger que la création, en septembre 2000, de la société à responsabilité limitée Vilag ne pouvait être regardée comme une création d'activité au sens des dispositions de l'article 44 octies du code général des impôts, la cour administrative d'appel de Versailles a relevé que cette société, exploitante de services de messagerie sur minitel, exerçait son activité dans les mêmes locaux que la société Loma, dont elle sous-louait le fonds de commerce, avait le même gérant que celle-ci et deux associés communs, n'employait aucun autre personnel que son associé-gérant, que le chiffre d'affaires de la société Loma provenait du reversement par la société Vilag d'un pourcentage des sommes que lui versait France Télécom à titre de rétrocession du chiffre d'affaires produit par les services du minitel, et qu'il résultait de l'ensemble de ces éléments que la société Vilag n'exerçait pas une activité différente de celle de la société Loma, qui lui préexistait et qui bénéficiait du régime de faveur prévu par l'article 44 octies du code général des impôts ; qu'en statuant ainsi, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient la société Vilag, la cour ne s'est pas fondée sur la circonstance que la société Loma avait atteint le plafond de bénéfice exonéré, fixé à 61 000 euros par le II de l'article 44 octies du code général des impôts ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que la cour aurait insuffisamment motivé son arrêt en ne répondant pas au moyen tiré de ce que la société Loma était déficitaire en 2002 et de ce que la cour aurait dénaturé les pièces du dossier en relevant que la société Loma avait bénéficié de cette exonération au titre de l'année 2002 à hauteur du plafond de 61 000 euros sont sans incidence sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant que la proposition de rectification du 13 juillet 2005 adressée à la société Vilag était suffisamment motivée et qu'elle avait interrompu le délai de prescription relatif aux rehaussements d'impositions au titre de l'année 2002, alors même que l'administration en avait modifié les motifs par une nouvelle proposition de rectification du 29 septembre 2006, l'annulant et la remplaçant, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'en relevant que la société Vilag n'entrait ni dans les prévisions de l'instruction administrative référencée 4 A-6-02 du 10 juillet 2002, au motif que la création de cette société ne pouvait être analysée comme un apport en société, d'une activité exercée à titre individuel, ni dans les prévisions de l'instruction administrative référencée 4 A-8-04 du 6 octobre 2004, au motif, notamment, que cette instruction ne visait pas explicitement l'hypothèse d'une sous-location de fonds de commerce, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;
6. Considérant, en dernier lieu, que la cour a, par une appréciation souveraine des faits qui n'est pas arguée de dénaturation, estimé que l'administration avait établi la volonté délibérée de la société Vilag d'éluder l'impôt ; que, par suite, elle a pu juger, sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique des faits, que l'application de la pénalité pour mauvaise foi prévue par l'article 1729 du code général des impôts était, en l'espèce, justifiée ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société Vilag doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SARL Vilag est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL Vilag et au ministre de l'économie et des finances.