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21/10/2013 | FRANCE | N°348249

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 21 octobre 2013, 348249


Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires enregistrés les 8 avril 2011, 8 juillet 2011 et 13 janvier 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX00351-10BX01966 du 8 février 2011 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur ses requêtes dirigées contre les jugements n° 0503284 du 21 avril 2009 et du 1er juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse, en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à

lui verser un capital de 686 000 euros et une rente annuelle de 45 0...

Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires enregistrés les 8 avril 2011, 8 juillet 2011 et 13 janvier 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX00351-10BX01966 du 8 février 2011 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur ses requêtes dirigées contre les jugements n° 0503284 du 21 avril 2009 et du 1er juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse, en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser un capital de 686 000 euros et une rente annuelle de 45 000 euros en réparation des préjudices résultant de sa vaccination contre le virus de la poliomyélite ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérald Bégranger, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. B...et à la SCP Roger, Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir été vacciné contre le virus de la poliomyélite le 1er juin 1979, à l'âge de trois mois, M. B... a présenté une poliomyélite diagnostiquée le 24 août 1979, ayant nécessité son hospitalisation jusqu'au 8 novembre 1983 ; qu'il a demandé en référé le 17 janvier 2001 que soit ordonnée une expertise relative au lien entre cette affection et la vaccination pratiquée, puis a recherché la responsabilité de l'Etat sur le fondement de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique ; que le tribunal administratif de Toulouse, estimant qu'il n'était pas établi que la poliomyélite présentée par M. B...résultait de sa vaccination, a rejeté la demande formée par celui-ci ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Garonne par un jugement du 1er juin 2010 ; que, par un arrêt du 8 février 2011 contre lequel M. B... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux, jugeant que la prescription quadriennale était acquise depuis le 1er janvier 1988, a rejeté les conclusions indemnitaires de l'intéressé ainsi que les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Garonne ;

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 1 de la loi susvisée du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat (...), sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la connaissance par la victime de l'existence d'un dommage ne suffit pas à faire courir le délai de la prescription quadriennale ; que ce délai ne peut courir que si la victime est en mesure de connaître l'origine du dommage ou, du moins, dispose d'indications suffisantes selon lesquelles il pourrait être imputable au fait de l'administration ;

3. Considérant que, pour déterminer le point de départ de la prescription quadriennale, la cour administrative d'appel s'est fondée sur une attestation médicale du 28 décembre 1983, établie à l'issue de l'hospitalisation de M. B...et ainsi rédigée : " La pathologie initiale est une poliomyélite antérieure aigue. Les séquelles résiduelles sont actuellement une quadriplégie complète, avec atteinte respiratoire justifiant une ventilation artificielle de durée indéterminée sur plusieurs années " ; que la cour a estimé que cette attestation était " suffisante pour permettre aux parents de M. B... d'affirmer que la poliomyélite dont leur enfant était affecté pouvait être imputable au vaccin dont ils n'ignoraient pas qu'il avait été administré à leur enfant et donc que cette maladie pouvait être imputable au fait de l'administration " ; qu'elle a par ailleurs estimé qu'il résultait de l'instruction qu'à la date du 28 décembre 1983 l'état de santé de l'enfant, alors âgé de trois ans, était consolidé ; qu'elle en a déduit que le délai de la prescription quadriennale avait couru à compter du 1er janvier 1984 ;

4. Considérant que M.B..., qui ne critique pas l'arrêt en tant qu'il fixe la date de la consolidation de son état de santé, est fondé à soutenir que la cour a entaché son arrêt de dénaturation en estimant que l'attestation citée ci-dessus, qui ne comportait aucune indication sur l'origine de la poliomyélite, était suffisante pour permettre à ses parents d'affirmer que cette affection pouvait avoir été causée par la vaccination pratiquée le 1er juin 1979 et d'engager en son nom un recours indemnitaire dirigé contre l'Etat ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 8 février 2011 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., au ministre des affaires sociales et de la santé, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Garonne.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 348249
Date de la décision : 21/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 2013, n° 348249
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Gérald Bégranger
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP ROGER, SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:348249.20131021
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