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07/10/2013 | FRANCE | N°366254

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 07 octobre 2013, 366254


VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 3 avril 1995 par lequel le ministre de l'économie, des finances et du plan lui a concédé une pension de retraite, en tant que cet arrêté ne prend pas en compte la bonification pour enfants mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et d'enjoindre à l'administration de procéder à une nouvelle liquidation de sa pension prenant en compte cette bonification et de lui verser les sommes d

ont il a été privé, assorties des intérêts au taux légal à compter du 27 ...

VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 3 avril 1995 par lequel le ministre de l'économie, des finances et du plan lui a concédé une pension de retraite, en tant que cet arrêté ne prend pas en compte la bonification pour enfants mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et d'enjoindre à l'administration de procéder à une nouvelle liquidation de sa pension prenant en compte cette bonification et de lui verser les sommes dont il a été privé, assorties des intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2003.

Par un jugement n° 1104694 du 20 décembre 2012, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 3 avril 1995 en tant qu'il ne prend pas en compte la bonification mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, enjoint au ministre de l'économie et des finances de modifier les conditions de concession de la pension de M. A...et de revaloriser rétroactivement cette pension à compter du 1er janvier 2007, les sommes ainsi dues portant intérêt au taux légal à compter du 29 novembre 2011, et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 février et 3 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M.A..., représenté par la SCP Laugier, Caston, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 de ce jugement n° 1104694 du tribunal administratif de Nice du 20 décembre 2012 en tant qu'ils enjoignent au ministre de l'économie et des finances de modifier les conditions de concession de sa pension et de la revaloriser rétroactivement à compter du 1er janvier 2007 seulement et décident que les sommes ainsi dues porteront intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2011 seulement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire au droit au surplus des conclusions de sa demande, en enjoignant au ministre de l'économie et des finances de revaloriser sa pension à compter du 1er janvier 1999 et en décidant que les sommes qui lui sont dues porteront intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2003 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2013, le ministre de l'économie et des finances conclut à ce qu'il n'y ait pas lieu de statuer sur le pourvoi de M. A....

Par un mémoire en réplique, enregistré le 4 juillet 2013, M. A... reprend les conclusions de son pourvoi.

Les parties ont été informées, par application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision du Conseil d'Etat était susceptible d'être fondée sur le moyen, relevé d'office, tiré de l'erreur de droit commise par le tribunal administratif de Nice en ne constatant pas que les conclusions de la demande de M. A...tendant à la revalorisation de sa pension à compter du 1er janvier 1999 avaient perdu leur objet du fait de l'intervention de l'arrêté du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat du 5 mars 2012 procédant à une nouvelle liquidation de sa pension de retraite.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus en séance publique :

- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.

La parole a été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Laugier, Caston, avocat de M.A....

CONSIDERANT CE QUI SUIT :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., brigadier-major de police, a été admis au bénéfice d'une pension de retraite par arrêté du 3 avril 1995. Il a adressé, le 27 mars 2003, une demande de révision de sa pension pour qu'il soit tenu compte de la bonification pour enfants prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, qui a été rejetée par l'administration le 17 octobre 2003. Il a ensuite directement saisi la juridiction administrative, le 29 novembre 2011, d'une demande d'annulation de l'arrêté du 3 avril 1995, en tant qu'il ne prenait pas en compte la bonification prévue au b) de l'article L. 12. Par jugement du 20 décembre 2012, le tribunal administratif de Nice a fait droit à la demande d'annulation de cet arrêté mais n'a enjoint à l'administration de revaloriser sa pension, pour tenir compte de la bonification pour enfants, qu'à compter du 1er janvier 2007, avec intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2011. M. A...se pourvoit contre les articles 2, 3 et 4 du jugement en tant que, par ces articles, le tribunal a fixé la date de cette revalorisation au 1er janvier 2007 et non au 1er janvier 1999 et le point de départ du calcul des intérêts au taux légal au 29 novembre 2011 et non au 17 octobre 2003.

Sur le point de départ de la revalorisation de la pension de M.A... :

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, par un arrêté du 5 mars 2012, a procédé à une nouvelle liquidation de la pension de retraite de M.A..., avec effet à la date du 1er janvier 1999, en lui accordant une bonification pour enfants de 2 ans, et que cet arrêté, régulièrement notifié à M.A..., est devenu définitif.

3. Contrairement à ce que soutient le ministre de l'économie et des finances, cet arrêté, qui est antérieur au jugement attaqué, ne rend pas sans objet le pourvoi de M.A....

4. En revanche, compte tenu de l'intervention de l'arrêté du 5 mars 2012, qui était devenu définitif, la demande de M.A..., en tant qu'elle tendait à la revalorisation rétroactive de sa pension à compter du 1er janvier 1999, avait perdu son objet à la date du 20 décembre 2012 à laquelle le tribunal administratif de Nice a statué. Par suite, il y a lieu de relever d'office l'erreur de droit commise par le tribunal, faute pour lui d'avoir fait droit aux conclusions en ce sens du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat et prononcé un non-lieu à statuer. Dès lors, il y a lieu d'annuler, pour ce motif, le jugement attaqué en tant qu'il fixe la date de la revalorisation de la pension au 1er janvier 2007 et non au 1er décembre 1999, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi de M.A..., tirés de l'insuffisante motivation du jugement, de l'erreur de droit commise dans la détermination de la date de revalorisation de sa pension et de la dénaturation des faits de l'espèce.

Sur le point de départ du calcul des intérêts au taux légal :

5. L'arrêté du 5 mars 2012 procédant à une nouvelle liquidation de la pension de retraite de M.A..., avec effet à la date du 1er janvier 1999, antérieurement au jugement attaqué, ne rend en tout état de cause pas sans objet les conclusions du pourvoi dirigées contre ce jugement en tant qu'il fixe au 29 novembre 2011 et non au 17 octobre 2003 le point de départ du calcul des intérêts au taux légal. Par suite, les conclusions du ministre de l'économie et des finances tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce, dans cette mesure, un non-lieu à statuer, doivent être rejetées.

6. Aux termes de l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la quatrième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux quatre années antérieures ".

7. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le courrier de M. A... du 27 mars 2003, qui avait pour objet le versement de la bonification pour enfants et invoquait le caractère discriminatoire de la législation réservant cet avantage aux femmes fonctionnaires et qui précisait ainsi le fondement de sa demande, constituait une " demande de liquidation ou de révision de la pension " telle que définie par l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Dès lors, le tribunal administratif de Nice a commis une erreur de droit en ne retenant pas que la réception de ce courrier par l'administration était de nature à interrompre la prescription de l'article L. 53 et, par suite, devait être regardée comme la date à compter de laquelle M. A... a droit aux intérêts légaux. Il en résulte qu'il y a lieu d'annuler, pour ce motif, le jugement attaqué en tant qu'il fixe le point de départ du calcul des intérêts au taux légal au 29 novembre 2011 et non au 17 octobre 2003, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, dans la mesure de la cassation prononcée.

Sur les conclusions à fin de non-lieu du ministre de l'économie et des finances :

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la revalorisation de la pension de M. A...à laquelle procède l'arrêté du 5 mars 2012 rend sans objet les conclusions de ce dernier tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'économie et des finances de revaloriser sa pension à compter du 1er janvier 1999 pour tenir compte de la bonification prévue par le b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite. En revanche, elle ne prive pas de leur objet les conclusions de M. A...tendant à ce que les sommes qui lui sont dues portent intérêt au taux légal à compter du 17 octobre 2003.

Sur les conclusions de la demande de M. A...relatives au point de départ du calcul des intérêts :

10. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que M. A...a droit aux intérêts au taux légal des sommes qui lui sont dues au titre de la revalorisation de sa pension à compter de la réception par l'administration de sa demande du 27 mars 2003. Par suite, il y a lieu de faire droit à sa demande tendant à ce que le point de départ du calcul de ces intérêts soit fixé au 17 octobre 2003.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A...d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de Nice du 20 décembre 2012 sont annulés en tant qu'ils enjoignent au ministre de l'économie et des finances de modifier les conditions de concession de la pension de M. A...et de la revaloriser rétroactivement à compter du 1er janvier 2007 et non du 1er janvier 1999 et décident que les sommes qui lui sont dues porteront intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2011 et non du 17 octobre 2003.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A...tendant à la revalorisation de sa pension de retraite.

Article 3 : Les sommes dues à M. A...au titre de la revalorisation de sa pension de retraite à compter du 1er janvier 1999 pour prendre en compte la bonification prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite porteront intérêt à compter du 17 octobre 2003.

Article 4 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 366254
Date de la décision : 07/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 2013, n° 366254
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rémi Decout-Paolini
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:366254.20131007
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