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07/10/2013 | FRANCE | N°364170

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 07 octobre 2013, 364170


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 novembre 2012 et 28 février 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1101661 du 25 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 février 2011 par laquelle le ministre de la défense et des anciens combattants a fait partiellement droit à sa demande tendant au versement de l'indemnité pour

charges militaires au taux particulier n° 1 et, d'autre part, à ce qu'...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 novembre 2012 et 28 février 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1101661 du 25 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 février 2011 par laquelle le ministre de la défense et des anciens combattants a fait partiellement droit à sa demande tendant au versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui octroyer l'indemnité pour charges militaires au taux sollicité à compter du 17 novembre 2008 et d'en tirer les conséquences en matière d'accessoires dans un délai d'un mois, ou, à défaut, à ce qu'il soit enjoint au ministre, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de procéder à un nouvel examen de sa demande dans le délai d'un mois ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 ;

Vu le décret n° 59-1193 du 13 octobre 1959 modifié notamment par le décret n° 2011-38 du 10 janvier 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Natacha Chicot, Auditeur,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Blanc, Rousseau, avocat de M. B...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires : " L'indemnité représentative de frais dite indemnité pour charges militaires est attribuée aux officiers et militaires non officiers à solde mensuelle, ainsi qu'aux volontaires dans les armées, pour tenir compte des diverses sujétions spécifiquement militaires, et notamment de la fréquence des mutations d'office. (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 3 du même décret, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 10 janvier 2011 relatif à la prise en compte du pacte civil de solidarité dans le régime indemnitaire des militaires et modifiant diverses dispositions relatives à la délégation de solde des militaires : " Sous réserve du quatrième alinéa du présent article, les militaires mariés ou ayant un ou deux enfants à charge (...) peuvent bénéficier en plus du taux de base d'un taux particulier correspondant à cette situation de famille " ; qu'aux termes de l'article 5 du même texte : " L'indemnité pour charges militaires est soumise aux règles d'allocation de la solde et perçue dans les mêmes conditions. / Elle est payée mensuellement et à terme échu. / L'indemnité se décompte par mois, à raison de la douzième partie de la fixation annuelle, et par jour, à raison de la trois cent soixantième partie de la même fixation " ; que le décret du 10 janvier 2011 a ouvert aux militaires liés par un pacte civil de solidarité, conclu depuis au moins deux ans, le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 applicable aux militaires mariés ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B..., militaire entré au service le 17 novembre 2008, avait conclu un pacte civil de solidarité le 16 juillet 2008 ; que, par lettre du 31 août 2010, il a demandé à bénéficier de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 applicable aux militaires mariés à compter de la date de son entrée au service ; que, par une décision du 25 février 2011, le ministre de la défense et des anciens combattants, après avis de la commission des recours des militaires, a partiellement fait droit à son recours formé le 9 novembre 2011 contre la décision implicite de rejet opposée à sa demande, en lui accordant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter du 13 janvier 2011, date d'entrée en vigueur du décret du 10 janvier 2011, qui accorde le bénéfice de cette indemnité aux militaires ayant conclu un pacte civil de solidarité depuis au moins deux ans ; que M. B...se pourvoit en cassation contre le jugement par lequel le tribunal administratif d'Orléans a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 février 2011 en tant qu'elle ne lui accorde pas cette indemnité entre le 17 novembre 2008 et le 13 janvier 2011 ;

3. Considérant que pour rejeter la demande présentée par M.B..., le tribunal administratif d'Orléans a considéré que le ministre pouvait, pour refuser au requérant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 sur la période comprise entre le 17 novembre 2008 et le 13 janvier 2011, faire une application rétroactive des dispositions de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959, dans leur rédaction issue du décret du 10 janvier 2011 et entrées en vigueur le 13 janvier 2011 ; qu'en statuant ainsi, alors que les règles régissant l'attribution d'une indemnité versée mensuellement en même temps que la rémunération sont celles en vigueur durant la période au titre de laquelle le versement est demandé, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; qu'il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que M. B...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond au titre des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu'il ressort de l'argumentation de sa demande que M. B...ne conteste la décision du 25 février 2011 qu'en tant qu'elle lui refuse le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter du 17 novembre 2008 ;

6. Considérant qu'eu égard à l'objet poursuivi par le décret du 13 octobre 1959, le ministre de la défense et des anciens combattants était tenu de tirer les conséquences réglementaires de la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité dans un délai raisonnable ; qu'entre le 17 novembre 2008, date de l'entrée au service de M.B..., qui était alors déjà lié par un pacte civil de solidarité, et le 13 janvier 2011, date de l'entrée en vigueur du décret du 10 janvier 2011 précité, les dispositions du deuxième alinéa de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959, seules applicables à l'espèce, ainsi qu'il a été dit, qui n'avaient pas encore été modifiées en application de la loi, étaient devenues illégales ; que, par suite, le ministre de la défense et des anciens combattants ne pouvait légalement s'appuyer sur ces dispositions pour rejeter la demande de M. B... ; qu'il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, que la décision attaquée doit être annulée en tant qu'elle a refusé à M. B... le versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter du 17 novembre 2008 ;

7. Considérant que l'annulation de la décision attaquée implique nécessairement l'octroi, à M.B..., de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter de la date de son entrée en service, soit le 17 novembre 2008, compte tenu de l'absence, d'une part, de toute différenciation légale entre les militaires mariés et les militaires liés par un pacte civil de solidarité durant la période litigieuse et, d'autre part, d'éléments produits par le ministre de la défense susceptibles de fonder le rejet de la demande de M. B... ; qu'il y a lieu, par suite, pour le Conseil d'Etat d'ordonner que l'Etat procède au versement à M. B...des sommes correspondantes dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 400 euros à verser à M.B..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, tant devant le tribunal administratif d'Orléans que devant le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date en 25 septembre 2012 est annulé.

Article 2 : La décision du ministre de la défense et des anciens combattants en date du 25 février 2011 est annulée en tant qu'elle a refusé à M. B...le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter du 17 novembre 2008.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de la défense de procéder au versement, au bénéfice de M. B..., de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter du 17 novembre 2008, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. B... est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à M. B...la somme de 3 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, tant devant le tribunal administratif d'Orléans que devant le Conseil d'Etat.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. A... B...et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 364170
Date de la décision : 07/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 2013, n° 364170
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Natacha Chicot
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP BLANC, ROUSSEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:364170.20131007
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