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25/07/2013 | FRANCE | N°366476

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 25 juillet 2013, 366476


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 février et 28 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Regourd Aviation, dont le siège est 22, avenue Georges V à Paris (75008), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société Regourd Aviation demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA02429 du 28 décembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1102360 du 11 avril 2012 du tribunal admi

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 février et 28 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Regourd Aviation, dont le siège est 22, avenue Georges V à Paris (75008), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société Regourd Aviation demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA02429 du 28 décembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1102360 du 11 avril 2012 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2005 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Blondel, avocat de la société Regourd Aviation ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'État fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux " ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant qu'aux termes du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1998 de finances pour 1999, applicable au litige : " 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. (...) / Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens, visés au a du 1° de l'article 1467, pris en location par un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de six mois ou des redevances afférentes à ces biens résultant d'une convention de location-gérance, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion. / Lorsqu'en application du deuxième alinéa sont exclus des consommations de biens et services en provenance de tiers les loyers ou redevances que verse le preneur, les amortissements visés au 2° du 1 de l'article 39, autres que ceux comptabilisés en amortissements dérogatoires et se rapportant aux biens loués, sont déduits de la valeur ajoutée du bailleur (...) " ; que les biens visés au a du 1° de l'article 1467 du code sont les " immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle " ; que la société Regourd Aviation soutient qu'en interdisant toute déduction des loyers afférents à des biens pris en crédit-bail pour la détermination de la valeur ajoutée servant au calcul du plafonnement de la taxe professionnelle, les dispositions précitées du 2 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts créent une discrimination au détriment des crédit-preneurs de biens qu'ils sous-louent par rapport aux locataires de biens sous-loués qui sont en droit de déduire les loyers qu'ils versent aux propriétaires et aux propriétaires qui sont en droit d'amortir les biens qu'ils possèdent et qu'elles méconnaissent, par suite, le principe d'égalité qui découle de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

4. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit ;

5. Considérant qu'un crédit-preneur et un locataire de longue durée ne peuvent être regardés comme étant dans une situation juridiquement et économiquement analogue et, par suite, comparable, dès lors que, pour le premier, le loyer versé a pour contrepartie non seulement la disposition du bien mais aussi le droit d'opter pour son acquisition au terme du crédit, constituant ainsi une modalité de financement du bien alors que, pour le second, le loyer a pour seule contrepartie la disposition du bien mais ne permet pas d'acquérir un élément de patrimoine ; qu'un crédit-preneur et un propriétaire ne se trouvent pas davantage dans une situation analogue dès lors que le crédit-preneur ne devient, le cas échéant, propriétaire du bien objet du crédit-bail qu'à la fin de ce contrat et que le loyer versé correspond, pour partie, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à la seule disposition du bien ; que, par suite, le législateur a pu, sans méconnaître le principe d'égalité découlant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, interdire la déduction des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail tout en autorisant la déduction des loyers afférents à des biens, dont le redevable n'a pas eu la disposition, pris en location pour une durée de plus de six mois et, sous certaines conditions, des amortissements pratiqués par le redevable propriétaire de biens donnés en location ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que le 2 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être regardé comme non sérieux ;

Sur l'autre moyen du pourvoi :

7. Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, la société Regourd Aviation soutient, en outre, que la cour a commis une erreur de droit en écartant comme inopérant le moyen tiré de ce que l'instruction ministérielle 6 E-1-00 du 30 décembre 1999 relative à la taxe professionnelle présenterait un caractère discriminatoire ;

8. Considérant que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Regourd Aviation.

Article 2 : Le pourvoi de la société Regourd Aviation n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Regourd Aviation et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 366476
Date de la décision : 25/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 25 jui. 2013, n° 366476
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Matt
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : BLONDEL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:366476.20130725
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