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03/06/2013 | FRANCE | N°360027

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 03 juin 2013, 360027


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le syndicat national des antiquaires (SNA), dont le siège est 17, boulevard Malesherbes à Paris (75008), représenté par son président ; le syndicat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande du 2 février 2012 tendant à la suppression, au deuxième alinéa de l'article R. 382-17 du code de la sécurité sociale, des mots : " toutes taxes comprises " ;

2°) d

'enjoindre au Premier ministre de supprimer les mots litigieux ;

3°) de mettre à...

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le syndicat national des antiquaires (SNA), dont le siège est 17, boulevard Malesherbes à Paris (75008), représenté par son président ; le syndicat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande du 2 février 2012 tendant à la suppression, au deuxième alinéa de l'article R. 382-17 du code de la sécurité sociale, des mots : " toutes taxes comprises " ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de supprimer les mots litigieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté interministériel du 13 avril 1981 fixant le taux de la contribution instituée à l'article L. 382-4 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lesourd, avocat du syndicat national des antiquaires ;

1. Considérant que, ainsi que le prévoit d'ailleurs l'article 16-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ; que le syndicat national des antiquaires a demandé au Premier ministre, par lettre du 2 février 2012, la suppression des mots " toutes taxes comprises ", issus du décret du 25 octobre 1977, figurant au deuxième alinéa de l'article R. 382-17 du code de la sécurité sociale relatif à l'assiette de la contribution versée au régime général de sécurité sociale par les personnes qui procèdent, par ventes au public, à la diffusion ou à l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes, vivants ou morts, auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques ; que le Premier ministre n'ayant pas donné suite à cette demande dans un délai de deux mois, il en est résulté une décision implicite de rejet dont le syndicat national des antiquaires demande l'annulation pour excès de pouvoir ;

2. Considérant que les artistes auteurs d'oeuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques, ainsi que photographiques, sont affiliés obligatoirement au régime général de sécurité sociale pour les assurances sociales et bénéficient des prestations familiales dans les mêmes conditions que les salariés ; qu'aux termes de l'article L. 382-4 du code de la sécurité sociale : " Le financement des charges incombant aux employeurs au titre de ces assurances et prestations sociales est assuré par le versement d'une contribution par toute personne physique ou morale, y compris l'Etat et les autres collectivités publiques, qui procède, à titre principal ou à titre accessoire, à la diffusion ou à l'exploitation commerciale d'oeuvres originales (...). / Cette contribution est calculée sur un barème tenant compte soit du chiffre d'affaires réalisé par ces personnes à raison de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes, vivants ou morts, auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques, soit des sommes qu'elles versent à titre de droit d'auteur aux artistes ou organismes percevant ces sommes pour leur compte, à l'occasion de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes, vivants ou morts, auteurs d'oeuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 382-17 du même code : " (...) La contribution due à l'occasion de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes, vivants ou morts, auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques, est calculée en pourcentage, soit du chiffre d'affaires, toutes taxes comprises, afférent à cette diffusion ou à cette exploitation, même lorsque les oeuvres sont tombées dans le domaine public, soit, lorsque l'oeuvre n'est pas vendue au public, du montant de la rémunération brute de l'artiste auteur. / Pour la détermination du chiffre d'affaires mentionné à l'alinéa précédent, il est tenu compte de 30 % du prix de vente des oeuvres et, en cas de vente à la commission, du montant de la commission. (...) " ; que dans sa rédaction issue de l'arrêté du 29 juin 2007, l'arrêté du 13 avril 1981 fixe à 1 % du montant du chiffre d'affaires réalisé à l'occasion de la diffusion ou de l'exploitation commerciale d'oeuvres graphiques ou plastiques, le taux de la contribution instituée à l'article L. 382-4 précité ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'en prévoyant la possibilité de calculer la contribution due par certains diffuseurs des oeuvres des artistes auteurs selon un barème " tenant compte " du chiffre d'affaires, le législateur a permis au pouvoir réglementaire de déterminer cette contribution au regard du chiffre d'affaires " toutes taxes comprises " ; que le moyen tiré de ce que le décret méconnaîtrait l'article 34 de la Constitution ne peut, par suite, qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le choix de retenir pour assiette le chiffre d'affaires " toutes taxes comprises " afférent à la diffusion ou à l'exploitation commerciale des oeuvres graphiques ou plastiques, au demeurant déterminé en tenant compte de 30 % du prix de vente des oeuvres ou, en cas de vente à la commission, du montant de la commission, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'eu égard aux modalités particulières, définies par le législateur et formant un ensemble indissociable, de l'affiliation des artistes auteurs au régime général de sécurité sociale et du financement des charges résultant de cette affiliation, le syndicat requérant ne peut utilement invoquer à l'encontre de la disposition réglementaire critiquée une méconnaissance du principe d'égalité entre personnes assujetties à la contribution litigieuse et employeurs de personnels salariés ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que les personnes qui procèdent à la diffusion ou à l'exploitation commerciale, par ventes au public, des oeuvres graphiques et plastiques des artistes auteurs sont dans une situation différente de celles qui conservent ces oeuvres et dont la contribution au régime de sécurité sociale est assise sur le montant de la rémunération brute de l'artiste auteur ; que le syndicat requérant n'établit pas que ces modalités différentes de détermination de la contribution, qui reposent sur un critère objectif en rapport avec l'objet de la mesure, présenteraient un caractère disproportionné ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention doit être écarté ; que, de même, aucune rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ne résultant de la disposition réglementaire litigieuse, ne peut qu'être écarté le moyen tiré de la méconnaissance du principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre des affaires sociales et de la santé, que le syndicat national des antiquaires n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque ; que ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article

L. 761-1 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du syndicat national des antiquaires est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national des antiquaires et à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 360027
Date de la décision : 03/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2013, n° 360027
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rémi Decout-Paolini
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP LESOURD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:360027.20130603
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