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15/05/2013 | FRANCE | N°357192

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 15 mai 2013, 357192


Vu la requête, enregistrée le 28 février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association France Nature Environnement, dont le siège est 10, rue Barbier au Mans (72000), représentée par l'un de ses administrateurs mandaté à cet effet ; l'association France Nature Environnement demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-2019 du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements, en tant qu'il définit le tableau annexé à l'article R.122-2 du

code de l'environnement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versemen...

Vu la requête, enregistrée le 28 février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association France Nature Environnement, dont le siège est 10, rue Barbier au Mans (72000), représentée par l'un de ses administrateurs mandaté à cet effet ; l'association France Nature Environnement demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-2019 du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements, en tant qu'il définit le tableau annexé à l'article R.122-2 du code de l'environnement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 avril 2013, présentée par l'association France Nature Environnement ;

Vu la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985, modifiée par les directives 97/11/CE du Conseil du 3 mars 1997 et 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 ;

Vu la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;

Vu l'arrêté du 8 décembre 2000 de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement portant création du Conseil national du paysage ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 8 décembre 2000 de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement portant création du Conseil national du paysage : " (...) La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement peut en outre consulter le Conseil national du paysage sur des projets de textes législatifs et réglementaires ayant une incidence sur les paysages (...) " ; qu'en tout état de cause, cet arrêté, qui se borne à ouvrir la faculté de consulter le Conseil national du paysage, n'avait pas pour effet d'imposer la consultation de cet organisme préalablement à l'édiction du décret attaqué ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 2 de la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué, les États membres doivent prendre les dispositions nécessaires pour que les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure d'autorisation et à une évaluation de leurs incidences sur l'environnement ; qu'il résulte de l'article 4 de cette même directive que les projets énumérés à son annexe I sont systématiquement soumis à une telle évaluation et que, pour les projets énumérés à l'annexe II, les Etats membres déterminent, en tenant compte des critères de sélection pertinents fixés à l'annexe III, sur la base d'un examen au cas par cas ou sur la base des seuils ou critères qu'ils fixent, si le projet doit être soumis à une évaluation environnementale ; que l'annexe III retient notamment comme critères les caractéristiques des projets et leur impact potentiel, ainsi que leur localisation, appréciée du point de vue de la sensibilité environnementale ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'un Etat membre fixe des seuils et des critères, y compris pour déterminer la liste des projets relevant de l'annexe II qui doivent faire l'objet d'un examen au cas par cas aux fins de déterminer si l'impact qu'ils sont susceptibles de provoquer sur l'environnement justifie une évaluation préalable, dès lors que la totalité des projets exclus peut être considérée, sur la base d'une appréciation globale, comme n'étant pas susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement : " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. / Ces projets sont soumis à étude d'impact en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. / Pour la fixation de ces critères et seuils et pour la détermination des projets relevant d'un examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à l'annexe III à la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement " ;

4. Considérant que l'article R. 122-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret attaqué, dispose que : " I - Les travaux, ouvrages ou aménagements énumérés dans le tableau annexé au présent article sont soumis à une étude d'impact, soit de façon systématique, soit après un examen au cas par cas, en fonction des critères précisés dans ce tableau " ; qu'il ressort du tableau annexé à cet article, dans sa rédaction issue du même décret, que l'ensemble des projets relevant des catégories de l'annexe II de la directive sont soumis à une étude d'impact, soit de façon systématique, soit après un examen au cas par cas, en fonction de seuils et de critères définis dans le tableau, conformes aux critères énoncés à l'annexe III de la directive ; que, contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance que les projets qui ne sont pas mentionnés dans le tableau annexé à l'article R. 122-2 ne sont assujettis ni à une étude d'impact systématique ni à un examen au cas par cas ne saurait faire regarder le décret comme contraire aux exigences de la directive du 27 juin 1985, dès lors que les projets dispensés de toute étude d'impact compte tenu des seuils et critères définis dans le tableau peuvent être considérés comme n'étant pas susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement au sens de l'article 2 de la directive ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code rural et de la pêche maritime : " (...) Les différents modes d'aménagement foncier rural sont les suivants : / 1° L'aménagement foncier agricole et forestier régi par les articles L. 123-1 à L. 123-35 ; /2° Les échanges et cessions amiables d'immeubles ruraux régis par les articles L. 124-1 à L. 124-13 ; /3° La mise en valeur des terres incultes régie par les articles L. 125-1 à L. 125-15 et L. 128-3 à L. 128-12, et la réglementation et la protection des boisements régies par les articles L. 126-1 à L. 126-5. (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que, contrairement à ce que prétend l'association requérante, l'aménagement foncier agricole et forestier, d'une part, et les échanges et cessions amiables d'immeubles, d'autre part, ne constituent pas des opérations de même nature ; qu'il ne résulte ni de ces dispositions, issues de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, ni des dispositions législatives auxquelles elles renvoient, que les projets d'échanges et cessions amiables d'immeubles ruraux s'accompagneraient de travaux connexes, dont peuvent en revanche être assortis les aménagements fonciers agricoles et forestiers visés au 1° de l'article L. 121-1 ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que le décret aurait, en ne soumettant pas les projets d'échanges et cessions amiables d'immeubles ruraux à la réalisation d'une étude d'impact de façon systématique ou, à tout le moins après un examen au cas par cas, méconnu l'article 4 de la directive du 27 juin 1985 et le a) du 1° de son annexe II, doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association France Nature Environnement n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'association France Nature Environnement est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association France Nature Environnement, au Premier ministre et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 357192
Date de la décision : 15/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 mai. 2013, n° 357192
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:357192.20130515
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