La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/01/2013 | FRANCE | N°339918

France | France, Conseil d'État, 6ème / 1ère ssr, 30 janvier 2013, 339918


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mai et 24 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant...,; M. A...demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08LY01531 du 8 avril 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0601363 du 30 avril 2008 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 582 518,82 euros en réparation

des préjudices matériel et moral résultant de l'abattage des sangliers d...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mai et 24 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant...,; M. A...demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08LY01531 du 8 avril 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0601363 du 30 avril 2008 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 582 518,82 euros en réparation des préjudices matériel et moral résultant de l'abattage des sangliers de son élevage ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Chaubon, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Blanc, Rousseau, avocat de M.A...,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Blanc, Rousseau, avocat de M. A... ;

1. Considérant qu'en principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain ; que la responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment ;

2. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, par un arrêté du 11 octobre 2000, le préfet du Puy-de-Dôme a ordonné l'abattage des sangliers présents dans un établissement d'élevage exploité par M. A...sans autorisation ; que, par un arrêt du 15 décembre 2005 qui a fait l'objet d'un pourvoi rejeté par une décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, du 6 juillet 2007, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé cet arrêté au motif que la décision de détruire ce cheptel n'était pas justifiée ; que, pour rejeter l'appel formé par M. A...contre le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand refusant de condamner l'Etat à réparer les préjudices subis à raison de l'abattage ordonné par l'arrêté du 11 octobre 2000, la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir relevé qu'il n'était pas contesté que M. A...exploitait sans autorisation un élevage en espace clos de sangliers et que le requérant se trouvait ainsi dans une situation irrégulière, a estimé que les préjudices dont l'intéressé demandait réparation étaient en lien direct avec l'illégalité de l'existence de cette exploitation et que, par suite, ces préjudices ne pouvaient ouvrir droit à réparation ;

3. Considérant qu'en refusant ainsi à M. A...tout droit à indemnisation, sans distinguer entre les préjudices dont l'intéressé demandait réparation, alors qu'au nombre de ces préjudices figurait celui correspondant à la destruction totale de son cheptel et qu'elle avait jugé, pour annuler l'arrêté préfectoral du 11 octobre 2000, que cette destruction n'était pas justifiée, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que, par suite, M. A...est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros à M. A...au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 8 avril 2010 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.


Synthèse
Formation : 6ème / 1ère ssr
Numéro d'arrêt : 339918
Date de la décision : 30/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITÉ - RESPONSABILITÉ ET ILLÉGALITÉ - 1) PRINCIPE - ILLÉGALITÉ CONSTITUANT UNE FAUTE SUSCEPTIBLE D'ENGAGER LA RESPONSABILITÉ DE L'ADMINISTRATION - CONDITIONS - EXISTENCE D'UN PRÉJUDICE DIRECT ET CERTAIN - CONSÉQUENCE - RESPONSABILITÉ NON ENGAGÉE DANS LE CAS OÙ LES DOMMAGES INVOQUÉS DÉCOULENT DIRECTEMENT ET EXCLUSIVEMENT DE LA SITUATION IRRÉGULIÈRE DANS LAQUELLE LA VICTIME S'EST ELLE-MÊME PLACÉE - 2) ESPÈCE - ABATTAGE TOTAL PAR L'ADMINISTRATION D'UN CHEPTEL DE SANGLIERS ÉLEVÉS SANS AUTORISATION.

60-01-04 1) En principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain. La responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment.,,2) En l'espèce, une cour commet une erreur de droit en refusant tout droit à indemnisation à un requérant dont le cheptel de sangliers qu'il élevait sans autorisation avait été abattu sans distinguer entre les préjudices dont l'intéressé demandait réparation, alors qu'au nombre de ces préjudices figurait celui correspondant à la destruction totale de son cheptel et qu'elle avait jugé que cette destruction n'était pas justifiée.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RÉPARATION - PRÉJUDICE - CARACTÈRE INDEMNISABLE DU PRÉJUDICE - QUESTIONS DIVERSES - SITUATION EXCLUANT INDEMNITÉ - ILLÉGALITÉ CONSTITUANT UNE FAUTE SUSCEPTIBLE D'ENGAGER LA RESPONSABILITÉ DE L'ADMINISTRATION - PRINCIPE - CONDITIONS - EXISTENCE D'UN PRÉJUDICE DIRECT ET CERTAIN - CONSÉQUENCE - RESPONSABILITÉ NON ENGAGÉE DANS LE CAS OÙ LES DOMMAGES INVOQUÉS DÉCOULENT DIRECTEMENT ET EXCLUSIVEMENT DE LA SITUATION IRRÉGULIÈRE DANS LAQUELLE LA VICTIME S'EST ELLE-MÊME PLACÉE.

60-04-01-04-02 En principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain. La responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2013, n° 339918
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pierre Chaubon
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP BLANC, ROUSSEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:339918.20130130
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award