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28/12/2012 | FRANCE | N°346811

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 28 décembre 2012, 346811


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 février et 18 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société TST George V, dont le siège est 49/51 avenue George V à Paris (75008) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0714576-0811467-1007107 du 29 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2008, à r

aison d'un immeuble dont elle est propriétaire et situé 49/51, avenue George V ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 février et 18 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société TST George V, dont le siège est 49/51 avenue George V à Paris (75008) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0714576-0811467-1007107 du 29 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2008, à raison d'un immeuble dont elle est propriétaire et situé 49/51, avenue George V à Paris (75008) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat de la Société TST George V,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Didier, Pinet, avocat de la Société TST George V ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumises aux juges du fond que la société TST George V a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2005 à 2008 à raison de locaux à usage de banque, de restaurant et de bureaux dont elle est propriétaire rue George V à Paris (8ème) ; qu'elle se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 29 décembre 2010 qui a rejeté sa demande ainsi que les réclamations transmises d'office par l'administration en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, tendant à la réduction de ces impositions ;

Sur les locaux à usage de banque :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, la valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : " 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, (...) la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date ; / soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; " ; qu'aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III à ce code : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire (...) est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance. " ; qu'aux termes de l'article 324 Z de la même annexe : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. / II. Les types dont il s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune visés aux articles 324 Y à 324 AC, au regard de l'affectation, de la situation, de la nature, de la construction, de son importance, de son état d'entretien et de son aménagement. / Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision. " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque, pour arrêter la valeur locative de l'immeuble à évaluer, l'administration, faisant application de la méthode par comparaison, retient valablement un local-type inscrit au procès-verbal des opérations de révision foncière d'une commune, il lui appartient, par application du coefficient prévu à l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, d'ajuster la valeur locative afin de tenir compte des différences entre le terme de comparaison et l'immeuble à évaluer ; qu'ainsi qu'en convient le ministre en défense, aucune disposition ne prévoit que, pour la mise en oeuvre de cet article, des " valeurs locatives encadrantes " puissent être inscrites sur ce procès-verbal afin d'assurer la représentativité du local-type retenu par rapport au marché locatif existant au 1er janvier 1970, date de référence à prendre en l'espèce en compte pour la détermination de la valeur locative en application de l'article 324 AK de l'annexe III au même code ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, conformément à la proposition de la société TST George V, l'administration a retenu, pour l'évaluation des locaux à usage de banque, le local-type n° 25 du procès-verbal des opérations de révision foncière du secteur des Champs-Élysées à Paris ; que le tribunal administratif a relevé que l'administration n'avait pas pris en compte la valeur locative de 73,63 euros le m² de ce terme de comparaison mais avait retenu la " valeur encadrante supérieure " fixée à 88,27 euros le m², mentionnée sur ce procès-verbal, soit une somme supérieure de 20 % à la première ; qu'en jugeant que l'administration avait pu, en application des dispositions combinées du 2° de l'article 1498 du code général des impôts et de l'article 324 AA de l'annexe III à ce code, utiliser dans son principe une " valeur locative encadrante " afin de tenir compte des différences constatées entre le local-type et l'immeuble à évaluer, le tribunal a commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la société TST George V est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il concerne les locaux à usage de banque ;

Sur les locaux à usage de restaurant :

5. Considérant que la société TST George V a fait valoir, dans son mémoire enregistré le 27 mai 2008 devant le tribunal administratif, que la valeur locative des locaux à usage de restaurant en litige devait être ajustée à la baisse dans une proportion de 20 % par rapport à celle du local-type n° 318 du même procès-verbal des opérations de révision foncière, retenu comme terme de comparaison par l'administration, eu égard aux différences de situation entre ces deux immeubles ; que le tribunal a omis de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, par suite, la société requérante est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il concerne les locaux à usage de restaurant ;

Sur les locaux à usage de bureaux :

6. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, s'agissant des locaux à usage de bureaux, la société TST George V n'a pas contesté devant le tribunal les caractéristiques du local-type n° 196 inscrit au même procès-verbal des opérations de révision foncière et que l'administration a retenu comme terme de comparaison ; qu'elle s'est bornée à soutenir que l'administration avait retenu le tarif le plus élevé de la zone de commercialité et que le choix du local-type n° 306 aurait été plus pertinent, sans assortir cette proposition d'éléments précis ; qu'après avoir relevé que le terme de comparaison était situé sur la même avenue que ces locaux et que leur superficie était comparable par niveau, le tribunal n'a pas, eu égard à l'argumentation dont il était saisi, commis d'erreur de droit en jugeant que la société n'apportait aucun élément de nature à critiquer utilement ce terme de comparaison et en n'examinant pas la pertinence du local-type que la société proposait ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société TST George V est seulement fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il statue sur les litiges relatifs aux cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2008 à raison des locaux à usage de banque et de restaurant ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société TST George V au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 29 décembre 2010 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il statue sur les litiges relatifs aux cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles la société TST George V a été assujettie au titre des années 2005 à 2008 à raison des locaux à usage de banque et de restaurant.

Article 2 : L'affaire est, dans la limite mentionnée à l'article 1er, renvoyée au tribunal administratif de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la société TST George V la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société TST George V est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société TST George V et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 346811
Date de la décision : 28/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - QUESTIONS COMMUNES - VALEUR LOCATIVE DES BIENS - LOCAUX COMMERCIAUX - EVALUATION - MÉTHODE PAR COMPARAISON (ART - 1498 - 2° DU CGI) - PRISE EN COMPTE DES DIFFÉRENCES ENTRE LE TERME DE COMPARAISON ET L'IMMEUBLE À ÉVALUER - MODALITÉS - AJUSTEMENT DE LA VALEUR LOCATIVE PAR APPLICATION DU COEFFICIENT PRÉVU À L'ARTICLE 324 AA DE L'ANNEXE III AU CGI - EXISTENCE - POSSIBILITÉ D'INSCRIRE SUR LE PROCÈS-VERBAL DES VALEURS LOCATIVES ENCADRANTES AFIN D'ASSURER LA REPRÉSENTATIVITÉ DU LOCAL-TYPE RETENU PAR RAPPORT AU MARCHÉ LOCATIF EXISTANT AU 1ER JANVIER 1970 - ABSENCE.

19-03-01-02 Lorsque, pour arrêter la valeur locative de l'immeuble commercial à évaluer, l'administration, faisant application de la méthode par comparaison, retient valablement un local-type inscrit au procès-verbal des opérations de révision foncière d'une commune, il lui appartient, par application du coefficient prévu à l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts (CGI), d'ajuster la valeur locative afin de tenir compte des différences entre le terme de comparaison et l'immeuble à évaluer. Aucune disposition ne prévoit que, pour la mise en oeuvre de cet article, des valeurs locatives encadrantes puissent être inscrites sur ce procès-verbal afin d'assurer la représentativité du local-type retenu par rapport au marché locatif existant au 1er janvier 1970, date de référence à prendre en l'espèce en compte pour la détermination de la valeur locative en application de l'article 324 AK de l'annexe III au même code. Dès lors, l'administration ne peut, pour la mise en oeuvre des dispositions combinées du 2° de l'article 1498 du CGI et de l'article 324 AA de l'annexe III à ce code, utiliser dans son principe une valeur locative encadrante afin de tenir compte des différences constatées entre le local-type et l'immeuble à évaluer.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXES FONCIÈRES - TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES - VALEUR LOCATIVE DES LOCAUX COMMERCIAUX - EVALUATION - MÉTHODE PAR COMPARAISON (ART - 1498 - 2° DU CGI) - PRISE EN COMPTE DES DIFFÉRENCES ENTRE LE TERME DE COMPARAISON ET L'IMMEUBLE À ÉVALUER - MODALITÉS - AJUSTEMENT DE LA VALEUR LOCATIVE PAR APPLICATION DU COEFFICIENT PRÉVU À L'ARTICLE 324 AA DE L'ANNEXE III AU CGI - EXISTENCE - POSSIBILITÉ D'INSCRIRE SUR LE PROCÈS-VERBAL DES VALEURS LOCATIVES ENCADRANTES AFIN D'ASSURER LA REPRÉSENTATIVITÉ DU LOCAL-TYPE RETENU PAR RAPPORT AU MARCHÉ LOCATIF EXISTANT AU 1ER JANVIER 1970 - ABSENCE.

19-03-03-01-03 Lorsque, pour arrêter la valeur locative de l'immeuble commercial à évaluer, l'administration, faisant application de la méthode par comparaison, retient valablement un local-type inscrit au procès-verbal des opérations de révision foncière d'une commune, il lui appartient, par application du coefficient prévu à l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts (CGI), d'ajuster la valeur locative afin de tenir compte des différences entre le terme de comparaison et l'immeuble à évaluer. Aucune disposition ne prévoit que, pour la mise en oeuvre de cet article, des valeurs locatives encadrantes puissent être inscrites sur ce procès-verbal afin d'assurer la représentativité du local-type retenu par rapport au marché locatif existant au 1er janvier 1970, date de référence à prendre en l'espèce en compte pour la détermination de la valeur locative en application de l'article 324 AK de l'annexe III au même code. Dès lors, l'administration ne peut, pour la mise en oeuvre des dispositions combinées du 2° de l'article 1498 du CGI et de l'article 324 AA de l'annexe III à ce code, utiliser dans son principe une valeur locative encadrante afin de tenir compte des différences constatées entre le local-type et l'immeuble à évaluer.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2012, n° 346811
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:346811.20121228
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