Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 3 août et le 3 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Thierry B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX01379-10BX01461 du 3 mai 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, d'une part, annulé le jugement n° 0700756 du 25 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis a condamné solidairement la commune de Saint-Leu et le service départemental d'incendie et de secours de La Réunion à lui verser une somme de 13 905 euros en réparation de ses préjudices résultant de l'incendie survenu le 4 octobre 2005 et, d'autre part, rejeté sa demande ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours de La Réunion et de la commune de Saint-Leu la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christian Fournier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. B, de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat du service départemental d'incendie et de secours de La Réunion et de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de commune de Saint-Leu,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. B, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat du service départemental d'incendie et de secours de La Réunion et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de commune de Saint-Leu ;
1. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le 4 octobre 2005, vers 13h, un incendie s'est déclaré sur le territoire de la commune de Saint-Leu, près d'une route départementale (D11) et d'une zone d'habitation ; que le centre de secours de Saint-Leu a été informé de l'incendie le 4 octobre 2005 à 13h16 ; que le premier véhicule de secours est intervenu sur le feu, initialement localisé près de la déchetterie située CD 11 à Saint-Leu, à 13h28, soit 12 minutes après le signalement ; que face à l'étendue du sinistre et compte tenu de la propagation très rapide des flammes, les secours ont alors protégé en priorité un lotissement et la route nationale, afin d'éviter des accidents automobiles ; qu'à 14h14, un pompier effectuant une reconnaissance vers la rue Agénor a constaté que le feu se propageait vers le champ de canne à sucre appartenant à M. B, exploitant agricole à Saint-Leu, et des habitations, mais sans menace immédiate, et a demandé le renfort de deux engins qui n'ont pu être immédiatement dépêchés à cet endroit en raison de ce que plusieurs feux s'étaient déclarés dans le secteur sud-ouest ; qu'à 14h30, un lieutenant de sapeur-pompier a demandé un véhicule pour protéger une maison menacée rue Agénor ; qu'un véhicule du centre de Saint-Leu, désigné pour cette mission, a alors dû procéder au remplissage de sa réserve d'eau avant de se rendre sur les lieux ; qu'à 14h38, il a été signalé que ce véhicule était affecté d'une fuite d'eau importante et que le véhicule du centre de La Saline les Bains était également indisponible en raison d'une panne mécanique ; qu'à 14h42, un autre véhicule, appartenant au centre des Avirons, est arrivé sur les lieux et a procédé à la protection des maisons de la rue Agénor, avant d'intervenir dans l'exploitation du requérant ; que l'incendie a détruit des hectares de cultures de canne à sucre, de plantations de pastèques, et une partie du matériel agricole de l'intéressé ; que, par un jugement 25 mars 2010, le tribunal a condamné la commune de Saint-Leu et le SDIS de La Réunion à verser à M. B une indemnité de 13 905 euros des préjudices subis ; que sur appel de M. B et appel incident de la commune de Saint-Leu et du SDIS de La Réunion, la cour administrative d'appel de Bordeaux, par un arrêt du 3 mai 2011 contre lequel M. B se pourvoit régulièrement en cassation, a annulé le jugement attaqué et rejeté l'ensemble des demandes indemnitaires de ce dernier au motif qu'aucune faute de nature à engager sa responsabilité n'avait été commise par le SDIS ;
2. Considérant que pour juger que le retard pris par le SDIS pour intervenir dans le secteur de la rue Agénor dans lequel se trouvait l'exploitation du requérant n'était pas constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité, la cour s'est fondée sur l'intervalle de temps, soit quatre minutes, entre le signalement de la défaillance des deux véhicules appelés en renfort pour intervenir dans ce secteur et l'arrivée sur les lieux d'un troisième véhicule, alors qu'il ressortait des énonciations de l'arrêt attaqué que l'intervalle de temps entre la demande de renfort des deux véhicules destinés à la protection de ce secteur, qui était intervenue à 14 heures 14, et l'arrivée sur les lieux du véhicule de remplacement à 14 heures 42 était non pas de quatre mais de vingt-huit minutes et que les conséquences de la panne des deux véhicules n'avaient pu être palliées rapidement par l'arrivée de nouveaux moyens, la cour a dénaturé les faits qui lui étaient soumis et les a inexactement qualifiés ;
3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SDIS de La Réunion la somme de 3 000 euros à verser à M. B au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. B qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 3 mai 2011 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : Le service départemental d'incendie et de secours de La Réunion versera à M. B la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-Leu et du service départemental d'incendie et de secours de La Réunion présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Thierry B, à la commune de Saint-Leu et au service départemental d'incendie et de secours de La Réunion.