Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 décembre 2010 et 7 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le centre hospitalier de Rochefort, dont le siège est 16 rue du docteur Peltier BP 9 à Rochefort Cedex (17301) ; le centre hospitalier de Rochefort demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 09BX02941 du 5 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur l'appel de la caisse Régime social des indépendants (RSI) Pays de la Loire contre le jugement n° 0701457 du 15 octobre 2009 du tribunal administratif de Poitiers, a annulé ce jugement et l'a condamné à rembourser à la caisse les prestations versées à M. A à la suite d'une infection contractée par celui-ci en août 2003 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Gounin, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Rochefort et de la SCP Lesourd, avocat de la caisse Régime social des indépendants Pays de la Loire,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Rochefort et à la SCP Lesourd, avocat de la caisse Régime social des indépendants Pays de la Loire ;
1. Considérant qu'à la suite d'une opération réalisée le 19 août 2003 au centre hospitalier de Rochefort pour remédier à une éventration abdominale, M. Philippe A a présenté une infection dont le traitement a nécessité plusieurs interventions chirurgicales et qui a entraîné une incapacité temporaire totale de plus de six mois et une incapacité permanente partielle de 10 % ; qu'il a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de Poitou-Charentes qui a attribué le dommage à un accident médical non fautif ouvrant droit à réparation au titre de la solidarité nationale en application du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ; qu'à la suite de cet avis M. A a été indemnisé par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ; que la caisse Régime social des indépendants Pays de la Loire a recherché la responsabilité du centre hospitalier de Rochefort aux fins d'obtenir le remboursement des prestations versées à l'intéressé ; que, par un jugement du 15 octobre 2009, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ; que le centre hospitalier de Rochefort se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, retenant le caractère nosocomial de l'infection et l'absence de preuve d'une cause étrangère, a annulé le jugement et accueilli la demande de la caisse à hauteur de 66 170,62 euros ;
2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère " ; que ces dispositions font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des dommages résultant des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère ne soit apportée ;
3. Considérant, en premier lieu, que la cour administrative d'appel a estimé qu'il résultait de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que la péritonite dont M. A avait été atteint au décours de l'opération du 19 août 2003 était en relation directe et certaine avec cette opération et qu'elle était elle-même à l'origine de l'infection des plaques pariétales et diaphragmatiques dont le traitement avait exigé la réalisation de neuf interventions chirurgicales ; qu'en l'état de ces constatations, exemptes de dénaturation, qui faisaient apparaître que l'infection était la conséquence des soins, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit en retenant qu'elle présentait un caractère nosocomial et que la circonstance que le germe devenu infectieux à la suite de l'opération était présent dans l'organisme du patient lorsque celle-ci avait été pratiquée n'était pas de nature à apporter la preuve d'une cause étrangère ;
4. Considérant, en second lieu, qu'eu égard aux dispositions précitées du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dont il résulte que les établissements de santé assument de plein droit la responsabilité des dommages causés par les infections nosocomiales, sauf s'ils apportent la preuve d'une cause étrangère, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en mettant à la charge du centre hospitalier de Rochefort les dépenses exposées par la caisse Régime social des indépendants Pays de la Loire en raison de l'infection de M. A, sans rechercher si le centre hospitalier avait commis une faute ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Rochefort n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du centre hospitalier de Rochefort est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au centre hospitalier de Rochefort, à la caisse Régime social des indépendants pays de la Loire, à M. Philippe A et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.