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21/11/2012 | FRANCE | N°346244

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 21 novembre 2012, 346244


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 janvier et 2 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... et la fédération nationale des travailleurs de l'Etat-CGT (FNTE-CGT) ; M. A et la FNTE-CGT demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0803037 du 1er décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, refusé d'admettre l'intervention de la FNTE-CGT et, d'autre part, rejeté la demande présentée par M. A tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui

verser la somme de 8 617,03 euros en réparation du retard d'avancement ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 janvier et 2 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... et la fédération nationale des travailleurs de l'Etat-CGT (FNTE-CGT) ; M. A et la FNTE-CGT demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0803037 du 1er décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, refusé d'admettre l'intervention de la FNTE-CGT et, d'autre part, rejeté la demande présentée par M. A tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 8 617,03 euros en réparation du retard d'avancement dont il aurait été victime à raison de ses fonctions de représentation syndicale au cours de sa carrière dans l'établissement de Ruelle-sur-Touvre de la direction des constructions navales, devenue l'entreprise nationale DCN, puis DCNS ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à la demande de M. A ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 ;

Vu la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001, notamment son article 78 ;

Vu la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;

Vu le décret n° 2002-832 du 3 mai 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A et de la SCP Blanc, Rousseau, avocat du Défenseur des droits ;

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A et de la SCP Blanc, Rousseau, avocat du Défenseur des droits ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 3 juillet 2008, M. Claude A, ouvrier de l'Etat mis à disposition de l'entreprise nationale DCNS au sein de l'établissement de Ruelle-sur-Touvre (Charente) et bénéficiant d'une décharge partielle d'activité de service, a demandé au ministre de la défense que lui soit versée une indemnité en réparation du retard d'avancement qu'il aurait subi à compter de 1994 à raison de ses responsabilités au sein de la fédération nationale des travailleurs de l'Etat-CGT (FNTE-CGT) ; que, le 26 septembre 2008, le ministre de la défense a indiqué à M. A que sa demande relevait de la compétence du président de DCNS ; que, le 18 décembre 2008, M. Guérin a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande, à l'appui de laquelle est intervenue la FNTE-CGT, tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2008 et à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 8 617,03 euros en réparation du retard d'avancement dont il aurait été victime à raison de ses responsabilités syndicales ; que M. A et la FNTE-CGT se pourvoient en cassation contre le jugement du 1er décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a refusé d'admettre l'intervention de la FNTE-CGT et rejeté la demande de M. A ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions du pourvoi en tant qu'elles sont présentées par la FNTE-CGT ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'en refusant d'admettre l'intervention de la FNTE-CGT au motif qu'elle ne se prévalait, dans le litige indemnitaire opposant M. A et l'Etat, d'aucun droit auquel la décision à rendre aurait été susceptible de préjudicier, le tribunal administratif n'a ni commis d'erreur de droit, ni incorrectement qualifié les faits ; que ce moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait omis de répondre au moyen tiré de ce que, postérieurement au 3 mai 2002, le ministre de la défense était demeuré compétent pour la gestion des ouvriers de l'Etat mis à la disposition de l'entreprise nationale DCN, devenue DCNS, manque en fait ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article 78 de la loi du 28 décembre 2001, les ouvriers de l'Etat affectés aux établissements du service à compétence nationale DCN à la date de réalisation des apports des droits, biens et obligations de l'Etat relatifs à ce service à l'entreprise nationale DCN, devenue DCNS, ont été mis à la disposition de cette entreprise ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 3 mai 2002 : " Les [...] ouvriers de l'Etat [...] mis à la disposition de l'entreprise nationale [...] sont en position d'activité. Dans cette position, ils demeurent soumis aux dispositions statutaires et réglementaires les régissant et bénéficient de celles du présent décret. " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : " Le pouvoir de gestion et d'administration du personnel civil mis à la disposition dans les conditions de l'article 1er du présent décret, notamment en matière de discipline, d'avancement et de notation, relève du ministre de la défense sous réserve des dispositions de l'article 10 du présent décret. L'avis du président de l'entreprise nationale est recueilli pour toute décision individuelle, y compris en matière disciplinaire. " ; qu'aux termes de l'article 10 du même décret : " Les décisions individuelles concernant ces ouvriers sont prises par le président de l'entreprise nationale ou par toute personne déléguée par lui à cet effet. [...] " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si les mesures générales de gestion et d'administration des ouvriers de l'Etat mis, à compter du 1er juin 2003, à la disposition de l'entreprise nationale DCN, devenue DCNS, continuent de relever de la compétence du ministre de la défense, les décisions individuelles les concernant relèvent en revanche de la compétence du président de DCNS ou de la personne déléguée par lui à cet effet ; que le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en jugeant que, depuis le 1er juin 2003, les décisions individuelles relatives à l'avancement des ouvriers de l'Etat mis à la disposition de l'entreprise nationale DCN, devenue DCNS, relevaient de la seule compétence du président de l'entreprise nationale ne peut, par suite, qu'être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. [...] " ; qu'il résulte de ces dispositions que, s'il appartient au requérant qui demande réparation du préjudice né du traitement discriminatoire dont il estime avoir été victime de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence de cette discrimination, il incombe au défendeur de soumettre tous ceux permettant d'établir que le traitement dont il a été l'objet repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si le traitement dont le requérant a été l'objet présente un caractère discriminatoire, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ;

7. Considérant qu'en jugeant que les éléments relatifs à la période antérieure au 1er juin 2003 soumis par M. A au tribunal à l'appui de ses allégations, qui consistaient en une chronique de son avancement de groupe et d'échelon, faisant apparaître une accentuation de son retard d'avancement entre 1990 et 2000 par rapport à neuf autres ouvriers de l'Etat recrutés à l'établissement de la DCN de Ruelle-sur-Touvre à la même époque que lui et dans des fonctions similaires, ainsi qu'en une chronique de l'évolution de son taux de prime et que le procès verbal de la séance de la commission d'avancement du 8 avril 1999, lors de laquelle un représentant de la FNTE-CGT avait soutenu que, lors de la séance de l'année précédente, le président de la commission avait jugé " normal que M. A attende un peu " pour être promu au groupe supérieur " car il n'était pas souvent devant sa machine ", ne suffisaient pas à faire présumer que ce retard d'avancement aurait eu pour origine une discrimination liées à ses activités syndicales dont aurait pâti M. A tout au long de sa carrière et particulièrement au moment des avancements de groupe, pour en déduire que l'intéressé n'était pas fondé à soutenir que l'Etat aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité pour la période antérieure au 1er juin 2003, le tribunal administratif s'est livré à une appréciation souveraine exempte de dénaturation des faits qu'il n'a pas inexactement qualifiés et n'a pas commis d'erreur de droit ; que ce moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en écartant la responsabilité du ministre de la défense pour la période postérieure au 1er juin 2003 au motif que les fautes qu'il avait commises lors de la période antérieure au 1er juin 2003 avaient continué de porter préjudice à M. A après cette date ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A et la FNTE-CGT ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement attaqué ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. A et de la FNTE-CGT est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Claude A, à la fédération nationale des travailleurs de l'Etat-CGT, au ministre de la défense et à la société DCNS.

Copie en sera adressée, pour information, au Défenseur des droits.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 346244
Date de la décision : 21/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 nov. 2012, n° 346244
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jean Courtial
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY ; SCP BLANC, ROUSSEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:346244.20121121
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