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29/10/2012 | FRANCE | N°342716

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 29 octobre 2012, 342716


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 25 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gilbert B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX00292 du 17 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel contre le jugement n° 0601888 du 18 novembre 2008 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Hours et de l'Etat à lui verser une indemnité de 25 000 euros en réparati

on du préjudice résultant pour lui de l'absence de réalisation d'un p...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 25 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gilbert B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX00292 du 17 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel contre le jugement n° 0601888 du 18 novembre 2008 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Hours et de l'Etat à lui verser une indemnité de 25 000 euros en réparation du préjudice résultant pour lui de l'absence de réalisation d'un passage à gué destiné à desservir une parcelle qui lui a été attribuée à la suite d'opérations de remembrement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de condamner l'Association foncière de remembrement de Hours et l'Etat à lui verser une indemnité de 45 000 euros avec les intérêts au taux légal ainsi que leur capitalisation et, subsidiairement, d'ordonner une expertise ;

3°) de mettre à la charge des défendeurs le versement d'une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Odent, Poulet avocat de la commune de Hours et de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament avocat de M. B ;

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Odent, Poulet avocat de la commune de Hours et à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament avocat de M. B ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 23 octobre 1997, la commission intercommunale d'aménagement foncier de Pontacq, Barzun, Benejacq, Hours et Livron a décidé, à l'occasion d'un remembrement et sur le fondement de l'article L. 123-8 du code rural, l'aménagement d'un passage à gué afin de permettre l'accès, à partir de la voirie communale de Hours, à une parcelle attribuée à M. B ; que, par l'arrêt attaqué du 17 juin 2010, la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du tribunal administratif de Pau du 18 novembre 2008 rejetant la demande de M. B tendant à la condamnation solidaire de la commune de Hours et de l'Etat à lui verser une indemnité en réparation du préjudice résultant pour lui du fait que cet ouvrage n'a pas été réalisé ;

Sur la responsabilité de l'association foncière de remembrement :

2. Considérant que M. B a présenté pour la première fois des conclusions indemnitaires dirigées contre l'association foncière de remembrement dans un mémoire enregistré au greffe de la cour administrative d'appel le 18 mai 2010, alors qu'en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction était intervenue trois jours francs avant la date de l'audience qui avait été fixée au 20 mai 2010 ; que, contrairement à ce que soutient M. B, la cour n'avait pas à répondre à ces conclusions, au demeurant nouvelles en appel, dont elle n'avait pas été saisie avant la clôture de l'instruction ;

Sur la responsabilité de la commune de Hours et de l'Etat :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-8 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur : " La commission communale d'aménagement foncier a qualité pour décider à l'occasion des opérations et dans leur périmètre : / 1° L'établissement de tous chemins d'exploitation pour desservir les parcelles (...) " et qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 133-1 du même code : " A l'intérieur d'un périmètre de remembrement, il est constitué entre les propriétaires des parcelles à remembrer une association foncière chargée de la réalisation, de l'entretien et de la gestion des travaux ou ouvrages mentionnés aux articles L. 123-8, L. 123-23 et L. 133-3 à L. 133-5 " ; que, si l'absence de réalisation des travaux ou ouvrages décidés par la commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier est susceptible d'engager la responsabilité de l'association foncière, il ne résulte pas de ces dispositions que les propriétaires soient par principe privés de toute action en responsabilité contre les communes ou l'Etat, lorsqu'un agissement ou une décision d'une commune ou de l'Etat est à l'origine de l'inexécution de la décision de la commission communale ou intercommunale ou l'a favorisée ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B soutenait, à l'appui de ses conclusions indemnitaires dirigées contre la commune de Hours et l'Etat, que l'absence de réalisation du passage à gué mentionné ci-dessus était exclusivement imputable à l'opposition de la commune ainsi qu'à une carence du préfet des Pyrénées-Atlantiques ; que, pour rejeter ces conclusions, la cour a jugé que, quels que soient les motifs de l'inexécution des travaux, ni la commune ni l'Etat ne sauraient voir leur responsabilité engagée, la responsabilité ne pouvant, par principe, incomber qu'à la seule association foncière ; qu'il résulte de ce qui précède que la cour a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. B est fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 17 juin 2010 en tant qu'il a statué sur la responsabilité de la commune de Hours et de l'Etat ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Hours la somme de 3 000 euros à verser à M. B à ce titre ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge de M. B qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 17 juin 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé en tant qu'il a statué sur la responsabilité de la commune de Hours et de l'Etat.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : La commune de Hours versera à M. B la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Hours au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Gilbert B, à la commune de Hours et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 342716
Date de la décision : 29/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PÊCHE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - GÉNÉRALITÉS - RESPONSABILITÉ - ABSENCE DE RÉALISATION DES TRAVAUX OU OUVRAGES DÉCIDÉS PAR LA COMMISSION D'AMÉNAGEMENT FONCIER - PERSONNE RESPONSABLE - PRINCIPE - ASSOCIATION FONCIÈRE [RJ1] - POSSIBILITÉ DE RECHERCHER LA RESPONSABILITÉ DES COMMUNES OU DE L'ETAT - EXISTENCE - LORSQU'ILS SONT À L'ORIGINE DE L'INEXÉCUTION.

03-04-01 Si l'absence de réalisation des travaux ou ouvrages décidés par la commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier est susceptible d'engager la responsabilité de l'association foncière, il ne résulte pas des dispositions des articles L. 123-8 et L. 133-1 du code rural que les propriétaires soient par principe privés de toute action en responsabilité contre les communes ou l'Etat, lorsqu'un agissement ou une décision d'une commune ou de l'Etat est à l'origine de l'inexécution de la décision de la commission communale ou intercommunale ou l'a favorisée.

ASSOCIATIONS SYNDICALES - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ASSOCIATIONS SYNDICALES - ASSOCIATIONS SYNDICALES DE REMEMBREMENT - ABSENCE DE RÉALISATION DES TRAVAUX OU OUVRAGES DÉCIDÉS PAR LA COMMISSION D'AMÉNAGEMENT FONCIER - PERSONNE RESPONSABLE - PRINCIPE - ASSOCIATION FONCIÈRE [RJ1] - POSSIBILITÉ DE RECHERCHER LA RESPONSABILITÉ DES COMMUNES OU DE L'ETAT - EXISTENCE - LORSQU'ILS SONT À L'ORIGINE DE L'INEXÉCUTION - EXISTENCE.

11-02-02 Si l'absence de réalisation des travaux ou ouvrages décidés par la commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier est susceptible d'engager la responsabilité de l'association foncière, il ne résulte pas des dispositions des articles L. 123-8 et L. 133-1 du code rural que les propriétaires soient par principe privés de toute action en responsabilité contre les communes ou l'Etat, lorsqu'un agissement ou une décision d'une commune ou de l'Etat est à l'origine de l'inexécution de la décision de la commission communale ou intercommunale ou l'a favorisée.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 17 décembre 1975, Ministre de l'agriculture c/ consorts Coustillac, n° 91774, T. p. 1259.


Publications
Proposition de citation : CE, 29 oct. 2012, n° 342716
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Domitille Duval-Arnould
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET ; SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:342716.20121029
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