Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le Conseil national des professions de l'automobile, dont le siège est 50, rue Rouget de Lisle à Suresnes (92158), représenté par le président de la branche recycleurs du Conseil national des professions de l'automobile ; le Conseil national des professions de l'automobile demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, à titre principal, la suspension, de l'exécution de l'arrêté du 2 mai 2012 relatif aux agréments des exploitants des centre VHU (véhicules hors d'usage) et aux agréments des exploitants des installations de broyage de véhicules hors d'usage et, à titre subsidiaire, la suspension de l'exécution des dispositions du deuxième tiret du 10° de l'annexe I de cet arrêté;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie dès lors que l'arrêté du 2 mai 2012 préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à la situation financière de la filière des centres VHU agréés et aux intérêts qu'il entend défendre ;
- il existe des doutes sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;
- faute de participation du public à son élaboration, la procédure à l'issue de laquelle il a été adopté est irrégulière ;
- en adoptant une prescription excédant le cadre de la réglementation applicable aux véhicules hors d'usage, les auteurs de l'arrêté ont commis une erreur de droit ;
- l'arrêté contesté impose, dans des délais très brefs, des contraintes excessives et porte une atteinte disproportionnée au principe de liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté d'entreprendre ;
- en instaurant une différence de traitement entre les différentes personnes chargées du stockage des véhicules en attente d'expertise, l'arrêté litigieux méconnaît le principe de l'égalité des citoyens devant la loi ;
- l'arrêté contesté entraîne une rupture d'égalité devant les charges publiques dès lors qu'il impose des sujétions différentes aux centres VHU ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2012, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que :
- la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que l'arrêté du 2 mai 2012 ne préjudicie pas de manière suffisamment grave et immédiate à la situation financière de la filière des centres VHU agréés ;
- il n'existe aucun doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- la procédure d'adoption de l'arrêté litigieux satisfait aux exigences des dispositions de l'article L. 120-1 du code de l'environnement ;
- la décision contestée n'est pas entachée d'erreur de droit dès lors que ses prescriptions n'excèdent pas le cadre des activités des centres VHU ;
- l'arrêté litigieux n'édicte pas des prescriptions excessives et ne porte pas d'atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie ;
- le principe d'égalité des citoyens devant la loi n'a pas été méconnu dès lors que les garages et les centres techniques sont dans une situation différente ;
- la rupture d'égalité devant les charges publiques n'est pas caractérisée dès lors que les différences de délai tiennent compte du principe de sécurité juridique ;
Vu l'arrêté dont la suspension de l'exécution est demandée ;
Vu la copie de la requête à fin d'annulation présentée contre cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Charte de l'environnement ;
Vu la directive 2000/53/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 septembre 2000;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le Conseil national des professions de l'automobile, d'autre part, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 26 juillet 2012 à 11 heures, au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du Conseil national des professions de l'automobile ;
- le représentant du Conseil national des professions de l'automobile ;
- les représentants du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;
et à l'issue de laquelle l'instruction a été close ;
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;
2. Considérant que l'article R. 543-15 du code de l'environnement, pris pour l'application de la directive du 18 septembre 2000, prévoit que les personnes qui assurent la prise en charge, le stockage, la dépollution et le démontage des véhicules hors d'usage, dénommées centres VHU, doivent être agréées par l'autorité administrative ; que cet article exige également un agrément pour les broyeurs, qui assurent la prise en charge, le stockage et le broyage de véhicules préalablement dépollués et démontés par un centre VHU ; que le Conseil national des professions de l'automobile demande la suspension de l'exécution de l'arrêté interministériel du 2 mai 2012 qui détermine les conditions de délivrance de l'agrément aux exploitants des centres VHU et à ceux des installations de broyage ; que, s'il demande la suspension totale de cet arrêté, il critique spécialement les dispositions du deuxième tiret du 10° de son annexe I, aux termes desquelles " les emplacements affectés à l'entreposage des véhicules hors d'usage non dépollués sont revêtus, pour les zones appropriées comprenant a minima les zones affectées à l'entreposage des véhicules à risque ainsi que les zones affectées à l'entreposage des véhicules en attente d'expertise par les assureurs, de surfaces imperméables avec dispositif de collecte des fuites, décanteurs et épurateurs-dégraisseurs " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il a été confirmé au cours de l'audience publique, que les dispositions contestées imposent aux entreprises concernées de recouvrir les surfaces qu'elles visent d'un revêtement en béton ou en enrobé, alors que l'administration avait précédemment interprété la directive du 18 septembre 2000 comme ouvrant le choix entre une telle solution et des formules plus légères de film protecteur ; qu'un nombre important des entreprises concernées, dont la plupart sont de dimension modeste, se trouvent donc dans l'obligation, pour se conformer à la nouvelle réglementation, de réaliser des investissements qui représentent une part significative de leurs chiffre d'affaires ; que le délai de dix-huit mois prévu par l'arrêté litigieux pour se mettre en conformité avec ses prescriptions ne bénéficie pas aux entreprises dont l'autorisation est en cours de renouvellement, qui disposent seulement d'une prolongation de leur autorisation pour trois mois ; qu'enfin, les entreprises dont l'autorisation viendra à échéance dans les dix-huit mois suivant la publication de l'arrêté litigieux ne pourront en obtenir le renouvellement que si elles satisfont aux nouvelles exigences posées par celui-ci ; que, dans ces conditions, l'exécution des dispositions contestées porte aux intérêts des entreprises représentées par l'organisation requérante une atteinte suffisamment grave et immédiate pour que la condition d'urgence soit regardée comme remplie ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de ce que les prescriptions litigieuses du deuxième tiret du 10° de l'annexe I à l'arrêté litigieux imposent des contraintes excessives aux exploitants des centres VHU et des installations de broyage et méconnaissent, par la brièveté des délais qu'elles prévoient, en particulier à l'égard des entreprises qui ne disposeront pas du délai de dix-huit mois, les exigences de la sécurité juridique et, s'agissant de mesures prises pour l'application du droit de l'Union, de la confiance légitime, sont, en l'état de l'instruction, de nature à faite naître un doute sérieux sur la légalité de ces décisions ;
5. Considérant, en revanche, que le moyen de légalité externe, dirigé contre l'ensemble de l'arrêté litigieux, relatif à la méconnaissance des exigences de participation du public, telles qu'elles découlent de l'article 7 de la Charte de l'environnement et de l'article L. 120-1 du code de l'environnement, ne paraît pas, en l'état de l'instruction, et compte tenu des explications données au cours de l'audience par l'administration sur les modalités de diffusion du projet d'arrêté sur le site internet du ministère, de nature à créer un doute séreux sur la légalité de cet arrêté ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Conseil national des professions de l'automobile est fondé à demander la suspension de l'exécution non de l'arrêté du 2 mai 2012 dans son intégralité mais des dispositions du deuxième tiret du 10° de son annexe I ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement de la somme de 1 500 euros que demande le Conseil national des professions de l'automobile ;
O R D O N N E :
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Article 1er : Jusqu'à ce que le Conseil d'Etat, statuant au contentieux ait statué sur la requête formée par le Conseil national des professions de l'automobile contre l'arrêté interministériel du 2 mai 2012 relatif aux agréments des exploitants des centres VHU et aux agréments des exploitants des installations de broyage de véhicules hors d'usage, l'exécution du deuxième tiret du 10° de l'annexe I à cet arrêté, aux termes duquel " les emplacements affectés à l'entreposage des véhicules hors d'usage non dépollués sont revêtus, pour les zones appropriées comprenant a minima les zones affectées à l'entreposage des véhicules à risque ainsi que les zones affectées à l'entreposage des véhicules en attente d'expertise par les assureurs, de surfaces imperméables avec dispositif de collecte des fuites, décanteurs et épurateurs-dégraisseurs ", est suspendue.
Article2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros au Conseil national des professions de l'automobile en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au Conseil national des professions de l'automobile et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.