Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 décembre 2010 et le 22 mars 2011, présentés pour Christophe A demeurant ... et M. et Mme Jean A demeurant ... ; les consorts A demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt 08LY01000 du 9 novembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir constaté que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) était substitué à l'Etablissement français du sang dans l'instance en cours, a annulé le jugement 0601903 du 19 février 2008 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il fixait à 7 000 euros l'indemnité due à M. Christophe A en réparation du préjudice subi par lui à la suite de sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C, porté à 20 000 euros le montant de cette indemnité mise à la charge de l'ONIAM et rejeté pour le surplus leurs conclusions aux fins d'indemnisation ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête d'appel ;
3°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Desportes, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Blanc, Rousseau, avocat des consorts A, de la SCP Roger, Sevaux, avocat de l'Office national de l'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Etablissement français du sang,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Blanc, Rousseau, avocat des consorts A, à la SCP Roger, Sevaux, avocat de l'Office national de l'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Etablissement français du sang ;
Considérant que l'article L. 1221-14 du code de la santé publique résultant du paragraphe I de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 confie à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), en lieu et place de l'Etablissement français du sang, l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C (VHC) causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang ; que ce même article institue une procédure d'indemnisation amiable devant l'ONIAM, la victime ne disposant du droit d'action en justice contre celui-ci que si sa demande d'indemnisation a été rejetée ou laissée sans réponse dans le délai fixé par la loi ou si elle juge insuffisante l'offre faite par l'Office ; qu'aux termes du paragraphe IV de l'article 67 de la loi précitée, relatif aux dispositions transitoires : " A compter de la date d'entrée en vigueur du présent article, l'Office se substitue à l'Etablissement français du sang dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable./ Dans le cadre des actions juridictionnelles en cours visant à la réparation de tels préjudices, pour bénéficier de la procédure prévue à l'article L. 1221-14 du même code, le demandeur sollicite de la juridiction saisie un sursis à statuer aux fins d'examen de sa demande par l'Office (... ) " ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la personne ayant, avant la date de leur entrée en vigueur, fixée au 1er juin 2010, engagé une action en justice contre l'Etablissement français du sang aux fins d'être indemnisée des préjudices ayant résulté pour elle d'une contamination par le VHC causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang, dispose, depuis la date de leur entrée en vigueur, d'une option lui permettant soit de poursuivre la procédure en cours contre l'ONIAM, substitué à l'Etablissement français du sang, soit de suivre la procédure de règlement amiable devant l'Office et demander à cet effet à la juridiction saisie de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de cette procédure ; que, dans ce second cas, la juridiction saisie, qui est celle devant laquelle l'instance était en cours à la date de l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles, est tenue de faire droit à la demande ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Christophe A et ses parents ont saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande tendant à ce que l'Etablissement français du sang et le centre hospitalier régional universitaire de Clermont-Ferrand soient condamnés à leur verser des dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par eux à la suite de la contamination transfusionnelle de M. Christophe A par le virus de l'hépatite C ; que le tribunal administratif n'ayant que partiellement fait droit à leurs demandes, les consorts A, par une requête enregistrée le 30 avril 2008, ont interjeté appel de son jugement devant la cour administrative d'appel de Lyon ; que, l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 étant entré en vigueur au cours de l'instance d'appel, l'ONIAM est intervenu dans cette instance par un mémoire enregistré le 8 juillet 2010 ; que, par un mémoire enregistré le 7 octobre suivant, les consorts M. A ont demandé à la cour administrative d'appel de surseoir à statuer en application du même article afin de leur permettre de suivre la procédure de règlement amiable devant l'ONIAM ;
Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel a estimé que, " dans les circonstances de l'espèce ", il n'y avait pas lieu d'accueillir la demande de sursis à statuer dès lors qu'elle avait été formulée dans un mémoire enregistré huit jours avant la date de l'audience des débats ; qu'en statuant ainsi, alors qu'en application des dispositions précitées du 2ème alinéa du paragraphe IV de l'article 67 de la loi du 31 décembre 2008, elle était tenue de faire droit à cette demande dont elle avait été régulièrement saisie, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros à verser aux consorts A, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 9 novembre 2010 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales versera la somme de 3 000 euros aux consorts A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Christophe A, à M. et Mme Jean A, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à l'Etablissement français du sang, à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.