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29/03/2012 | FRANCE | N°356926

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 29 mars 2012, 356926


Vu la requête, enregistrée le 21 février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES, représenté par son représentant légal, dont le siège social est situé 7, villa Virginie à Paris (75014) ; le SYNDICAT demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution, d'une part, de la décision implicite par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejet

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Vu la requête, enregistrée le 21 février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES, représenté par son représentant légal, dont le siège social est situé 7, villa Virginie à Paris (75014) ; le SYNDICAT demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution, d'une part, de la décision implicite par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa demande tendant à ce que soient délivrées les autorisations d'émettre aux candidats sélectionnés par décision du 26 mai 2009 dans le cadre de l'appel à candidature lancé le 26 mars 2008 pour la diffusion de services de radios en mode numérique terrestre (RNT) dans les zones de Paris, Nice et Marseille et, d'autre part, de la décision du 26 décembre 2011 par laquelle le CSA a refusé de faire droit à cette demande dans l'attente d'une réponse du gouvernement sur sa demande de révision de l'arrêté du 3 janvier 2008 ;

2°) d'enjoindre, au besoin sous astreinte, au Conseil supérieur de l'audiovisuel de délivrer, à titre temporaire, les autorisations d'émettre aux candidats sélectionnés par décision du 26 mai 2009 dans le cadre de l'appel à candidature lancé le 26 mars 2008 pour la diffusion de services de radios en mode numérique terrestre dans les zones de Paris, Nice et Marseille ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient qu'il a intérêt à agir ; que son recours dirigé contre le courrier du 26 décembre 2011 est recevable ; qu'en tout état de cause, la demande adressée au Conseil supérieur de l'audiovisuel le 21 octobre 2011 a fait naître une décision implicite de rejet le 21 décembre 2011 susceptible d'être soumise à l'examen du juge de l'excès de pouvoir ; que la condition d'urgence est remplie dès lors qu'un nouvel appel à candidature, fondé sur d'autres fréquences de diffusion, a été lancé le 3 novembre 2011 ; que l'émission en numérique terrestre de l'unique candidat, distributeur payant, risque, d'une part, de favoriser la diffusion d'un équipement de réception spécifique et incompatible avec les modes d'émission des radios dont le syndicat défend les intérêts et, d'autre part, de priver le public d'un accès gratuit à la radio numérique terrestre ; qu'eu égard au stade avancé de la procédure, qui a débuté par l'appel à candidature du 26 mars 2008, et des sommes engagées par les candidats sélectionnés, les décisions contestées portent à leurs intérêts un préjudice financier grave et immédiat ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ; qu'en ne fondant son refus ni sur des considérations techniques ni sur l'une des limites précisées par l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a méconnu la liberté de communication audiovisuelle ; qu'en refusant de délivrer des autorisations d'émettre à des candidats déjà sélectionnés, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a également méconnu les dispositions des articles 29 et 29-1 de la loi du 30 septembre 1986 ;

Vu les décisions dont la suspension de l'exécution est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation des décisions contestées ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2012, présenté par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le syndicat requérant n'a pas intérêt pour agir ; que le courrier du 26 décembre 2011 n'est pas un acte décisoire susceptible de faire l'objet d'un recours ; que les conclusions du requérant à fin d'injonction sont irrecevables ; que la condition d'urgence n'est pas remplie ; qu'en effet, le syndicat requérant n'établit pas que les décisions contestées portent atteinte de manière suffisamment grave et immédiate aux intérêts qu'il entend défendre ; que la circonstance qu'un appel à candidature relatif à une autre fréquence de diffusion a été lancé est sans incidence sur la délivrance des autorisations d'émettre aux candidats sélectionnés le 26 mai 2009 et ne saurait, par suite, caractériser l'urgence ; qu'il n'existe aucun doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la liberté de communication ; qu'en effet, celles-ci sont prises dans le cadre du pouvoir de régulation dont dispose le Conseil supérieur de l'audiovisuel ; qu'en tout état de cause, les décisions contestées ne revêtent qu'un caractère provisoire tenant compte des évolutions et changements de circonstances intervenus dans la procédure de lancement de la radio numérique terrestre ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 15 mars 2012, présenté pour le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que les conclusions à fin d'injonction sont recevables au titre de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ; qu'eu égard à l'ancienneté du processus, un nouvel appel à candidatures risque d'être lancé sans tenir compte de la présélection opérée le 26 mai 2009 ; que le refus de délivrer des autorisations d'émettre favorise le développement de programmes non autorisés, lesquels émettent dès à présent en mode numérique, hors de tout cadre légal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son préambule ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES et, d'autre part, le Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 16 mars 2012 à 9 h 30, au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES ;

- les représentants du SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES ;

- les représentants du Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a prolongé l'instruction, afin de permettre au Conseil supérieur de l'audiovisuel de verser au débat contradictoire des observations exposant les engagements qu'il s'est engagé à prendre au cours de l'audience ;

Vu les observations complémentaires, enregistrées les 21 et 23 mars 2012, présentées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui reprend ses conclusions et présente un calendrier prévisionnel de délivrance des autorisations non dans le cadre de la procédure engagée en 2008 mais dans celui d'un nouvel appel à candidatures ;

Vu les observations complémentaires, enregistrées les 23 et 26 mars 2012, présentées pour le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES qui persiste dans ses conclusions et conteste le processus proposé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ainsi que la réouverture de l'appel à candidatures du 26 mars 2008 ;

Vu l'intervention, enregistrée le 28 mars 2012, présentée pour le Bureau de la radio, dont le siège est situé 23 rue du conseiller Collignon à Paris (75113), représenté par son représentant légal, et pour le Syndicat professionnel des radiodiffuseurs généralistes privés, dont le siège est situé 26 bis rue François 1er à Paris (75008), représenté par son représentant légal ; ils demandent au juge des référés du Conseil d'Etat de rejeter la requête du SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES ; ils soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les moyens exposés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

Sur l'intervention du Bureau de la radio et du Syndicat professionnel des radiodiffuseurs généralistes privés :

Considérant que le Bureau de la radio et le Syndicat professionnel des radiodiffuseurs généralistes privés justifient d'un intérêt au maintien des décisions contestées ; qu'ainsi leur intervention au soutien des conclusions du Conseil supérieur de l'audiovisuel est recevable ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le Conseil supérieur de l'audiovisuel a procédé, par une décision du 28 mars 2008, à un appel aux candidatures pour l'édition de services de radio multiplexés diffusée par voie hertzienne terrestre en mode numérique à temps complet ou partagé ; que, le 26 mai 2009, le Conseil supérieur a sélectionné les candidatures retenues pour les zones de Paris, Marseille et Nice dans la perspective de délivrer des autorisations d'émettre ; qu'en l'absence d'une telle délivrance, le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES a saisi le Conseil supérieur, le 21 octobre 2011, d'une demande, présentée au nom de ses adhérents, de délivrance aux candidats présélectionnés en 2009 des autorisations d'émettre ; qu'il demande la suspension de l'exécution du refus implicite opposé à cette demande et de la lettre du 26 décembre 2011 par laquelle le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel a refusé d'y donner suite ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des éléments versés aux débats lors de l'audience et des échanges contradictoires postérieurs à celle-ci que de nouvelles circonstances de fait, survenues entre 2009 et fin 2011, tenant à la fois à la disparition de certaines des radios présélectionnées et à l'apparition de nouvelles radios susceptibles de se porter candidates ainsi qu'à une augmentation de la ressource disponible susceptible d'être attribuée, font obstacle à la délivrance des autorisations d'émettre aux radios candidates qui avaient été sélectionnées dans le cadre de la procédure engagée en 2008 ; que, dans ses dernières écritures, le Conseil supérieur de l'audiovisuel s'engage à procéder sans tarder à un nouvel appel à candidatures devant permettre de délivrer, sur des bases techniques actualisées et après que l'ensemble des candidats intéressés auront pu faire acte de candidature, des autorisations d'émettre avant la fin de l'année 2012 ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les refus opposés au SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES méconnaîtraient la liberté de communication et la loi du 30 septembre 1986 n'est pas, en l'état de l'instruction, de nature à susciter un doute sérieux sur la légalité des décisions contestées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, que la requête du SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES doit être rejetée ;

O R D O N N E :

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Article 1er : L'intervention du Bureau de la radio et du Syndicat professionnel des radiodiffuseurs généralistes privés est admise.

Article 2 : La requête du SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au SYNDICAT INTERPROFESSIONNEL DES RADIOS ET TÉLÉVISIONS INDÉPENDANTES, au Conseil supérieur de l'audiovisuel, au Bureau de la radio ainsi qu'au Syndicat professionnel des radiodiffuseurs généralistes privés.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 356926
Date de la décision : 29/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mar. 2012, n° 356926
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jacques-Henri Stahl
Avocat(s) : SPINOSI ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:356926.20120329
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