Vu, 1° sous le n° 335600, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier et 15 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES DE LA MEURTHE ET MOSELLE, dont le siège est 25/29 rue de Saurupt à Nancy (54000) ; le conseil départemental demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 25 septembre 2009 par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes a annulé sa décision du 9 avril 2009 refusant à la SELARL JPPI Prestat l'autorisation d'exercer dans un cabinet secondaire dans le secteur de Villerupt-Longwy et a accueilli favorablement la demande de cette société tendant à l'ouverture d'un cabinet secondaire ;
Vu, 2° sous le n° 3356247, la requête, enregistrée le 4 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Morgane BRAVETTI, demeurant 74 route de Longwy à Lexy (54720) ; Mme BRAVETTI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la même décision du 25 septembre 2009 du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes ;
2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu l'arrêté du 19 novembre 1980 portant approbation du règlement relatif à la qualification des chirurgiens dentistes en orthopédie dento-faciale établi par le Conseil national de l'ordre des chirurgiens dentistes ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anissia Morel, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES DE LA MEURTHE ET MOSELLE et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société SELARL JPPI Prestat,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public,
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES DE LA MEURTHE ET MOSELLE et à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société SELARL JPPI Prestat ;
Considérant que les requêtes du CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES DE LA MEURTHE ET MOSELLE et de Mme BRAVETTI tendent à l'annulation de la même décision du 25 septembre 2009 par laquelle le Conseil national de l'ordre des chirurgiens dentistes, saisi d'un recours hiérarchique, a annulé la décision du 3 avril 2009 de ce conseil départemental rejetant la demande de la SELARL JPPI Prestat d'autorisation d'ouverture d'un cabinet secondaire entre Longwy et Villerupt et a autorisé cette ouverture ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 4113-24 du code de la santé publique : " Les membres d'une société d'exercice libéral de chirurgiens-dentistes ont une résidence professionnelle commune. / Toutefois, la société peut être autorisée par le conseil départemental de l'ordre à exercer dans un ou plusieurs cabinets secondaires l'une ou plusieurs des disciplines pratiquées par ses membres si la satisfaction des besoins des malades l'exige et à la condition que la situation des cabinets secondaires par rapport au cabinet principal ainsi que l'organisation des soins dans ces cabinets permettent de répondre aux urgences. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4127-283 du même code : " Toute décision prise par l'ordre des chirurgiens-dentistes en application du présent code de déontologie doit être motivée. / Les décisions prises par les conseils départementaux peuvent être réformées ou annulées par le conseil national soit d'office, soit à la demande des intéressés. (...) " ;
Sur la légalité externe :
Considérant que, lorsqu'il est saisi d'un recours hiérarchique prévu par les dispositions de l'article R. 4127-283 du code de la santé publique, le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes ne statue ni comme juridiction, ni comme tribunal au sens des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en second lieu, que la décision attaquée du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes précise les circonstances de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde pour estimer que la demande satisfait aux conditions énoncées à l'article R. 4113-24 du code de la santé publique ; que le conseil national, qui, ainsi qu'il a été dit, était saisi d'un recours hiérarchique, n'était pas tenu de répondre dans sa décision à l'argumentation développée devant lui par Mme BRAVETTI ; que, par suite, les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée doivent être écartés ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, que les dispositions des articles 5, 11, 12 et 13 du règlement relatif à la qualification des chirurgiens-dentistes en orthopédie dento-faciale, établi par le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et approuvé par arrêté du ministre de la santé en date du 19 novembre 1980, énumèrent limitativement les titres, diplômes ou certificats sanctionnant une formation ouvrant droit à la qualification de chirurgien-dentiste spécialiste en orthopédie dento-faciale ; qu'en vertu de l'article 5 du même règlement, les titulaires de ce certificat prennent l'engagement de ne se livrer qu'à l'exercice de l'orthopédie dento-faciale ; qu'ainsi, eu égard, d'une part, aux exigences particulières qui conditionnent la reconnaissance des formations ouvrant droit à la qualification en orthopédie dento-faciale et, d'autre part, à l'obligation d'exercer exclusivement cette spécialité, le conseil national de l'ordre n'a pas commis d'erreur de droit en ne prenant en compte, pour apprécier les besoins des malades dans le secteur concerné, que l'offre existante en matière d'orthopédie dento-faciale dans ce secteur ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, pour apprécier les besoins des malades, le conseil national a recherché si des chirurgiens-dentistes spécialistes qualifiés en orthopédie dento-faciale étaient installés dans les communes situées à une distance maximale d'environ 35 km de Longwy et Villerupt où la SELARL JPPI Prestat demandait l'autorisation d'ouvrir un cabinet secondaire et si cette offre était susceptible de répondre aux besoins de la population de ce secteur ; qu'à la date à laquelle le conseil national a statué, seul un chirurgien dentiste spécialisé en orthopédie dento-faciale, exerçant dans un cabinet généraliste, pratiquait son art dans le secteur ; que, même en tenant compte de l'ouverture programmée pour l'automne 2009 du cabinet principal de Mme BRAVETTI, spécialiste en orthopédie dento-faciale, la densité de chirurgiens-dentistes spécialistes qualifiés en orthopédie dento-faciale par rapport à la population reste dans ce secteur inférieure à la moyenne nationale ; qu'il suit de là que le conseil national n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que les besoins des malades n'étaient pas satisfaits dans le secteur concerné ;
Considérant, en troisième lieu, que, pour estimer que la condition de capacité à répondre aux urgences était remplie, le conseil national a relevé que le cabinet principal de la SELARL JPPI Prestat situé à Thionville est distant de 32 kilomètres du lieu projeté d'implantation du cabinet secondaire ; que dès lors, le moyen tiré de ce qu'il aurait omis de se prononcer sur la capacité de la demanderesse à répondre aux urgences manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision attaquée ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par Mme BRAVETTI ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes du CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES DE LA MEURTHE ET MOSELLE et de Mme BRAVETTI sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES DE LA MEURTHE ET MOSELLE, à Mme Morgane BRAVETTI, au Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et à la SELARL JPPI Prestat.