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04/05/2011 | FRANCE | N°322337

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 04 mai 2011, 322337


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 novembre 2008 et 10 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE COVED, venant aux droits de la société Saur et de la société Coved Midi Atlantique, dont le siège est Immeuble Cyclades, 1 rue Antoine Lavoisier à Guyancourt (78280) ; la SOCIETE COVED demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 06BX01619 du 2 septembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement n° 0102808 du tribunal administratif de Bordeaux du

14 juin 2006 condamnant le Syndicat médocain intercommunal pour le trai...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 novembre 2008 et 10 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE COVED, venant aux droits de la société Saur et de la société Coved Midi Atlantique, dont le siège est Immeuble Cyclades, 1 rue Antoine Lavoisier à Guyancourt (78280) ; la SOCIETE COVED demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 06BX01619 du 2 septembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement n° 0102808 du tribunal administratif de Bordeaux du 14 juin 2006 condamnant le Syndicat médocain intercommunal pour le traitement et la collecte des ordures ménagères en Médoc (Smicotom) à lui verser la somme de 73 457,32 euros avec intérêts en réparation des préjudices résultant de la résiliation du marché d'évacuation des déchets ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du Smicotom et, par la voie de l'appel incident, de le condamner à lui verser la somme de 195 040,07 euros en réparation des préjudices causés par la résiliation du marché ;

3°) de mettre à la charge du Smicotom la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 77-699 du 27 mai 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Mettoux, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Laugier, Caston, avocat de la SOCIETE COVED et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du Syndicat médocain intercommunal pour la collecte et le traitement des ordures ménagères en Médoc (Smicotom),

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Laugier, Caston, avocat de la SOCIETE COVED et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du Syndicat médocain intercommunal pour la collecte et le traitement des ordures ménagères en Médoc (Smicotom) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Saur, aux droits de laquelle est venue la SOCIETE COVED, a conclu avec le Syndicat médocain intercommunal pour la collecte et le traitement des ordures ménagères en Médoc (Smicotom) un marché portant sur l'évacuation et la valorisation des déchets verts en provenance de neuf déchetteries, incluant en particulier le compostage de ces déchets ; qu'en raison de différends apparus sur la qualité des prestations fournies par cette société, le syndicat, après avoir prononcé la résiliation de la partie du contrat portant sur la valorisation des déchets a, par une décision du 29 juin 2001, prononcé la résiliation totale de ce contrat, aux torts exclusifs de la société prestataire ; que celle-ci a présenté le 26 juillet 2001 un mémoire en réclamation tendant à ce que la résiliation soit prononcée aux torts du syndicat et à ce qu'un décompte de liquidation soit établi ; qu'en l'absence de réponse du Smicotom, la société a saisi le 20 octobre 2001 le tribunal administratif de Bordeaux ; qu'au cours de l'instruction, le syndicat a présenté, par lettre du 30 janvier 2002, reçue le 8 février 2002 par l'entreprise, un état liquidatif des factures acceptées et des factures rejetées ; que par l'arrêt attaqué du 2 septembre 2008, la cour administrative d'appel de Bordeaux, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Bordeaux, a rejeté comme irrecevable la demande de la SOCIETE COVED au motif que le décompte général reçu le 8 février 2002 n'avait pas été contesté dans les conditions prévues par le cahier des clauses administratives générales applicables au marché ;

Considérant qu'aux termes du 7 de l'article 8 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services, annexé au décret du 27 mai 1977, applicable au marché : En cas de résiliation du marché, quelle qu'en soit la cause, une liquidation des comptes est effectuée (...) ; qu'aux termes du 1 de l'article 30 du même cahier : (...) Le décompte de liquidation du marché (...) est arrêté par décision de la personne publique et notifié au titulaire ; qu'aux termes de l'article 34 de ce cahier : 34.1 Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu. / 34.2 La personne publique dispose d'un délai de deux mois compté à partir de la réception du mémoire de réclamation pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'à la suite de la réception d'un mémoire en réclamation présenté par son cocontractant en vue de l'établissement du décompte de liquidation, la personne publique doit produire dans le délai de deux mois ce décompte ; que, si le cocontractant, en cas d'absence de production de ce décompte, ne peut normalement saisir le juge qu'à l'expiration de ce délai, la présentation d'une demande anticipée au tribunal n'a pas par elle-même pour effet de rendre la demande irrecevable ; que, toutefois, l'intervention du décompte liquidatif au cours de cette période rend sans objet la saisine du juge ; que, dans l'hypothèse où la personne publique notifie ensuite un décompte liquidatif après l'expiration du délai, ce document ne saurait être regardé comme un décompte liquidatif, au sens des dispositions du cahier des clauses administratives générales, en sorte que le litige conserve son objet et qu'il y a lieu pour le juge de le trancher ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, la SOCIETE COVED ayant adressé au Smicotom, ainsi qu'il a été dit, une réclamation le 26 juillet 2001, dont celui-ci a accusé réception le lendemain, en vue de l'intervention du décompte liquidatif, la cour a commis une erreur de droit en jugeant que le document adressé par le syndicat après l'expiration de ce délai de deux mois prévu pour la production de ce décompte liquidatif, devait néanmoins être regardé comme ce décompte et en en déduisant que, la société ne l'ayant pas contesté dans les délais prévus, sa demande était irrecevable ; que, par suite, l'arrêt attaqué doit être annulé pour ce motif ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du Syndicat médocain intercommunal pour la collecte et le traitement des ordures ménagères en Médoc dirigées contre la SOCIETE COVED qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce syndicat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE COVED et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 2 septembre 2008 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Le Syndicat médocain intercommunal pour la collecte et le traitement des ordures ménagères en Médoc versera à la SOCIETE COVED une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du Syndicat médocain intercommunal pour la collecte et le traitement des ordures ménagères en Médoc tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE COVED et au Syndicat médocain intercommunal pour le traitement et la collecte des ordures ménagères en Médoc.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 322337
Date de la décision : 04/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXÉCUTION FINANCIÈRE DU CONTRAT - RÈGLEMENT DES MARCHÉS - DÉCOMPTE GÉNÉRAL ET DÉFINITIF - MARCHÉ PUBLIC DE FOURNITURES COURANTES ET DE SERVICES - CCAG (ART - 8) - SAISINE PRÉMATURÉE DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF - INTERVENTION DU DÉCOMPTE GÉNÉRAL - 1) AVANT L'EXPIRATION DU DÉLAI DE DEUX MOIS PRÉVU À L'ARTICLE 8 - NON-LIEU À STATUER - EXISTENCE - 2) APRÈS L'EXPIRATION DU DÉLAI DE DEUX MOIS - NON-LIEU À STATUER - ABSENCE [RJ1].

39-05-02-01 En vertu de l'article 8 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de fournitures courantes et de services, le cocontractant peut saisir le tribunal administratif si, deux mois après sa réclamation en vue de l'établissement du décompte de liquidation, la personne publique n'a pas produit ce décompte. En cas de saisine prématurée du tribunal administratif, qui n'est pas de ce seul fait irrecevable : 1) l'intervention du décompte général avant l'expiration du délai de deux mois entraîne un non-lieu à statuer ; 2) en revanche, l'intervention du décompte général après l'expiration du délai de deux mois ne permet pas de prononcer le non-lieu à statuer, un tel document ne constituant pas un décompte général au sens des dispositions du CCAG.

PROCÉDURE - INCIDENTS - NON-LIEU - 1) EXISTENCE - INTERVENTION DU DÉCOMPTE DE LIQUIDATION D'UN MARCHÉ PUBLIC DE FOURNITURES COURANTES ET DE SERVICES AVANT L'EXPIRATION DU DÉLAI DE DEUX MOIS PRÉVU À L'ARTICLE 8 DU CCAG - 2) ABSENCE - INTERVENTION DU DÉCOMPTE APRÈS L'EXPIRATION DE CE DÉLAI [RJ1].

54-05-05 En vertu de l'article 8 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de fournitures courantes et de services, le cocontractant peut saisir le tribunal administratif si, deux mois après sa réclamation en vue de l'établissement du décompte de liquidation, la personne publique n'a pas produit ce décompte. En cas de saisine prématurée du tribunal administratif, qui n'est pas de ce seul fait irrecevable : 1) l'intervention du décompte général avant l'expiration du délai de deux mois entraîne un non-lieu à statuer ; 2) en revanche, l'intervention du décompte général après l'expiration du délai de deux mois ne permet pas de prononcer le non-lieu à statuer, un tel document ne constituant pas un décompte général au sens des dispositions du CCAG.


Références :

[RJ1]

Rappr., s'agissant des dispositions du CCAG - travaux, CE, 8 août 2008, Société Bleu Azur, n° 290051, T. p. 813.


Publications
Proposition de citation : CE, 04 mai. 2011, n° 322337
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Philippe Mettoux
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP LAUGIER, CASTON ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:322337.20110504
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