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16/03/2011 | FRANCE | N°347238

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 16 mars 2011, 347238


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 et 7 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Taleb A, domicilié ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1018221/9 du 22 octobre 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa requête tendant à suspendre l'exécution de la décision du 23 septembre 2010 par laquelle le préfet de police a rejet

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 et 7 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Taleb A, domicilié ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1018221/9 du 22 octobre 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa requête tendant à suspendre l'exécution de la décision du 23 septembre 2010 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande d'admission sur le territoire français au titre de l'asile et a ordonné sa remise aux autorités grecques dans le cadre du traitement de sa demande d'asile ;

2°) de suspendre l'exécution de la décision du 23 septembre 2010 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande d'admission sur le territoire français au titre de l'asile et a ordonné sa remise aux autorités grecques ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 8 jours à compter de la date de l'ordonnance à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 ;

il soutient que l'ordonnance attaquée est entachée d'un défaut de motivation, d'erreur de fait, de dénaturation des faits et d'erreur de droit ; qu'il a fait valoir des éléments circonstanciés de nature à faire établir le caractère illégal du refus des autorités françaises de faire usage de la faculté d'examiner sa demande d'asile ; que sa demande d'asile ne pouvait relever de la compétence des autorités grecques dès lors qu'il démontrait qu'il avait été maltraité en Grèce et n'avait bénéficié d'aucune des garanties que le droit communautaire reconnaît aux demandeurs d'asile ; que la Cour européenne des droits de l'homme, dans un arrêt du 21 janvier 2011, a indiqué que les demandeurs d'asile font l'objet de traitements inhumains et dégradants en Grèce, en violation des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ayant séjourné plusieurs jours en Grèce, il n'a pas eu la possibilité de déposer une demande d'asile et de bénéficier de conditions d'accueil assurant ses besoins fondamentaux ; qu'ainsi, la décision attaquée porte une atteinte grave et manifestement illégale à son droit d'asile ; qu'il n'a pu bénéficier d'une information complète sur la procédure dans une langue qu'il comprenait telle qu'exigée par les dispositions de l'article 3 § 4 du règlement 343/2003 et de l'article 10 de la directive CE 2005/85 du 1er décembre 2005 ; que le préfet de police a porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit d'asile dès lors que malgré ses demandes, il ne lui a pas fait bénéficier des conditions matérielles d'accueil applicables y compris aux personnes faisant l'objet d'une détermination de l'Etat responsable ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2011, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, qui conclut au non lieu à statuer sur les conclusions de la requête aux fins d'annulation de l'ordonnance attaquée ; il soutient que la requête de M. A est devenue sans objet, dans la mesure où par arrêté du 7 février 2011, le préfet de police a décidé d'assigner à résidence M. A, ce qui a eu pour effet d'abroger l'arrêté de réadmission contesté ; que, par courrier en date du 3 février 2011, la Cour européenne des droits de l'homme a demandé au gouvernement français de ne pas renvoyer immédiatement M. A en Grèce en application de l'article 39 du règlement intérieur de la Cour ; que, dès lors, le préfet de police ne peut mettre à exécution la mesure de réadmission vers la Grèce prise à l'encontre de l'intéressé ; qu'ainsi, la condition d'urgence n'est pas remplie ;

Vu les observations, enregistrées le 10 mars 2011, présentées pour M. A, qui souscrit aux conclusions de non-lieu à statuer présentées par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration mais maintient ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu la lettre informant les parties du report au 15 mars 2011 de l'audience de l'affaire prévue le 11 mars 2011 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 et le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, pris pour son application ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A et, d'autre part, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 15 mars 2011 à 14 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Monod, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A ;

- la représentante du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, ressortissant iranien, né en 1971, est entré en France le 14 juin 2010 et a sollicité le statut de réfugié auprès du préfet de police ; que la consultation du fichier Eurodac des empreintes digitales a permis de constater qu'il avait transité par la Grèce ; que les autorités grecques ont accepté sa réadmission le 10 août 2010 ; qu'en conséquence, le préfet de police a, par une décision en date du 23 septembre 2010, refusé l'admission de M. A sur le territoire au titre de l'asile et ordonné sa réadmission vers la Grèce ; que, par l'ordonnance dont M. A interjette appel, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la suspension de l'exécution de la décision du préfet de police décidant sa remise aux autorités grecques ; que M. A fait appel de cette ordonnance ;

Considérant qu'en l'espèce, le président de la 5ème section de la Cour européenne des droits de l'homme, saisi par M. A sur le fondement de l'article 39 du règlement de la Cour, a, le 3 février 2011, demandé au gouvernement français de surseoir au renvoi de M. A vers la Grèce durant l'examen de la requête introduite par l'intéressé devant la Cour ; que cette mesure, qui a pour objet de garantir l'effectivité du droit au recours individuel prévu à l'article 34 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, s'impose aux autorités françaises ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment tant des documents produits devant le juge des référés du Conseil d'Etat que des débats au cours de l'audience publique, que l'administration a pris les dispositions nécessaires au respect des exigences qui lui incombent à cet égard ; qu'en particulier, le préfet de police a prononcé, le 7 février 2011, l'assignation à résidence de M. A ; qu'enfin il a été confirmé qu'aucune mesure de réadmission vers la Grèce ne serait mise à exécution tant que la Cour européenne des droits de l'homme maintiendrait la suspension d'une telle mesure ; que, dans ces conditions, la condition d'urgence particulière à laquelle l'article L. 521-2 du code de justice administrative subordonne l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il lui confère ne peut être regardée comme remplie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appel de M. A ne peut être accueilli ; qu'ainsi, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Taleb A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie sera adressée au préfet de police.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 347238
Date de la décision : 16/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 mar. 2011, n° 347238
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André Schilte
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:347238.20110316
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