Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le COMITE HARKIS ET VERITE, dont le siège est BP 23 à Le Mée-sur-Seine (77350), en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; le COMITE HARKIS ET VERITE demande au Conseil d'Etat, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation du 1 du II de la circulaire du 30 juin 2010 du Premier ministre relative à la prorogation de mesures prises en faveur des anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie et de leurs familles, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles 9 de la loi n° 97-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés, 2 de loi n° 94-488 du 11 juin 1994 relative aux rapatriés, anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie, 47 de la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999, 67 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002 et 6, 7 et 9 de la loi 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 1er et 61-1 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Considérant que l'article 9 de la loi du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés dispose qu'une allocation est versée aux anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives ayant servi en Algérie, qui ont conservé la nationalité française en application de l'article 2 de l'ordonnance du 21 juillet 1962 relative à certaines dispositions concernant la nationalité française, et qui ont fixé leur domicile en France, ainsi que, après leur décès, à leur conjoint survivant et à leurs enfants, s'ils remplissent notamment les mêmes conditions ; que l'article 2 de la loi du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie subordonne aux respect des conditions posées par les dispositions précédemment rappelées de l'article 9 de la loi du 16 juillet 1987 le versement aux mêmes personnes d'une allocation forfaitaire complémentaire, la condition de résidence étant cependant étendue aux Etats membres de l'Union européenne ; que l'article 47 de la loi du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999 prévoit l'octroi d'une rente viagère aux personnes désignées par les dispositions des articles 2 de la loi du 11 juin 1994 et 9 de la loi du 16 juillet 1987 et qui remplissent les conditions posées par ces dispositions ; que l'article 67 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002 prolonge jusqu'au 31 décembre 2003, en le renommant allocation de reconnaissance mais aux mêmes conditions, le régime d'aide résultant des dispositions précédentes ; que l'article 6 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, qui modifie certains éléments du régime de l'allocation de reconnaissance, maintient la double condition de nationalité et de résidence en France ou dans un Etat membre de la Communauté européenne ; que l'article 7 de la même loi est relatif aux aides à l'accession à la propriété dont bénéficient les personnes qui remplissent les conditions précédemment énoncées ; qu'enfin l'article 9 de la même loi permet au ministre chargé des rapatriés d'accorder, par dérogation aux conditions fixées par les dispositions précédentes, le bénéfice de ces aides aux anciens membres des formations supplétives ayant servi en Algérie ou à leurs veuves qui peuvent justifier d'un domicile continu en France ou dans un Etat membre de la Communauté européenne et qui ont acquis la nationalité française avant le 1er janvier 1995 ;
Considérant que ces dispositions sont applicables au présent litige au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ; qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré, notamment, de ce qu'elles portent atteinte au principe d'égalité devant la loi qui découle de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle renvoie le Préambule de la Constitution, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;
D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des dispositions des articles 9 de la loi n° 97-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés, 2 de loi n° 94-488 du 11 juin 1994 relative aux rapatriés, anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie, 47 de la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999, 67 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002 et 6, 7 et 9 de la loi 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au COMITE HARKIS ET VERITE, au Premier ministre (Mission interministérielle aux rapatriés), à la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, au ministre du travail, de l'emploi et de la santé, au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, au ministre d'Etat, ministre de la défense et des anciens combattants et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.