Vu 1°), sous le n° 316953, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juin et 9 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE ET SERVICES ASSOCIES (FEP), dont le siège est 34, boulevard Maxime Gorki à Villejuif cedex (94808) ; la FEP demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er avril 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité portant extension d'un accord national professionnel conclu dans le secteur des services à la personne le 12 octobre 2007 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 316968, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juin et 9 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVEES POUR LES PERSONNES AGEES (SYNERPA), dont le siège est 164, boulevard du Montparnasse à Paris (75014) ; le SYNERPA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 1er avril 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité portant extension d'un accord national professionnel conclu dans le secteur des services à la personne le 12 octobre 2007, d'autre part, la décision du 18 avril 2008 par laquelle ce ministre a rejeté sa demande tendant à l'extension des avenants n° 10 et 11 du 18 juin 2007 ayant pour objet de modifier le champ professionnel de l'annexe du 10 décembre 2002 à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................
Vu 3°), sous le n° 317301, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juin et 18 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE ET SERVICES ASSOCIES (FEP), dont le siège est 34, boulevard Maxime Gorki à Villejuif cedex (94808) ; la FEP demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 18 avril 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a refusé de procéder à l'extension de l'annexe n° 2 du 24 janvier 2007 à la convention collective nationale des entreprises de propreté, intitulée entretien de la maison ;
2°) d'enjoindre au ministre de procéder à l'extension de cette annexe ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE ET SERVICES ASSOCIES, de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la Fédération des entreprises de services à la personne,
- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE ET SERVICES ASSOCIES, à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES et à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la Fédération des entreprises de services à la personne ;
Considérant que le SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES et la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE demandent l'annulation de l'arrêté du 1er avril 2008 par lequel le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a procédé à l'extension de l'accord national professionnel conclu le 12 octobre 2007 dans le secteur des services à la personne ; qu'ils demandent également l'annulation de deux décisions du 18 avril 2008 par lesquelles le même ministre a, en raison de l'extension à laquelle il venait d'être procédé, d'une part, refusé l'extension des avenants n° 10 et 11 du 18 juin 2007 à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée, d'autre part, refusé l'extension de l'annexe n° 2 du 24 janvier 2007 à la convention collective nationale des entreprises de propreté ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes afin d'y statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre l'arrêté du 1er avril 2008 portant extension de l'accord national professionnel du 12 octobre 2007 :
Considérant qu'eu égard à l'objet de cet arrêté, qui procède à l'extension d'un accord visant à fixer un cadre de négociation de conditions d'emploi et de travail communes à l'ensemble des salariés des entreprises de services à la personne, le SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES et la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE, qui ont pour objet statutaire de représenter des entreprises de services, justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour en demander l'annulation intégrale, nonobstant la circonstance qu'elles ne seraient représentatives que de certaines catégories d'entreprises de services ;
Sur la légalité de l'arrêté du 1er avril 2008, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 133-8 du code du travail, alors en vigueur : A la demande d'une des organisations visées à l'article L. 133-1 ou à l'initiative du ministre chargé du travail, les dispositions d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel (...) peuvent être rendues obligatoires pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de ladite convention ou dudit accord, par arrêté du ministre chargé du travail, après avis motivé de la commission nationale de la négociation collective (...). ; que selon l'article L. 133-11 du même code alors en vigueur : Quand l'avis motivé favorable de la commission nationale de la négociation collective a été émis sans l'opposition écrite et motivée soit de deux organisations d'employeurs soit de deux organisations de salariés représentées à cette commission, le ministre chargé du travail peut, conformément aux règles fixées aux articles ci-dessus, étendre par arrêté une convention ou un accord ou leurs avenants ou annexes : / 1°) Lorsque le texte n'a pas été signé par la totalité des organisations les plus représentatives intéressées (...), en cas d'opposition dans les conditions prévues au premier alinéa, le ministre chargé du travail peut consulter à nouveau la commission sur la base d'un rapport qui précise la portée des dispositions en cause ainsi que les conséquences d'une éventuelle extension./ Le ministre chargé du travail peut décider l'extension, au vu du nouvel avis émis par la commission ; cette décision doit être motivée. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'opposition écrite et motivée de deux organisations d'employeurs, le ministre chargé du travail a, conformément aux dispositions citées ci-dessus de l'article L. 133-11 du code du travail, consulté une nouvelle fois la commission nationale de la négociation collective ; qu'au vu du nouvel avis rendu par la commission, il a étendu, par l'arrêté attaqué, l'accord national professionnel conclu dans le secteur des services à la personne le 12 octobre 2007 ; que cet arrêté, qui se borne à faire mention de l'existence de deux avis motivés de la commission nationale de la négociation collective et d'oppositions formulées par certains syndicats, ne comporte aucune considération justifiant l'extension, malgré ces oppositions, de l'accord litigieux ; qu'il ne peut dès lors être regardé comme suffisamment motivé au regard des exigences de l'article L. 133-11 du code du travail ; qu'ainsi, le SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES et la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE sont fondés à en demander l'annulation ;
Sur la légalité des décisions de refus d'extension du 18 avril 2008 :
Considérant que ces décisions sont fondées sur le seul motif que le champ d'application des accords dont l'extension a été refusée recoupe celui qui résulte de l'extension de l'accord professionnel du 12 octobre 2007 à laquelle a procédé l'arrêté du 1er avril 2008 ; que cet arrêté étant, pour les motifs énoncés ci-dessus, entaché d'illégalité, le motif retenu par les décisions du 18 avril 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité est lui-même illégal ; que les requérants sont, dès lors, fondés à demander l'annulation des deux décisions du 18 avril 2008 qu'ils attaquent ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant, d'une part, que l'annulation de la décision du 18 avril 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité refusant l'extension de l'annexe n° 2 du 24 janvier 2007 à la convention collective nationale des entreprises de propreté, intitulée entretien de la maison n'implique pas que le ministre procède à cette extension ; que par suite les conclusions de la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité de prendre un arrêté étendant cette annexe doivent être rejetées ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions du SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité de réexaminer sa demande d'extension des avenants n° 10 et 11 du 18 juin 2007 ayant pour objet de modifier le champ professionnel de l'annexe du 10 décembre 2002 à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée ; qu'il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacun des requérants de la somme de 3 000 euros en application de ces dispositions ; que les conclusions présentées au titre des mêmes dispositions par la Fédération des services aux particuliers ne peuvent en revanche qu'être rejetées ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêté du 1er avril 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité portant extension d'un accord national professionnel conclu dans le secteur des services à la personne le 12 octobre 2007 est annulé.
Article 2 : Les décisions du 18 avril 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité refusant l'extension, d'une part, des avenants n° 10 et 11 du 18 juin 2007 ayant pour objet de modifier le champ professionnel de l'annexe du 10 décembre 2002 à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée, d'autre part, de l'annexe n° 2 du 24 janvier 2007 à la convention collective nationale des entreprises de propreté, intitulée entretien de la maison sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique de réexaminer la demande d'extension des avenants n° 10 et 11 du 18 juin 2007 ayant pour objet de modifier le champ professionnel de l'annexe du 10 décembre 2002 à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée.
Article 4 : L'Etat versera, d'une part au SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES, d'autre part à la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions du SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSEMENTS ET RESIDENCES PRIVEES POUR LES PERSONNES AGEES et de la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE est rejeté.
Article 6 : Les conclusions présentées par la Fédération des services aux particuliers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DES ETABLISSENTS ET RESIDENCES PRIVES POUR LES PERSONNES AGEES, à la FEDERATION DES ENTREPRISES DE PROPRETE et au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Copie en sera adressée pour information à la Fédération des services aux particuliers, à la FGTA-FO, à la Confédération française des travailleurs chrétiens, à la Confédération française de l'encadrement-CGC et à la Fédération des services CFDT.