Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 4 décembre 2008 et le 4 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS, dont le siège est 180 boulevard Haussmann à Paris (75008), la FEDERATION DE STOMATOLOGIE ET CHIRURGIE MAXILLO FACIALE, dont le siège est 7 avenue de la Gare à Pignan (34570), l'INTERSYNDICAT NATIONAL DES CHEFS DE CLINIQUE ASSISTANTS HOPITAUX DE VILLE ET AHU DES HOPITAUX, dont le siège est 17 rue du Fer à Moulin à Paris (75005), l'INTERSYNDICAT NATIONAL DES INTERNES DES HOPITAUX, dont le siège est 17 rue du Fer à Moulin à Paris (75005) et M. Yves A, demeurant ... ; le CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS et autres demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er juillet 2008 du collège des directeurs de l'union nationale des caisses d'assurance maladie fixant la liste des actes techniques ouvrant droit à la prise en charge ou au remboursement par l'assurance maladie lorsqu'ils sont réalisés par un chirurgien-dentiste ;
2°) de mettre à la charge de l'union nationale des caisses d'assurance maladie la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat du conseil national de l'ordre des médecins et autres, de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la confédération nationale des syndicats dentaires, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de l'union nationale des caisses d'assurance maladie,
- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat du conseil national de l'ordre des médecins et autres, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la confédération nationale des syndicats dentaires, à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du conseil national de l'ordre des chirurgiens dentistes et à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de l'union nationale des caisses d'assurance maladie ;
Sur les interventions du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et de la confédération nationale des syndicats dentaires :
Considérant que le conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et la confédération nationale des syndicats dentaires ont intérêt au maintien de la décision attaquée ; que leurs interventions sont, dès lors, recevables ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes :
Considérant que, contrairement à ce que soutient le conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, le CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS, la FEDERATION DE STOMATOLOGIE ET CHIRURGIE MAXILLO FACIALE, l'INTERSYNDICAT NATIONAL DES CHEFS DE CLINIQUE ASSISTANTS HOPITAUX DE VILLE ET AHU DES HOPITAUX, l'INTERSYNDICAT NATIONAL DES INTERNES DES HOPITAUX et M. A justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour attaquer la décision du collège des directeurs de l'union nationale des caisses d'assurance maladie fixant la liste des actes techniques, également réalisés par des médecins, ouvrant droit à la prise en charge ou au remboursement par l'assurance maladie lorsqu'ils sont réalisés par un chirurgien-dentiste ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale : La prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé, dans le cadre d'un exercice libéral ou d'un exercice salarié auprès d'un autre professionnel de santé libéral (...) est subordonné à leur inscription sur une liste établie dans les conditions fixées au présent article. (...) / Les conditions d'inscription d'un acte ou d'une prestation, leur inscription et leur radiation sont décidées par l'union nationale des caisses d'assurance maladie, après avis de la haute autorité de santé et de l'union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (...) ; que selon l'article L. 182-2-3 du même code, le conseil de l'union nationale des caisses d'assurance maladie délibère notamment sur les orientations de l'union relatives aux inscriptions d'actes et de prestations prévues aux articles L. 162-1-7 et L. 162-1-7-2 sur la base des principes généraux définis annuellement par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ; qu'enfin selon l'article L. 182-2-4 du même code, le collège des directeurs met en oeuvre les orientations fixées par le conseil relatives aux inscriptions d'actes et prestations prévues aux articles L. 162-1-7 et L. 162-1-7-2 ;
Considérant que par la décision attaquée du 1er juillet 2008, le collège des directeurs de l'union nationale des caisses d'assurance maladie a modifié sa décision du 11 mars 2005 relative à la liste des actes ou prestations pris en charge ou remboursés par l'assurance maladie en prévoyant que, par dérogation au principe énoncé au livre I de cette décision selon lequel les dispositions générales fixées par ce livre ainsi que la liste d'actes mentionnés au livre II ne concernent que les seuls médecins, 98 actes techniques de chirurgie, inscrits par la décision litigieuse dans une nouvelle annexe IV, ouvrent désormais droit à la prise en charge ou au remboursement par l'assurance maladie lorsqu'ils sont réalisés par un chirurgien-dentiste ;
Considérant que, compte tenu de sa portée, la décision attaquée ne peut être regardée comme se bornant à mettre en oeuvre les orientations arrêtées par le conseil de l'union nationale des caisses d'assurance maladie lors de sa délibération du 24 novembre 2004, préalable à l'adoption de la décision du collège des directeurs du 11 mars 2005 ; qu'en effet, il ressort des pièces du dossier que ces orientations, d'ailleurs débattues dans le cadre de la préparation de la convention médicale, ne concernaient que la cotation des actes réalisés par des médecins et n'envisageaient pas l'extension de la classification commune des actes médicaux à d'autres professionnels de santé ; qu'en l'absence de toute autre délibération du conseil de l'union nationale des caisses d'assurance maladie fixant de telles orientations, la décision d'inscription litigieuse est entachée d'un défaut de base légale ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur requête, le CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS et autres sont, dès lors, fondés à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que le conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, intervenant en défense, n'aurait pas eu qualité pour faire tierce opposition s'il n'avait pas été présent à l'instance ; que, ne pouvant dès lors être regardé comme une partie pour l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ses conclusions présentées sur ce fondement ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que les requérants, qui ne sont pas la partie perdante, versent à l'union nationale des caisses d'assurance maladie la somme demandée par celle-ci au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'enfin il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'union nationale des caisses d'assurance maladie le versement aux requérants de la somme globale de 3 000 euros au titre de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et de la confédération nationale des syndicats dentaires sont admises.
Article 2 : La décision du 1er juillet 2008 du collège des directeurs de l'union nationale des caisses d'assurance maladie est annulée.
Article 3 : L'union nationale des caisses d'assurance maladie versera au CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS et autres la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de l'union nationale des caisses d'assurance maladie et du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS, premier requérant dénommé, à l'union nationale des caisses d'assurance maladie, au conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et à la confédération nationale des syndicats dentaires. Les autres requérants seront informés de la présente décision par la SCP Vier-Barthélémy-Matuchansky, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.
Copie en sera adressée pour information au ministre de la santé et des sports.