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16/03/2010 | FRANCE | N°336142

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 16 mars 2010, 336142


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 février 2010, présentée par Mme Annie Ghislaine A, demeurant ..., agissant en qualité de représentant légal des enfants Bénédicte B et Chris Djos C ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision d

u 3 février 2009 du consul général de France à Libreville (Gabon), refusant...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 février 2010, présentée par Mme Annie Ghislaine A, demeurant ..., agissant en qualité de représentant légal des enfants Bénédicte B et Chris Djos C ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 3 février 2009 du consul général de France à Libreville (Gabon), refusant un visa de long séjour sollicité à ses enfants, Bénédicte B et Chris Djos C, en qualité de membres de famille d'un réfugié statutaire ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer la demande de visa de long séjour de ses enfants dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que la condition d'urgence est remplie en raison de la durée de plus de six ans de séparation d'avec ses enfants ; qu'il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ; qu'en effet, elle est entachée d'un défaut de motivation ; qu'en outre, elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation puisque la filiation est établie par plusieurs éléments, notamment par les jugements civils en date du 22 septembre 2008 du tribunal d'instance de Foundou-Foundo, dont il n'est pas démontré qu'ils sont frauduleux ; que, par suite, l'administration ne pouvait mettre en doute le bien-fondé de ce jugement ; que la décision contestée méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant le droit à une vie familiale normale ;

Vu la copie du recours présenté à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation de la décision de cette commission ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2010, et le mémoire rectificatif, enregistré le 10 mars 2010, présentés par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que l'urgence n'est pas établie puisque la durée de la séparation est en grande partie due à la requérante et aux difficultés des autorités consulaires à authentifier les actes produits ; que la filiation n'est pas authentique ; qu'il n'existe aucun doute sérieux sur la légalité de la décision ; qu'en effet, il n'est pas démontré que la requérante ait demandé à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France la communication des motifs de sa décision ; que les incohérences entachant les états civils des enfants justifient que les jugements ne puissent être opposables à l'administration ; qu'en effet, il apparaît que la véracité des déclarations sur le fondement desquelles ont été établis les jugements ne peut qu'être mise en doute ; qu'ainsi, la décision contestée ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme puisque la filiation n'est pas établie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 11 mars 2010 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A ;

- Mme A ;

- les représentantes de Mme A ;

- le représentant du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. ;

Considérant que Madame A, de nationalité congolaise, demande la suspension de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision en date du 3 février 2009 du consul général de France à Libreville (Gabon) refusant la délivrance d'un visa de long séjour regroupement familial à ses enfants, Bénédicte B et Chris C ;

Considérant que pour rejeter les demandes de visa de long séjour présentées pour Bénédicte B et Chris C, les autorités consulaires se sont fondées sur ce que les documents d'état civil présentés n'avaient pas permis d'établir la filiation de manière certaine ;

Considérant que la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de Mme A contre la décision du 3 février 2009 du consul général de France à Libreville, refusant la délivrance d'un visa de long séjour à ses enfants s'est définitivement substituée à la décision du consul ; que, par suite, n'est pas propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France le moyen tiré d'une absence de motivation de la décision du consul général de France à Tanger ; que Mme A n'établit pas avoir demandé à la commission communication des motifs de la décision de refus ;

Considérant que s'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer aux enfants mineurs d'un réfugié statutaire le visa qu'ils sollicitent afin de mener une vie familiale normale, elles peuvent toutefois opposer un refus à une telle demande pour un motif d'ordre public, notamment en cas de fraude ; qu'en l'espèce les actes de naissance des enfants, Bénédicte B et Chris C présentés à l'appui de la demande de visa à leur profit n'étaient pas présents dans les registres d'état-civil locaux ; que si Madame A produit à l'instance deux jugements d'inscription tardive de naissance des deux enfants rendus le 22 septembre 2008 par le tribunal d'instance de Foundou Foundou, les indications d'état-civil figurant sur ces jugements diffèrent de celles figurant sur les autres documents, notamment en ce qui concerne le lieu de naissance et l'identité du père ; que ces jugements ont été établis à la demande des pères respectifs alors que Madame A a déclaré n'avoir plus vu son concubin auquel elle attribue la paternité de ses enfants depuis 1998 ; que dans ces conditions et eu égard aux nombreuses contradictions qui caractérisent les déclarations de Madame A, cette dernière n'est, en l'état de l'instruction au jour de la présente ordonnance, pas fondée à soutenir qu'il existe un doute sérieux sur la légalité du motif d'ordre public qui fonde le refus de visa dont elle demande la suspension ;

Considérant qu'eu égard au motif d'ordre public qui fonde la décision dont la requérante demande la suspension, les moyens tirés d'une erreur manifeste d'appréciation et de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas propres à créer un doute sérieux sur la légalité de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme A, y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Annie Ghislaine A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 336142
Date de la décision : 16/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 mar. 2010, n° 336142
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Camguilhem
Rapporteur ?: Mme Anne-Marie Camguilhem
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:336142.20100316
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