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28/12/2009 | FRANCE | N°316479

France | France, Conseil d'État, Assemblée, 28 décembre 2009, 316479


Vu 1°), sous le n° 316479, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 mai et 16 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT), dont le siège est 8bis, rue Lecuirot à Paris (75014) ; le SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 organisant les conditions d'exercice des fonctions, en position d'activité, dans les administrations d

e l'Etat ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 eu...

Vu 1°), sous le n° 316479, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 mai et 16 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT), dont le siège est 8bis, rue Lecuirot à Paris (75014) ; le SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 organisant les conditions d'exercice des fonctions, en position d'activité, dans les administrations de l'Etat ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 317271, la requête, enregistrée le 17 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT NATIONAL UNITAIRE TRAVAIL EMPLOI FORMATION INSERTION FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE, dont le siège est 78, rue Lecourbe à Paris (75015) ; le SYNDICAT NATIONAL UNITAIRE TRAVAIL EMPLOI FORMATION INSERTION FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 organisant les conditions d'exercice des fonctions, en position d'activité, dans les administrations de l'Etat ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention internationale du travail n° 81 concernant l'inspection du travail dans l'industrie et le commerce ;

Vu la convention internationale du travail nº 88 concernant l'organisation du service de l'emploi ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 82-450 du 28 mai 1982 ;

Vu le décret n° 97-364 du 18 avril 1997 ;

Vu le décret n° 2003-770 du 20 août 2003 ;

Vu le décret n° 2006-1033 du 22 août 2006 ;

Vu le décret n° 2007-279 du 2 mars 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat du SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT),

- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat du SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT).

Considérant que les présentes requêtes sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

Sur la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le décret attaqué ne diffère de la version adoptée par le Conseil d'Etat qu'en tant qu'il comporte le contreseing du secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique ; que la présence de ce contreseing qui n'était pas requis n'entache pas ce décret d'irrégularité ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des dispositions combinées des articles 13 et 19 de la Constitution, les décrets délibérés en conseil des ministres sont signés par le Président de la République et contresignés par le Premier ministre et, le cas échéant, par les ministres responsables ; que les ministres responsables sont ceux auxquels incombent, à titre principal, la préparation et l'application de ces décrets ; que le décret attaqué, qui a été délibéré en conseil des ministres, a pour objet d'élargir la possibilité d'affecter en position d'activité un fonctionnaire de l'Etat à l'ensemble des emplois des services et établissements publics de l'Etat ; qu'ainsi n'était requis, eu égard à cet objet, que le contreseing du ministre chargé de la fonction publique ; que par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'irrégularité, au motif qu'il ne comporte pas le contreseing d'autres ministres, notamment du ministre chargé du travail, doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat a été consulté sur l'ensemble des questions traitées par le décret attaqué ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 28 mai 1982 relatif au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat : Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat est saisi : (...) / 4° des projets de décret relatifs à la situation de l'ensemble des agents publics de l'Etat ; / 5° des projets de décret comportant des dispositions statutaires communes à plusieurs corps de fonctionnaires de l'Etat (...) et qu'aux termes de l'article 13 du même décret : La formation spéciale dite commission des statuts (...) examine : / a) les projets de décret comportant des dispositions de nature statutaire communes à plusieurs corps de fonctionnaires de l'Etat (...) ; que lorsqu'un décret comporte, comme c'est le cas du décret attaqué, des dispositions statutaires concernant l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat, il doit être soumis à l'assemblée plénière du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat sur le fondement du 4° de l'article 2 du décret précité et non, comme le soutiennent les requérants, à la commission des statuts de ce conseil, sur le fondement des dispositions combinées du 5° de l'article 2 et du a) de l'article 13 du même décret ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'irrégularité au motif qu'il a été soumis à l'assemblée plénière du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, alors qu'il aurait dû l'être à la commission des statuts de ce conseil, doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, que le même article 2 du décret du 28 mai 1982 prévoit, à son 9ème alinéa, que la consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, lorsqu'elle est obligatoire (...), remplace celle du ou des comités techniques paritaires compétents ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'irrégularité, au motif qu'il n'a pas été soumis pour avis au comité technique paritaire ministériel du ministère du travail, doit être écarté ;

Considérant, en sixième lieu, que la consultation du Conseil national de l'inspection du travail sur toute question à caractère général concernant le respect des missions et garanties de l'inspection du travail constitue, en vertu des dispositions de l'article 2 du décret du 2 mars 2007 instituant un conseil national de l'inspection du travail applicables à la date de publication du décret attaqué et reprises depuis lors à l'article D. 8121-3 du code du travail, une simple faculté ; que, par suite, la circonstance que ce conseil n'a pas été consulté sur le décret attaqué n'entache pas celui-ci d'irrégularité ;

Sur la légalité interne :

Sur l'application du décret attaqué à l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : Le grade est distinct de l'emploi. / Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent. ; qu'aux termes de l'article 13 de cette même loi : Les corps et cadres d'emplois de fonctionnaires sont régis par les statuts particuliers à caractère national. (...) ; qu'aux termes de l'article 13bis de cette même loi : Tous les corps et cadres d'emplois sont accessibles par voie de détachement dans les conditions prévues par leurs statuts particuliers, sous réserve, lorsque l'exercice des fonctions correspondantes est subordonné à la détention d'un titre ou d'un diplôme spécifique, de la détention de ce titre ou de ce diplôme. ; qu'aux termes de l'article 14 de la même loi : L'accès des fonctionnaires de l'Etat, des fonctionnaires territoriaux et des fonctionnaires hospitaliers aux deux autres fonctions publiques, ainsi que leur mobilité au sein de chacune de ces trois fonctions publiques, constituent des garanties fondamentales de leur carrière. / A cet effet, l'accès des fonctionnaires de l'Etat, des fonctionnaires territoriaux et des fonctionnaires hospitaliers aux deux autres fonctions publiques s'effectue par la voie du détachement suivi ou non d'une intégration. Les statuts particuliers peuvent également prévoir cet accès par voie de concours interne et, le cas échéant, de tour extérieur. / En outre, la mobilité des fonctionnaires entre les trois fonctions publiques peut s'exercer par la voie de la mise à disposition. ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 32 de la loi du 11 janvier 1984 : Tout fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes : 1° Activité à temps plein ou à temps partiel ; 2° Détachement ; 3° Position hors cadres ; 4° Disponibilité ; 5° Accomplissement du service national (...) 6° Congé parental. ; qu'aux termes de l'article 33 de la même loi : L'activité est la position du fonctionnaire qui, titulaire d'un grade, exerce effectivement les fonctions de l'un des emplois correspondant à ce grade ; que l'article 41 de cette loi dispose : La mise à disposition est la situation du fonctionnaire qui demeure dans son corps d'origine, est réputé occuper son emploi, continue à percevoir la rémunération correspondante, mais qui exerce des fonctions hors du service où il a vocation à servir. / Elle ne peut avoir lieu qu'avec l'accord du fonctionnaire (...) ; qu'aux termes de l'article 42 de cette même loi : I. La mise à disposition est possible auprès : / 1° Des administrations de l'Etat et de ses établissements publics ; 2° Des collectivités territoriales et de leurs établissements publics ; 3° Des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; / (...) ; qu'aux termes enfin de l'article 60 de cette loi : L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. / Dans les administrations ou services où sont dressés des tableaux périodiques de mutations, l'avis des commissions est donné au moment de l'établissement de ces tableaux. / Toutefois, lorsqu'il n'existe pas de tableaux de mutation, seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation de l'intéressé sont soumises à l'avis des commissions. / Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 18 avril 2008 attaqué : Les fonctionnaires de l'Etat ont vocation à exercer les fonctions afférentes à leur grade dans les services d'un ministère et, nonobstant toute disposition statutaire contraire : / 1° dans les établissements publics placés sous la tutelle de ce ministère ; / 2° dans les services et établissements publics relevant d'autres départements ministériels. / Dans le cas mentionné au 2°, leur affectation est prononcée par décision de l'autorité compétente de l'administration d'accueil. ; que ces dispositions réglementaires élargissent la possibilité d'affecter en position d'activité un fonctionnaire de l'Etat à l'ensemble des emplois des services et établissements publics de l'Etat ; qu'elles n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir légalement pour effet ni de déroger aux règles législatives qui définissent les positions des fonctionnaires de l'Etat et les conditions de mutation d'un emploi à un autre, lesquelles imposent notamment que toute mutation comportant changement de résidence ou modification de la situation de l'intéressé soit soumise à l'avis de la commission administrative paritaire du corps auquel celui-ci appartient, ni de porter atteinte à aucune des garanties fondamentales des fonctionnaires qu'il appartient au seul législateur de déterminer ; qu'au nombre de ces garanties fondamentales figurent, d'une part, le droit d'être affecté à un emploi pour exercer les missions afférentes au grade, que le fonctionnaire détient dans son corps, d'autre part, l'obligation, pour l'administration, de recueillir l'accord du fonctionnaire intéressé pour l'affecter à un emploi ne correspondant pas à de telles missions ; que le décret attaqué ne permet de prononcer, sous le contrôle du juge, que des affectations à des missions afférentes au grade que le fonctionnaire détient dans son corps, et ne déroge donc pas aux statuts particuliers en tant que ceux-ci définissent les missions de chaque corps et subordonnent, dans certains cas, l'exercice de ces missions à la détention d'un titre ou d'un diplôme spécifique ; qu'ainsi, en édictant ces dispositions, le gouvernement n'a ni excédé la compétence du pouvoir réglementaire, ni méconnu les dispositions législatives relatives aux positions, à la mobilité et à la mutation des fonctionnaires ;

Sur l'application du décret attaqué à l'inspection du travail :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 de la convention internationale du travail n° 81 concernant l'inspection du travail : Pour autant que cela sera compatible avec la pratique administrative du membre, l'inspection du travail sera placée sous la surveillance et le contrôle d'une autorité centrale ; qu'aux termes de l'article 5 de cette convention : L'autorité compétente devra prendre les mesures appropriées pour favoriser : / a) une coopération effective entre les services d'inspection, d'une part, et d'autres services gouvernementaux et les institutions publiques et privées exerçant des activités analogues d'autre part ; / b) la collaboration entre les fonctionnaires de l'inspection du travail et les employeurs et les travailleurs ou leurs organisations. ; que les dispositions de l'article 3 du décret du 22 août 2006 relatif à la création de la direction générale du travail au ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement applicables à la date de publication du décret attaqué et codifiées depuis lors aux articles R. 8121-13 et R. 8121-14 du code du travail précisent, d'une part, que cette autorité centrale est la direction générale du travail, d'autre part, que l'autorité de cette direction s'exerce dans le champ des relations du travail ; qu'aux termes de l'article 6 de cette convention : Le personnel de l'inspection sera composé de fonctionnaires publics dont le statut et les conditions de service leur assurent la stabilité dans leur emploi et les rendent indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence extérieure indue. ; qu'aux termes de l'article 7 de cette convention : (...) Les inspecteurs du travail doivent recevoir une formation appropriée, pour l'exercice de leurs fonctions. ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 611-1 du code du travail applicables à la date d'intervention du décret attaqué, et reprises depuis lors aux articles L. 8112-1 à L. 8112-2 de ce code : Les inspecteurs du travail sont chargés de veiller à l'application des dispositions du code du travail et des lois et règlements non codifiés relatifs au régime du travail, ainsi qu'à celles des conventions et accords collectifs de travail répondant aux conditions fixées au titre III du livre 1er dudit code. Ils sont également chargés, concurremment avec les agents et officiers de police judiciaire, de constater, s'il y échet, les infractions à ces dispositions. / Ils constatent, en outre, les infractions aux dispositions des articles L. 431, L. 472, deuxième alinéa, et L. 473, alinéa premier, du code de la sécurité sociale, les infractions aux dispositions de l'article L. 3511-7 du code de la santé publique et des règlements pris pour son application, ainsi que les infractions définies au 3° et au 6° de l'article 225-2 du code pénal et les infractions prévues par les articles 225-13 à 225-15-1 du même code. Ils constatent également les infractions prévues par les articles 21 et 21bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. / Dans les cas expressément prévus par la loi ou le règlement, ces attributions peuvent être exercées par des fonctionnaires de contrôle assimilés ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 611-12 du même code applicables à la date d'intervention du décret attaqué et reprises depuis lors à l'article L. 8112-5 de ce code : Les contrôleurs du travail (...) chargés de contrôles, d'enquêtes et de missions dans le cadre de l'inspection du travail exercent leur compétence sous l'autorité des inspecteurs du travail. ;

Considérant, enfin, qu'aux termes du I de l'article 3 du décret du 20 août 2003 portant statut particulier du corps de l'inspection du travail dans sa rédaction applicable à la date d'intervention du décret attaqué : Outre les missions qui leur sont imparties par l'article L. 611-1 du code du travail susvisé, les membres du corps de l'inspection du travail participent à la mise en oeuvre des politiques de l'emploi et de la formation professionnelle définies par les pouvoirs publics. et qu'aux termes de l'article 3 du décret du 18 avril 1997 portant statut particulier du corps des contrôleurs du travail : Les contrôleurs du travail participent à la réalisation de missions en matière de travail, d'emploi, de formation professionnelle et de protection sociale agricole. ;

Considérant que les syndicats requérants soutiennent que le décret attaqué méconnaîtrait ces stipulations conventionnelles ainsi que les règles statutaires résultant des dispositions législatives et réglementaires citées ci-dessus, d'une part en tant qu'il permettrait l'affectation des membres des corps des inspecteurs du travail et des contrôleurs du travail dans des emplois correspondant à d'autres missions, d'autre part en tant qu'il permettrait l'exercice de telles missions par des fonctionnaires autres que les membres de ces corps ;

Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué ne permet l'affectation en position d'activité des membres des corps des inspecteurs du travail et des contrôleurs du travail qu'aux fonctions afférentes à leur grade définies par leur statut particulier ; que ce décret n'a pas pour effet de permettre le changement de l'affectation d'un inspecteur ou d'un contrôleur du travail à raison de l'exercice par ceux-ci de leurs fonctions d'inspection ; qu'en vertu de l'article D. 8121-2 du code du travail, tout agent participant aux activités de contrôle de l'inspection du travail peut saisir le Conseil national de l'inspection du travail de tout acte d'une autorité administrative de nature à porter directement et personnellement atteinte aux conditions dans lesquelles il doit pouvoir exercer sa mission ; qu'en tout état de cause, les dispositions du décret attaqué ne sauraient avoir pour effet d'altérer la capacité du système d'inspection du travail à assurer les missions de contrôle de la législation du travail qui lui sont dévolues ; que, dans ces conditions, le décret attaqué ne porte pas atteinte au principe d'indépendance applicable aux corps concernés en tant qu'il permet, sous le contrôle du juge, l'affectation des membres de ces corps à des emplois de ministères autres que ceux chargés de l'inspection du travail ;

Considérant, en deuxième lieu, que si une affectation prise en application du décret attaqué peut avoir pour effet de soustraire un membre des corps de l'inspection du travail ou du contrôle du travail, au contrôle de l'autorité centrale , prévue par l'article 4 de la convention internationale du travail n° 81, laquelle est exercée par la direction générale du travail, il résulte de ces stipulations, ainsi qu'en dispose le décret du 22 août 2006, que l'autorité centrale exerce son autorité dans le champ des relations du travail ; qu'en tant qu'il permet de soustraire un membre de l'un des corps concernés au contrôle de cette autorité et, par voie de conséquence, au champ de compétence du Conseil national de l'inspection du travail, pour l'exercice de missions statutaires qui ne relèveraient pas du champ des relations du travail, le décret n'est donc pas contraire aux stipulations de l'article 4 ;

Considérant, en troisième lieu, que le décret attaqué est sans effet sur la définition des catégories de fonctionnaires dont la compétence est reconnue par le code du travail, en application de l'article L. 611-1, pour exercer des missions d'inspection du travail ; qu'il ne saurait donc être utilement soutenu que ce décret méconnaîtrait ces dispositions ; qu'il ne déroge pas au niveau de formation requis pour l'exercice de telles fonctions ; qu'enfin, il ne compromet pas l'application du principe d'indépendance, dont relèvent l'ensemble des agents exerçant les missions prévues à cette convention, quelle que soit leur position statutaire ; qu'ainsi, les syndicats requérants ne sont pas fondés à soutenir que le décret attaqué serait entaché d'illégalité en tant qu'il permettrait l'exercice de telles missions par des fonctionnaires autres que les membres des corps de l'inspection et du contrôle du travail ;

Considérant, enfin, que les stipulations de la convention internationale du travail n° 88 de l'Organisation internationale du travail relatives au service de l'emploi ne concernent pas le domaine d'action de l'inspection du travail ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par les dispositions du décret attaqué des stipulations de l'article 9 de cette convention est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes doivent être rejetées ; que doivent également être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions du SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT) tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes du SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT) et du SYNDICAT NATIONAL UNITAIRE TRAVAIL EMPLOI FORMATION INSERTION FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION (SYNTEF-CFDT), au SYNDICAT NATIONAL UNITAIRE TRAVAIL EMPLOI FORMATION INSERTION FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE, au Premier ministre, au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.


Synthèse
Formation : Assemblée
Numéro d'arrêt : 316479
Date de la décision : 28/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - PROCÉDURE CONSULTATIVE - MODALITÉS DE LA CONSULTATION - CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L'ETAT - PROJET DE DÉCRET COMPORTANT DES DISPOSITIONS STATUTAIRES CONCERNANT L'ENSEMBLE DES FONCTIONNAIRES DE L'ETAT - FORMATION COMPÉTENTE - ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE (ART - 2 - 4° DU DÉCRET DU 28 MAI 1982).

01-03-02-07 Lorsqu'un décret comporte des dispositions statutaires concernant l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat, il doit être soumis à l'assemblée plénière du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat sur le fondement du 4° de l'article 2 du décret n° 82-450 du 28 mai 1982 et non à la commission des statuts de ce conseil, sur le fondement des dispositions combinées du 5° de l'article 2 et du a) de l'article 13 du même décret.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - AFFECTATION ET MUTATION - AFFECTATION - DÉCRET DU 18 AVRIL 2008 ÉLARGISSANT LES POSSIBILITÉS D'AFFECTATION D'UN FONCTIONNAIRE DE L'ETAT EN POSITION D'ACTIVITÉ À L'ENSEMBLE DES EMPLOIS DES SERVICES ET ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE L'ETAT - LÉGALITÉ - EXISTENCE - PORTÉE - 1) DÉROGATION AUX RÈGLES DÉFINISSANT LES CONDITIONS DE MUTATION - ABSENCE - 2) POSSIBILITÉ D'AFFECTER UN FONCTIONNAIRE À UN EMPLOI NE CORRESPONDANT PAS À SON GRADE - ABSENCE - SAUF ACCORD DE L'INTÉRESSÉ - 3) DÉROGATION AUX STATUTS PARTICULIERS - EN TANT QU'ILS DÉFINISSENT LES MISSIONS DE CHAQUE CORPS ET - LE CAS ÉCHÉANT - SUBORDONNENT L'EXERCICE DE CES MISSIONS À LA DÉTENTION D'UN TITRE OU DIPLÔME - ABSENCE.

36-05-01-01 Les dispositions de l'article 1er du décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 élargissent la possibilité d'affecter en position d'activité un fonctionnaire de l'Etat à l'ensemble des emplois des services et établissements publics de l'Etat. 1) Elles n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir légalement pour effet ni de déroger aux règles législatives qui définissent les positions des fonctionnaires de l'Etat et les conditions de mutation d'un emploi à un autre, lesquelles imposent notamment que toute mutation comportant changement de résidence ou modification de la situation de l'intéressé soit soumise à l'avis de la commission administrative paritaire du corps auquel celui-ci appartient, ni de porter atteinte à aucune des garanties fondamentales des fonctionnaires qu'il appartient au seul législateur de déterminer. 2) Au nombre de ces garanties fondamentales figurent, d'une part, le droit d'être affecté à un emploi pour exercer les missions afférentes au grade, que le fonctionnaire détient dans son corps, d'autre part, l'obligation, pour l'administration, de recueillir l'accord du fonctionnaire intéressé pour l'affecter à un emploi ne correspondant pas à de telles missions. 3) Le décret attaqué ne permet de prononcer, sous le contrôle du juge, que des affectations à des missions afférentes au grade que le fonctionnaire détient dans son corps, et ne déroge donc pas aux statuts particuliers en tant que ceux-ci définissent les missions de chaque corps et subordonnent, dans certains cas, l'exercice de ces missions à la détention d'un titre ou d'un diplôme spécifique. Ainsi, en édictant ces dispositions, le gouvernement n'a ni excédé la compétence du pouvoir réglementaire, ni méconnu les dispositions législatives relatives aux positions, à la mobilité et à la mutation des fonctionnaires.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - STATUTS - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES - CONSEILS SUPÉRIEURS DE LA FONCTION PUBLIQUE - CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L'ÉTAT - CONSULTATION - PROJET DE DÉCRET COMPORTANT DES DISPOSITIONS STATUTAIRES CONCERNANT L'ENSEMBLE DES FONCTIONNAIRES DE L'ETAT - FORMATION COMPÉTENTE - ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE (ART - 2 - 4° DU DÉCRET DU 28 MAI 1982).

36-07-03-01 Lorsqu'un décret comporte des dispositions statutaires concernant l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat, il doit être soumis à l'assemblée plénière du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat sur le fondement du 4° de l'article 2 du décret n° 82-450 du 28 mai 1982 et non à la commission des statuts de ce conseil, sur le fondement des dispositions combinées du 5° de l'article 2 et du a) de l'article 13 du même décret.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2009, n° 316479
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Sauvé
Rapporteur ?: M. Philippe Barbat
Rapporteur public ?: M. Struillou Yves
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:316479.20091228
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