Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier et 23 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Stéphane A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 6 novembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 11 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 mars 2005 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale annulant la décision du 10 septembre 2004 de l'inspecteur du travail refusant d'accorder à la Compagnie générale des eaux l'autorisation de le licencier et accordant cette autorisation ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la Compagnie générale des eaux le versement d'une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Gérard-David Desrameaux, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Haas, avocat de M. A et de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la Compagnie générale des eaux,
- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public,
- la parole ayant été à nouveau donnée à Me Haas, avocat de M. A et à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la Compagnie générale des eaux ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 3 mars 2005, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a autorisé la compagnie générale des eaux à licencier M. A, employé de cette société en qualité d'agent d'exploitation et salarié protégé au titre de ses mandats de délégué du personnel et de membre du comité d'établissement, du comité central d'entreprise et du comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail ; que le tribunal administratif de Rouen, par un jugement du 11 octobre 2007 et la cour administrative d'appel de Douai, par un arrêt du 6 novembre 2008, ont rejeté la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du ministre ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'il ressort de l'arrêt attaqué, qu'après avoir analysé le moyen de M. A relatif à l'irrégularité de la procédure de licenciement comme tiré de la méconnaissance de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement, la cour a écarté un tel moyen au motif que la méconnaissance de ces stipulations, à la supposer établie, n'entacherait pas d'illégalité la décision d'autorisation de licenciement ;
Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, d'apprécier, sous le contrôle du juge, si les règles de procédure d'origine conventionnelle préalables à sa saisine ont été respectées ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit en jugeant inopérant le moyen tiré de ce que la procédure de licenciement avait méconnu la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement, et à demander pour ce motif son annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat et de la Compagnie générale des eaux la somme de 1 750 euros chacun que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A la somme que demande la Compagnie générale des eaux au même titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 6 novembre 2008 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Douai.
Article 3 : L'Etat et la Compagnie générale des eaux verseront chacun à M. A la somme de 1 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la Compagnie générale des eaux tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Stéphane A, à la Compagnie générale des eaux, au président de la cour administrative d'appel de Douai et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.