Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 septembre et 7 décembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kodjovi A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 13 juillet 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation, d'une part, du jugement du 6 juin 2005 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 mars 2003 de l'inspecteur du travail de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de l'Essonne autorisant la société Exel Textile à le licencier pour motif économique et, d'autre part, de ladite décision ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Joanna Hottiaux, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A et de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la société Exel Textile,
- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public,
- la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A et à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la société Exel Textile,
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions qu'il exerce normalement ni avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise, y compris lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou en cas de liquidation judiciaire compte tenu des perspectives de reprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant que, pour opérer les contrôles auxquels elle est tenue de procéder lorsqu'elle statue sur une demande d'autorisation de licenciement, l'autorité administrative doit prendre en compte toutes les fonctions représentatives du salarié et qu'il appartient, par suite, à l'employeur de porter à sa connaissance l'ensemble des mandats détenus par l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'en adressant à l'inspecteur du travail une demande d'autorisation de licenciement de M. A, la société Exel Textile n'a pas mentionné sa qualité de délégué du personnel ; que l'inspecteur du travail n'a pas non plus visé dans sa décision autorisant le licenciement de M. A cette qualité de délégué du personnel ; que l'inspecteur du travail n'a donc pas été mis à même d'apprécier si M. A avait accès aux mesures de reclassement prévues dans des conditions non discriminatoires, compte tenu notamment des exigences propres à son mandat de délégué du personnel ; que, par suite, en statuant comme elle l'a fait, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, M. A est fondé à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Exel France SA le versement à M. A de la somme de 3 500 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 13 juillet 2007 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : La société Exel France SA versera à M. A la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Kodjovi A, à la société Exel France SA et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.