Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 novembre 2006 et 28 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yukata A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 28 septembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 10 juin 2004 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 8 décembre 2000 par laquelle le directeur de l'administration générale du ministère de la culture et de la communication a rejeté sa demande tendant à être inscrit à l'examen professionnel en vue d'une titularisation dans un corps de fonctionnaires de catégorie A ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) d'enjoindre l'Etat d'organiser sous astreinte de 150 euros par jour de retard les épreuves de l'examen prévu à l'article 3 du décret n° 99-476 du 2 juin 1999 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n°84-2 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n°99-476 du 2 juin 1999 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dominique Laurent, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A ;
Considérant que M A, enseignant contractuel affecté au conservatoire supérieur d'art dramatique de Paris, a été licencié par une décision du 25 juin 1999 qui a été annulée par un jugement devenu définitif du tribunal administratif de Paris en date du 5 juin 2000 ; que M. A a été réintégré dans ses fonctions par décision du 1er août 2000 ; que par une lettre du 24 novembre 2000, il a demandé à être admis à passer l'examen professionnel prévu par le décret susvisé du 2 juin 1999 et permettant d'être titularisé dans un corps de fonctionnaires de catégorie A du ministère de la culture et de la communication; que, par décision du 8 décembre 2000, le ministre de la culture et de la communication lui a opposé l'expiration du délai d'un an prévu par l'article 4 de ce décret pour présenter une telle demande de titularisation; que M. A se pourvoit contre l'arrêt en date du 28 septembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions de M. A tendant à l'annulation de l'arrêt de la cour :
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 79 et 80 de la loi du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'Etat que les agents non titulaires peuvent, dans des conditions fixées par décret en conseil d'Etat, accéder à des corps de la fonction publique et y être titularisés; que le décret du 2 juin 1999 a prévu les conditions exceptionnelles d'intégration d'agents non titulaires du ministère de la culture et de la communication et de certains des établissements à caractère administratif qui en dépendent dans des corps de fonctionnaires de catégorie A, par l'organisation d'un examen professionnel ; qu'aux termes de l'article 4 de ce décret : Les agents non titulaires disposent, pour présenter leur candidature, d'un délai d'un an à compter de la date de publication du présent décret ; que cette publication étant intervenue le 9 juin 1999, le délai expirait le 11 juin 2000 ;
Considérant que si M. A faisait l'objet, pendant la période d'une année prévue par l'article 4 du décret du 2 juin 1999, d'une mesure d'éviction qui l'empêchait de faire utilement valoir ses droits à titularisation et, si ce n'est qu'après sa réintégration intervenue elle-même postérieurement à l'expiration de cette période d'une année qu'il a pu demander à bénéficier des dispositions relatives à la titularisation des agents contractuels de son ministère, il appartenait au ministre de la culture de faire droit à cette demande, au titre des mesures qu'il lui appartenait de prendre pour reconstituer rétroactivement sa carrière ; qu'en jugeant, par appropriation des motifs du jugement du tribunal administratif de Paris, que l'exécution du jugement annulant le licenciement de M. A n'impliquait nullement, en plus de la réintégration juridique de l'intéressé et de la régularisation de sa situation, que celui-ci soit autorisé, malgré l'expiration du délai prévu par l'article 4 du décret du 2 juin 1999, à se présenter à l'examen professionnel en cause, la cour a commis une erreur de droit ; que dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ; qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Sur les conclusions à fins d'annulation de la décision du ministre de la culture et de la communication en date du 8 décembre 2000 :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 8 décembre 2000 par laquelle le ministre de la culture et de la communication lui a opposé la forclusion prévue à l'article 4 précité du décret du 2 juin 1999 ;
Sur les conclusions présentées par M. A tendant à l'application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative :
Considérant que l'annulation de cette décision implique nécessairement que M. A soit mis à même de se présenter à un examen professionnel exceptionnel ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de la culture et de la communication d'organiser cet examen dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision ;
Sur les conclusions présentées par M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 911-3 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de prononcer contre l'Etat, à défaut pour lui de justifier de l'exécution de la présente décision dans un délai de six mois à compter de sa notification, une astreinte de 150 euros par jour jusqu'à la date à laquelle cette décision aura reçu exécution ;
Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de cet article et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros à M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 28 septembre 2006 et le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 10 juin 2004 sont annulés.
Article 2 : La décision du 8 décembre 2000 du ministre de la culture et de la communication est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de la culture et de la communication d'organiser un examen professionnel en application du décret du 2 juin 1999 dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : Une astreinte de 150 euros par jour est prononcée à l'encontre de l'Etat s'il n'est pas justifié de l'exécution de la présente décision dans le délai mentionné à l'article 3 ci-dessus.
Article 5 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Yukata A et à la ministre de la culture et de la communication.